Attaque d’un fourgon pénitentiaire dans l’Eure : L’intrigant profil de Mohamed Amra, alias « la mouche », qui s’est évadé
EVASION•Selon nos informations, l’homme avait déjà tenté de s’évader de la prison d’Evreux, dans l’Eure, ce lundiCaroline Politi
L'essentiel
- Un commando a ouvert le feu ce mardi matin contre un convoi de l’administration pénitentiaire dans l’Eure pour libérer un détenu, Mohamed Amra, âgé de 30 ans.
- L’homme avait, selon plusieurs sources, tenté de scier les barreaux de sa cellule lundi et avait été placé à l’isolement.
- Il est mis en cause dans plusieurs crimes en cours d’instruction.
«Je dois avouer qu’on a un peu de mal à comprendre qu’une opération d’une telle ampleur ait été montée pour lui… » Cette confidence, chuchotée par une source policière haut placée, illustre la stupéfaction provoquée par le guet-apens mortel tendu ce mardi en fin de matinée à un convoi de l’administration pénitentiaire. Vers 11 heures, une voiture noire a violemment percuté le fourgon chargé du transfert d’un détenu au niveau du péage d’Incarville, sur l'A13.
« Ce véhicule avait franchi ce même péage quelques minutes auparavant et était resté en attente sur le bas-côté », précise le parquet de Paris. Le convoi était également suivi par un second véhicule d'où ont jailli plusieurs hommes qui ont ouvert le feu sur les cinq agents. Deux sont morts, trois autres ont été blessés, dont l'un est toujours entre la vie et la mort. Cette opération commando, aussi violente que millimétrée, visait vraisemblablement à libérer Mohamed Amra, le détenu en cours de transfert.
Des liens avec le banditisme marseillais
Surnommé « la mouche », l’homme, originaire de la région rouennaise, avait été condamné vendredi pour « vol avec effraction » par le tribunal d’Evreux dans trois restaurants. Une peine qui s’ajoute à une longue liste : vols aggravés, association de malfaiteurs, extorsion, violence avec arme… Mais ces condamnations, qui pourraient dépeindre l’image d’un petit délinquant, détonnent avec les affaires en cours.
Le trentenaire avait été transféré ce mardi matin vers 8 heures de la maison d’arrêt d’Evreux, dans l’Eure, où il est en détention depuis le 11 avril, vers le tribunal judiciaire de Rouen, afin d’être auditionné dans une affaire de tentative de meurtre et d'extorsion avec arme.
Ce dossier s’ajoute à un autre toujours à l’instruction : il est mis en examen par la Jirs de Marseille notamment pour enlèvement et séquestration ayant entraîné la mort. « C’est un homme originaire de Normandie mais qui a des liens importants avec le grand banditisme marseillais », précise une source policière. Et d’ajouter : « Il est lié au trafic de drogue, plutôt au niveau des commanditaires, mais on ne l’imaginait pas au niveau d’une telle opération. »
Une autre tentative d’évasion ?
D’autant que selon des sources concordantes, l’homme aurait déjà tenté de s’évader de la prison d’Evreux tout récemment : il a été placé lundi à l’isolement, soupçonné d’avoir cherché à scier les barreaux de sa cellule. « Des surveillants ont remarqué qu’il était en train d’apposer du scotch sur les barreaux, ce qui est une manière de cacher ce qu’il faisait », précise une source proche de l’enquête.
Incarcéré depuis janvier 2022, d’abord à la prison parisienne de la Santé pendant un an et demi puis aux Baumettes, à Marseille, entre septembre 2023 et avril 2024, Mohamed Amra n’était pas pour autant classé DPS, détenu particulièrement signalé. « Cette affaire [des barreaux sciés] était trop récente pour que son statut soit réévalué et on ne lui connaissait pas d’autres tentatives », insiste une source judiciaire. Il était toutefois considéré comme nécessitant une « escorte de niveau 3 », ce qui signifie que trois agents pénitentiaires devaient l’encadrer. Toutefois, il y a quelques jours, décision avait été prise de renforcer l'équipe avec deux agents supplémentaires, dont un officier. Ils étaient tous armés et certains, selon la procureure de Paris, auraient fait usage de leur arme.
Un vaste dispositif a été mis en place pour tenter de retrouver la trace de celui qui est désormais l’homme le plus recherché de France. Cet après-midi, près de 200 gendarmes et une équipe du GIGN ont silloné le secteur pendant qu’un hélicoptère survolait la région. Objectif : qu’il ne s’évanouisse pas dans la nature.
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