Simulacre de noyade : Où en est l’enquête de la police des polices sur le formateur mis en cause ?
investigations•Les enquêteurs de l’IGPN ont mené des auditions au sein de l’école de police d’Oissel (Seine-Maritime), où un formateur a été filmé en train de soumettre des élèves à un simulacre de noyadeThibaut Chevillard
L'essentiel
- Un formateur de l’école de police d’Oissel, près de Rouen, a été suspendu fin novembre après la diffusion d’une vidéo montrant un simulacre de noyade imposé aux élèves.
- Une enquête administrative de l’IGPN, la « police des polices », a été lancée. Dans ce cadre, les enquêteurs ont mené cette semaine une série d’auditions au sein de l’établissement. Au terme de leurs investigations, ils pourront formuler des propositions de sanctions si des manquements sont révélés.
- Selon plusieurs médias, la direction de l’établissement avait été informée dans le passé des méthodes de ce formateur.
Après la révélation d’une vidéo montrant un simulacre de noyade imposé à des élèves, l’enquête administrative de l’IGPN, la « police des polices », se poursuit. Selon France Info, les enquêteurs mènent, depuis jeudi, une série d’auditions au sein de l’école de police d’Oissel, en Seine-Maritime. Fin novembre, un formateur spécialisé en technique d’intervention a été suspendu à titre conservatoire après la diffusion, sur les réseaux sociaux, d’une vidéo montrant d’apprentis gardiens de la paix accroupis le long d’un mur, un tissu noir sur la tête, sur laquelle on leur verse de l’eau tandis qu’on leur demande de chanter La Marseillaise.
La porte-parole de la police nationale, Sonia Fibleuil, avait expliqué sur France Info qu’il s’agissait d’un « un acte individuel », une « initiative plus que malheureuse » prise par le formateur incriminé. L’enquête des « bœuf-carottes », menée pour « manquement à la déontologie », vise à « déterminer les faits » et comprendre s’ils ont été récurrents, avait précisé Sonia Fibleuil, qui « condamne » les agissements de ce policier.
La direction de l’école alertée
Le 30 novembre dernier, le père d’un élève assurait sur RMC que son fils a été soumis à plusieurs reprises à ce même exercice depuis le début de sa formation. « Ça fait deux mois et demi que ça dure », expliquait-il à la radio, ajoutant que les élèves subissaient l'« emprise » et les « menaces » de ce formateur, qu’il qualifie de « tortionnaire ».
Au moment de la révélation de ces images, filmées le 24 novembre, une source syndicale avait indiqué à l’AFP que ce policier « a déjà été signalé par le passé pour ce type de méthodes, qui sont hors déontologie ». Mercredi, RTL a dévoilé qu’un ancien élève de l’école avait envoyé, le 1er juin dernier, un rapport pour alerter la direction de l’école sur les méthodes de ce formateur. Un document de deux pages qui décrit les « dérives » de ce policier. Selon la radio, cet élève indique « avoir reçu des coups de poing au niveau du torse et de la tête de la part du brigadier-chef », et avoir subi une « prise d’étranglement » lors d’une évaluation.
Plusieurs sanctions possibles
Ce rapport a été versé à l’enquête administrative ouverte par l’IGPN le 28 novembre. A l’issue des investigations, les enquêteurs rendront leurs conclusions. S’ils constatent des manquements, ils pourront formuler des propositions de sanctions dites « du premier groupe » : avertissement, blâme, ou exclusion temporaire de fonctions de 1 à 3 jours. Ils peuvent aussi suggérer de renvoyer le formateur mis en cause devant le conseil de discipline. Les membres de ce conseil pourront alors formuler des propositions de sanctions plus importantes, allant de la rétrogradation à l’exclusion définitive du policier. C’est le directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux, qui tranchera et prendra la décision.
En 2022, le nombre de saisines administratives de l’IGPN s’est élevé à 192, contre 176 l’année précédente, indique son rapport annuel. Au cours de ses enquêtes, la police des polices a relevé 565 manquements professionnels et déontologiques, contre 728 en 2021, et 599 en 2020. Elle a proposé le renvoi de 112 agents devant le conseil de discipline et préconisé des sanctions du 1er groupe à l’encontre de 132 policiers.