Présidentielle 2022 : Au Salon de l'agriculture, la voix des paysans « oubliés de la PAC »
CAMPAGNE•Au Salon de l'agriculture, un collectif était venu porter la voix des plus petits paysans, premières victimes de la pauvreté et du réchauffement climatiqueEmilie Petit
L'essentiel
- Le Salon de l'agriculture, qui s'est ouvert le 26 février, s'apprête à fermer ses portes, et ses exposants, à remballer leurs stands.
- « Globalement, les sujets agricoles et alimentaires sont assez peu présents dans les débats de l'élection présidentielle », constate Mathieu Courgeau, éleveur laitier en Vendée et président de la plateforme Pour une autre PAC, présent au Salon de l'agriculture pour porter la voix de ses adhérents.
- Selon lui, la réforme de la PAC, qui s’appliquera à partir de janvier 2023, continuera de privilégier les grosses exploitations.
Ça sent un peu le spleen dans les allées – pas vraiment bondées – du Parc des expositions, à Paris. Le Salon de l'agriculture, qui a ouvert le 26 février après un an d'absence due à la pandémie de Covid-19, s’apprête à fermer ses portes, et les exposants, à remballer leurs stands, le cœur sans doute un peu lourd. Point d’orgue, tous les cinq ans, de l'élection présidentielle, le Salon de l’agriculture millésime 2022 aura été un tantinet différent de ses prédécesseurs, occulté médiatiquement par la guerre en Ukraine et marqué par la publication d'un nouveau rapport du Giec sur le réchauffement climatique, plus alarmant et plus inquiétant encore que le précédent.
Difficile, dans ce contexte, d'inviter les problématiques financières et écologiques des petits agriculteurs français à la table de la campagne électorale. « Globalement, les sujets agricoles et alimentaires sont assez peu présents dans les débats », regrette Mathieu Courgeau, éleveur laitier en Vendée et président de la plateforme « Pour une autre PAC ».
Un fort besoin d’adaptation « au contexte climatique »
Lancée en 2017, cette plateforme, qui regroupe 45 organisations d’agriculteurs et de citoyens en faveur d'une refonte de la politique agricole commune (PAC), s’est constituée en collectif à l’occasion de l’élection présidentielle. Rebaptisée « Nous produisons, nous mangeons, nous décidons », la structure s’était donnée pour mission de sensibiliser, lors du salon, les candidats à l’élection présidentielle aux enjeux agricoles. « Nous, petits agriculteurs, avons un très fort besoin, aujourd’hui, d’adapter nos exploitations agricoles au nouveau contexte climatique », explique le Vendéen.
Victimes directes des effets du réchauffement climatique et du déclin de la biodiversité, les petits exploitants doivent également faire face à des difficultés financières récurrentes. Et malgré une révision quinquennale obligatoire, ce n’est pas la politique agricole commune (PAC), dont dépend une bonne partie de leurs revenus, qui semble pouvoir inverser la tendance. En atteste le rapport de l'association Terre de liens, publié le 22 février, qui chiffre à 100.000 la diminution du nombre d'agriculteurs en dix ans en France, ainsi que les derniers chiffres de l'Insee publiés en 2021, qui recensent 18,1 % d’agriculteurs qui vivent toujours sous le seuil de pauvreté.
Porter la voix des « oubliés de la PAC »
« Aujourd’hui, on a une PAC qui favorise les agriculteurs propriétaires de grandes exploitations. Plus on a d’hectares, plus on touche de subventions agricoles. Cela ne favorise pas le développement de modèles plus petits mais durables et en accord avec des pratiques plus respectueuses de l’environnement », avance Mathieu Courgeau. La réforme de la PAC doit entrer en vigueur en janvier 2023 et, selon l’éleveur, le système de politiques publiques actuel aurait même tendance à créer des « oubliés de la PAC ». Notamment certains maraîchers qui cultivent en bio sur de petites surfaces et ne touchent donc presque aucune aide.
Chez les candidats à l’Elysée, la question de l’alimentation, de l’agroécologie et des enjeux agricoles de manière générale semble pourtant bien présente. Et malgré le contexte, la plupart des prétendants à l'Elysée sont allés à la rencontre des exposants et agriculteurs pour échanger avec eux autour des problématiques environnementales et économiques. Seul Jean-Luc Mélenchon n’a pas souhaité faire le déplacement Porte de Versailles, jugeant que le Salon de l’agriculture « promeut un mode d’agriculture qui n’est pas le nôtre ».