TEMOIGNAGELa détresse d’un boulanger cambriolé pour la… quatorzième fois

Gironde : La détresse d’un boulanger cambriolé pour la… quatorzième fois

TEMOIGNAGEChristophe Garde, boulanger à Ludon-Médoc en Gironde, vient de subir son quatorzième cambriolage en quinze ans, et confie son « ras-le-bol »
Mickaël Bosredon

Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • Boulanger aguerri de 44 ans, Christophe Garde se dit « à bout » et « dégoûté » par cette série de cambriolages.
  • A son compte depuis l’âge de 28 ans, il songe même à raccrocher.
  • Sa compagne qui travaille avec lui, raconte venir dorénavant à la boulangerie avec « la peur au ventre. »

Un boulanger au bord de la crise de nerfs. Christophe Garde, qui tient avec sa compagne, Ingrid Barrios, la boulangerie La Fleur de sel à Ludon-Médoc (Gironde), vient d’être cambriolé pour la… quatorzième fois en quinze ans. « C’est trop, je n’en peux plus », nous dit ce professionnel aguerri de 44 ans.

Ce mardi, 20 Minutes l’a rencontré dans son établissement. Encore très marqué par les événements, le boulanger a envie de parler : « il faut que ça sorte », lâche-t-il. « Cela s’est passé dans la nuit de vendredi à samedi, sans doute aux alentours de 1 h du matin, raconte-t-il. Nous sommes arrivés à 4h30 pour embaucher avec ma compagne, et nous avons vu l’état de la porte, complètement défoncée, et la vitre d’à côté brisée. Sur le parking devant l’établissement, il y avait nos panières en osier, et à l’intérieur du magasin tout était dévasté. »

« Nous avions déjà subi un cambriolage en juillet dernier »

Christophe Garde et Ingrid Barrios ont relevé « neuf impacts » sur la lourde porte d’entrée, qui a été tirée vers l’extérieur pour permettre à l’un des cambrioleurs d’entrer. « Ça a dû faire un bruit d’enfer », relève le boulanger. Une fois à l’intérieur, l’individu aurait permis à ses complices de pénétrer par l’arrière de la boutique. « Nous avions déjà subi un cambriolage en juillet dernier, poursuit Christophe Garde, à cette époque je m’étais dit que j’allais attendre un peu pour refaire mon stock, sachant que je devais réaliser mon inventaire au 30 septembre… Bref, je venais de racheter pour 3.000 euros de marchandises, il y a quinze jours. Les cambrioleurs sont partis avec au moins 1.500 euros de facture. »

Une lourde addition pour ce petit commerçant. Mais c’est surtout le « ras-le-bol » et le « sentiment d’abandon » qui l’affectent. « Personne ne nous soutient », peste-t-il. « Les cambriolages ont démarré dès ma première année d’installation, en 2004, se souvient-il. Pourtant, au début, je m’étais équipé d’un système d’alarme avec détecteur de mouvements. Mais au bout de quatre cambriolages, j’ai retiré l’équipement, qui me coûtait quand même 300 euros par mois et qui ne servait à rien. Alors, quand on me reproche aujourd’hui que mon magasin est sans protection, moi je dis que ce n’est pas aussi simple que cela. »

« Je n’ai plus envie »

Christophe Garde assure qu’il garde une passion intacte pour son métier, qu’il a commencé à l’âge de 14 ans avant de se mettre à son compte à 28 ans. « Si je ne l’avais pas la passion, je n’aurais pas rouvert aussi vite après ce nouveau cambriolage. » Mais il se dit aussi « à bout », « dégoûté ». « Pour moi, me mettre à mon compte cela voulait dire la liberté, mais aujourd’hui, avec tout ce que j’ai subi, les cambriolages mais aussi les plaintes des voisins parce que je travaille la nuit, je n’ai plus envie. »

« On travaille sept jours sur sept, quatorze heures par jour, ça fait cinq ans qu’on n’a pas pris de vacances, renchérit Ingrid Barrios. Alors oui, l’envie de tout laisser tomber est là, même si on sait qu’on n’a pas le choix, qu’il faut continuer, parce que c’est notre gagne-pain. »

Un secteur touché par les cambriolages

Le boulanger se demande à lui-même s’il n’a pas fait « des mauvais choix. » « C’est peut-être l’endroit qui n’est pas bon, parce que les cambriolages ici, c’est très souvent. » La même nuit, une pizzeria et un coiffeur situés juste à côté de la boulangerie ont aussi été visités, ainsi qu’un autre commerce à Arsac. « Depuis un mois, entre Macau, Parempuyre et Ludon, ça n’arrête pas. Et le Médoc globalement est très touché, surtout l’été. »

En Gironde, les cambriolages sont en hausse de 10 % depuis le début de l’année, et les zones les plus sensibles se situent hors agglomération. Contactée par 20 Minutes, le commandant de la compagnie de gendarmerie de Lesparre-Médoc, Cécile Joncour, confirme une série de cambriolages ce soir-là dans le secteur. Et reconnaît une « légère hausse des faits depuis quelque temps ».

La gendarmerie mise sur la prévention

« On ne reste pas sans rien faire non plus, embraye Cécile Joncour : tout d’abord nous avons augmenté depuis un an déjà nos patrouilles nocturnes de surveillance, et nous déployons évidemment tous les moyens de police technique et scientifique lors de chaque cambriolage. »

Le commandant de gendarmerie insiste aussi sur la prévention en la matière. « J’y crois beaucoup, et à Ludon par exemple il existe un dispositif de participation citoyenne pour prévenir les cambriolages qui fonctionne bien. J’aimerais le développer dans le Médoc, pour s’appuyer sur un vrai réseau. Par ailleurs, nous multiplions les réunions avec les commerçants pour les conseiller. »

Cela n’enlèvera pas l’inquiétude d’Ingrid Barrios. « Aujourd’hui, je viens travailler avec la peur au ventre, dit-elle. La première chose que je fais en arrivant à la boulangerie, c’est regarder si tout va bien depuis ma voiture. » Christophe Garde se dit, lui, « angoissé d’imaginer comment les choses tourneraient », s’il tombe un jour « nez à nez » avec ses cambrioleurs.