Piqûres en boîte de nuit : 461 victimes, 381 plaintes… L’inquiétante vague continue
ENQUETE•Le nombre de personne se plaignant d’avoir été piquées dans un bar ou un rassemblement festif ne cesse d’augmenterThibaut Chevillard
L'essentiel
- Une vague inexpliquée de piqûres touche depuis début avril des jeunes dans des boîtes de nuit, bars et festivals de toute la France.
- Selon nos informations, la police a recensé 461 victimes et enregistré 381 plaintes.
- Les festivals qui s’apprêtent à accueillir cet été des milliers de participants réfléchissent aux mesures qu’ils pourraient prendre face à cet inquiétant phénomène.
Plus la liste des victimes s’allonge, plus le mystère s’épaissit. Ces dernières semaines, les piqûres à la seringue se sont multipliées en France. Selon un dernier bilan porté à la connaissance de 20 Minutes, la police a recensé 461 victimes et enregistré 381 plaintes. A Paris, quinze enquêtes ont été ouvertes du chef d’administration de substance nuisible après des dépôts de plaintes, nous indique le parquet. Des faits qui ont lieu principalement lors de concerts ou de soirées en boîte de nuit ou dans des bars, et dont les enquêteurs peinent toujours à comprendre le motif.
Cette vague inexpliquée de piqûres n’épargne aucune région de l’Hexagone. A Strasbourg, huit personnes ont rapporté avoir été piquées fin mai lors du concert du rappeur PLK au Zénith. A Belfort, deux jeunes hommes et quatre jeunes filles, âgées de 17 à 18 ans, affirment également avoir constaté sur leur corps des traces de piqûres alors qu’ils se trouvaient au Festival international de musique universitaire.
A Nîmes, 51 personnes affirment avoir été victimes de piqûres sauvages lors de la feria. A Marseille, un adolescent de 15 ans a été admis aux urgences de l’hôpital Saint-Joseph après avoir été pris d’un malaise lors du concert de Jul au stade Vélodrome. « Perte de connaissance, malaise, vomissements »… Sur Facebook, son père affirme que le jeune homme s’est trouvé mal lui aussi après avoir été piqué.
Pas de substance détectée
Mais c’est en Bretagne et en Loire-Atlantique que le nombre de cas semble le plus important : début mai, 69 piqûres avaient déjà été recensées dans des discothèques et établissements du même type, sans qu’aucune substance chimique ne soit découverte. « Le motif de ces agissements, sans contrepartie associée, vol ou violences corollaires, n’est pas identifié », reconnaissait dans un communiqué le parquet général de la cour d’appel de Rennes. Les résultats des analyses qui avaient été diligentées, ajoutait-il, « sont tous négatifs, tant au GHB qu’à d’autres substances toxiques ».
« Sur plus d’une centaine de prélèvements effectués, aucune substance n’a été retrouvée, notamment ce fameux GHB dont on entend beaucoup parler, mais aussi d’autres substances qui ont été recherchées de façon exhaustive », a confirmé à France 3 le professeur Joëlle Micallef, directrice du Centre d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance – Addictovigilance (CEIP-Addictovigilance) PACA Corse.
Dans la quasi-totalité des cas recensés, aucune substance toxique n’a été identifiée, excepté dans deux cas, à Roanne et dans les Pyrénées orientales. « Le GHB administré de cette façon n’aurait de toute façon pas les mêmes effets que lorsqu’il est ingéré », confie à 20 Minutes une source policière. Est-ce une façon, pour les auteurs, de détourner l’attention des victimes ? Dans le but de les voler ? De créer une psychose ? Les enquêteurs peinent toujours à comprendre. D’autant que peu de suspects ont été identifiés et interpellés.
Les festivals se préparent
Mais le 5 juin, un jeune de 20 ans, originaire de Toulon, a été mis en examen dans le cadre d’une information judiciaire ouverte notamment pour « violences aggravées par arme et par préméditation ». Il est suspecté d’avoir piqué une vingtaine de personnes qui assistaient deux jours plus tôt à l’enregistrement de l’émission de TF1 « La chanson de l’année » sur les plages du Mourillon, à Toulon.
L’une des victimes, un agent de sûreté qui travaillait sur le site, a été hospitalisée après avoir fait un malaise. Le suspect a été repéré par deux jeunes femmes qui ont indiqué aux enquêteurs l’avoir vu avec une seringue et avoir réussi à l’empêcher de les piquer. Des faits que le jeune homme « conteste entièrement », avait fait savoir le procureur de Toulon, Samuel Finielz.
Les organisateurs de festivals veulent se montrer rassurants et réfléchissent pour cet été à des mesures qu’ils pourraient prendre pour assurer la sécurité des milliers de participants. « On s’est posé la question quand on en a entendu parler du phénomène dans les médias », explique à 20 Minutes une chargée de communication du festival Hop Hop Hop.
Pour éviter que du GHB soit administré dans le verre des festivaliers, les organisateurs vont distribuer des « protections pour les gobelets ». Et concernant les fameuses piqûres, une réflexion est en cours concernant la mise en place d’un « code que les victimes ou témoins pourront utiliser dans les différents bars ou points infos du festival ». Les contrôles seront également « intensifiés ». Mais comment détecter la présence d’une seringue souvent très petite ? « C’est hyper compliqué », reconnaît la chargée de communication du festival.