Municipales 2020 à Strasbourg : Que penser de l’alliance LREM et LR ?
POLITIQUE•En vue du second tour des élections municipales à Strasbourg, les listes du candidat Alain Fontanel (LREM) et du candidat Jean-Philippe Vetter ont fusionné. Pourquoi et quelles conséquences ?Gilles Varela
Manœuvre de haut vol ? Opportunisme politique ? Coup bas ou survie ? Qu’elle plaise ou déplaise, la fusion à Strasbourg mardi dernier, quelques minutes avant la clôture du dépôt des listes LREM et LR, a surpris tout le monde. Alain Fontanel (LREM) et Jean-Philippe Vetter (LR) assurent « avoir pris leurs responsabilités ». Après ce rebondissement dans une campagne des municipales jusqu’ici plutôt calme et presque écrite, comment cette décision est-elle perçue ?
« En trois mots, ce qui s’est passé, c’est naïveté, ego et opportunisme politique », résume le politologue Philippe Breton, directeur éditorial de l’Observatoire de la vie politique et sociale en Alsace (Ovipal). Résultat : « beaucoup d’électeurs sont aujourd’hui dans l’expectative, un peu désorientés ».
Bruno Studer, député alsacien LREM, rappelle que des portes étaient et restent ouvertes. « ll y avait d’autres scénarios possibles. C’est peut-être un des plus inattendu qui a abouti hier, car en même temps, il aurait été possible de travailler avec Catherine Trautmann (PS). Cela se fera peut-être par la suite, on ne sait pas. On aurait pu imaginer une union encore plus large. Mais il fallait prendre ses responsabilités. »
« Répondre à l’urgence économique »
Le député, reconnaît qu’au-delà de convergences évidentes entre les listes LREM et LR, « il y avait un vrai risque, identifié, de laisser la ville de Strasbourg et l’eurométropole aux mains de l’extrême gauche. » Reprochant à la liste écologiste « l’impossibilité pour quiconque de s’entendre avec elle », l’alliance avec les Républicains répondait avant tout à l’urgence économique à laquelle la future équipe municipale devra répondre. « Je ne vois pas comment, seul, on peut estimer être en position de répondre à tous les défis qui vont se poser. »
Même vision pour la députée européenne Anne Sander, Les Républicains. Cette dernière souligne que « ce n’est pas un accord qui a été décidé au niveau national, mais bien un accord local, motivé par le sens des responsabilités. Est-ce qu’il avait le choix ? » s’interroge la députée. Il fallait à tout prix faire barrage à la candidature écologiste. La députée insiste également sur l’importance de défendre le siège du Parlement européen à Strasbourg, auquel les verts se seraient toujours opposés. Sans oublier les « questions d’accessibilité de Strasbourg. »
La crainte de perdre des électeurs ? Nourrir l’abstention ? Décrédibiliser les politiciens ? « Non, répond la députée. C’est une dynamique positive qui montre le sens de responsabilité de ces candidats. » Plus réservé sur cette éventuelle dynamique électorale, Philippe Breton tempère : « Il y a clairement eu une manipulation politique. Ce n’est, bien sûr, pas illégal, et les électeurs jugeront. » Analyse faite, cette « manœuvre a porté ses fruits puisqu’elle a créé une ambiance de négociation entre écologistes et PS qui leur a fait exclure du cadre de leurs négociations le fait qu’il pouvait y avoir une solution de l’autre côté. »
RESULTATS MUNICIPALES A STRASBOURG
Si la manœuvre peut mathématiquement fonctionner, reste à savoir ce que vont faire « des électeurs de gauche, qui ont rallié de bonne foi LREM en pensant que le monde ancien était terminé, qu’on ferait plus de politique politicienne », s’interroge Philippe Breton. « Savoir s’ils ne se détournent pas de cette élection ou même changent leur vote le 28 juin prochain… Quid encore de l’abstention des électeurs qui ne s’y retrouvent plus. » Une chose est certaine, cette alliance LREM LR laisse présager une campagne d’entre-deux tours animée mais aussi matière à réfléchir.