Affaire Xavier Dupont de Ligonnès : Pourquoi l’hypothèse de sa sœur, qui croit la famille en vie, n’est pas crédible
ENQUETE•Dans un livre paru ce mercredi, la sœur de XDDL affirme que toute la famille est en vie et a fui aux Etats-Unis. Si on ignore où se trouve le père de famille, cette hypothèse est écartée par les enquêteursCaroline Politi
L'essentiel
- La soeur de Xavier Dupont de Ligonnès a publié un livre dans laquelle elle assure que son frère et sa famille sont en vie et sous protection de témoin.
- Une hypothèse que les enquêteurs ne juge pas crédible.
- Malgré d'intenses recherches, le principal suspect de cette tuerie familiale reste introuvable.
La question le fait sourire. Non, il n’a pas lu le livre de la sœur de Xavier Dupont de Ligonnès. Et non, il n’a pas franchement l’intention de s’y plonger. « Si je devais lire tous les livres qui sont sortis sur lui, ça me prendrait un temps fou », sourit ce policier, fin connaisseur du dossier, alors que sort ce mercredi Xavier, mon frère, présumé innocent (ed. Harper Collins, écrit par Christine Dupont de Ligonnès. La sœur du principal suspect de cette tuerie familiale perpétrée à Nantes en avril 2011 y tient une thèse balayée depuis longtemps par les enquêteurs : selon elle, son frère et sa famille auraient été exfiltrés à l’étranger. « Vous savez, des familles de mis en cause qui refusent de croire en la culpabilité de leur proche, même après une condamnation, il y en a beaucoup », précise une autre fonctionnaire.
Certes, comme le rappelle Christine Dupond de Ligonnès, Xavier Dupond de Ligonnès reste présumé innocent. Sa trace s’est perdue le 15 avril 2011 dans le Var, une semaine avant la découverte des corps sous la terrasse de la maison familiale. Depuis, malgré des recherches hors-norme, des centaines de signalements, l’homme est introuvable. Comme évaporé. Un groupe de l’Office central de la répression aux personnes (OCRVP) et la PJ de Nantes continuent régulièrement de vérifier des signalements. « Il n’y a personne à 100 % sur l’affaire, mais lorsque des témoignages semblent pertinents, ils sont vérifiés », insiste une source policière. Deux thèses s’imposent aujourd’hui : soit l’homme est parvenu à prendre la fuite et se trouve aujourd’hui en cavale, soit il s’est suicidé. « Pour l’instant, on ne peut pas fermer la porte à l’une ou l’autre de ces deux hypothèses », insiste-t-elle.
Achat de cartouches, de chaux vive et de sacs plastique
Reste que dans les deux cas, il fait figure de suspect n°1. Surtout, la mort du reste de la famille ne fait aucun doute, contrairement à ce qu’affirme Christine Dupont de Ligonnès qui évoquait, samedi soir dans l’émission Quelle Epoque, une « mise en scène ». Les corps retrouvés ont fait l’objet d’expertises approfondies. Non seulement les ADN ont permis de prouver qu’il s’agissait bien d’Agnès Dupont de Ligonnès et de leurs quatre enfants, mais les analyses ont également révélé que ces derniers avaient été drogués avant leur mort. Si l’arme du crime n’a jamais été retrouvée, tous ont été abattus avec une carabine 22 long rifle, similaire à celle dont avait hérité le fugitif. Des achats qu’il a réalisés dans les semaines précédentes accréditent la thèse d’une préméditation : achat de cartouches, de sacs en plastique de grande contenance ou de chaux vive dans différents magasins d’outillage jusqu’à la veille des meurtres.
Pour Christine Dupont de Ligonnès, ces achats réalisés sans prendre de précaution particulière sont justement la preuve qu’il n’a pas pu tuer sa famille : s’il avait réellement eu des intentions meurtrières, il aurait cherché à se dissimuler. « Ce qui est très intrigant, s’il a tué toute sa famille, c’est pourquoi faire tous ces achats avec une carte bancaire ? Ce n’est pas très malin », assurait-elle samedi sur le plateau de France 2. Pour elle, comme pour son mari et co-auteur, pas de doute, « il jouait son rôle de suspect ». Tous deux soutiennent la thèse d’une exfiltration de la famille organisée en concertation avec les autorités.
Exfiltration par la DEA
Un scénario abracadabrantesque soutenu par le suspect lui-même dans des lettres envoyées à neuf de ses proches avant de disparaître. Dans ces missives, il expliquait avoir intégré un programme de protection de témoins aux Etats-Unis après avoir aidé la Drug Enforcement Agency (DEA), l’équivalent de la brigade des stupéfiants américaine, en infiltrant des boîtes de nuit. « Quand vous lirez ce courrier, nous n’existerons plus officiellement, en tant que Français », écrit-il. Et d’ajouter : « Nous n’aurons plus le droit de communiquer avec notre famille et nos amis, pendant un temps indéterminé, au moins jusqu’à la fin du procès. » Une piste peu crédible mais qui avait, malgré tout, fait l’objet d’une vérification avant d’être définitivement écartée.
Si le mystère « XDDL » demeure, les investigations titanesques dans ce dossier ont toutefois permis de faire émerger des pistes, notamment sur un mobile. L’homme était criblé de dettes et multipliait les déconvenues professionnelles. Quelques semaines avant les meurtres, il écrivait à une ancienne maîtresse ses idées noires. « J’ai quatre mois de loyer impayés. (…) J’ai des idées morbides : foutre le feu à la maison après avoir donné des somnifères à chacun, me foutre sous un 35-tonnes pour qu’Agnès touche 600.000 euros d’assurance. » Un message prémonitoire ?