STRATEGIEEntre unité et zizanie, quelles alliances pour les législatives ?

Législatives 2022 : Entre unité et zizanie, quelles alliances pour le scrutin de juin ?

STRATEGIEA sept semaines des législatives, les partis tentent de nouer des alliances pour envoyer un maximum de députés à l’Assemblée nationale
Rachel Garrat-Valcarcel et Thibaut Le Gal

Rachel Garrat-Valcarcel et Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Au lendemain de l’élection présidentielle, les partis se plongent déjà dans les législatives des 12 et 19 juin prochains.
  • A sept semaines du scrutin, les mouvements politiques tentent, du RN à LFI en passant par LREM, LR ou encore EELV, de nouer des alliances pour envoyer un maximum de députés à l'Assemblée.
  • Mais après une présidentielle parfois tendue entre les candidats, les discussions ne sont pas toujours faciles.

A sept semaines du premier tour des législatives, les tractations vont bon train. Les partis tentent de nouer des alliances pour envoyer un maximum de députés à l'Assemblée nationale. Si les discussions ont été lancées à gauche entre insoumis, communistes, écologistes et socialistes, elles s’annoncent plus explosives entre le Rassemblement national et Reconquête !, la formation d’Eric Zemmour. Du côté des Républicains, on tente d’éviter l’implosion du parti et les défections de certains élus vers la Macronie. On fait le point sur l’avancée des alliances pour le scrutin des 12 et 19 juin prochains.

  • Chez Les Républicains, la tentation macroniste et le risque d’implosion

Christian Jacob a tenté de se montrer ferme, ce mardi, à l’issue d’un bureau politique sous tension. « On ne peut pas être Les Républicains et majorité présidentielle, on ne peut pas être Les Républicains et Reconquête ! On est un groupe indépendant, la double appartenance n’existe pas », a insisté le patron du mouvement, ce mardi, défendant une campagne avec uniquement les centristes et l’UDI. Mais depuis quelques jours, la droite se fracture sur la possibilité d’une alliance avec Emmanuel Macron en juin prochain.

Après la déroute de Valérie Pécresse à la présidentielle (4,8 %), plusieurs élus LR ont fait la danse du ventre à la Macronie, déclenchant l’ire de leurs collègues. « S’il reste un peu d’énergie à Denis Fasquelle, il pourra devenir trésorier du comité de la lèche à Emmanuel Macron », a vivement réagi le numéro 3 du parti, Aurélien Pradié, vendredi, reprochant au trésorier LR son désir de « rassemblement » avec le président. D’autres proposent un pacte de gouvernement à Emmanuel Macron, comme le maire de Meaux, Jean-François Copé. Certains noms sont également cités pour une potentielle entrée au futur gouvernement, comme le patron des députés LR Damien Abad ou l’ancien candidat à la primaire Philippe Juvin, qui se sont tous les deux abstenus sur le texte voté ce mardi par le bureau politique.

Probabilité d’alliance : 0 %. L’alliance au niveau national avec LREM a été enterrée par Les Républicains ce mardi. Mais le parti n’est pas à l’abri de rapprochements individuels ou d’alliances tacites entre certains députés LR sortants et les marcheurs pour le scrutin de juin.

  • « Je t’aime, moi non plus » entre le RN et Reconquête !

Le « camp national » sera-t-il uni pour les législatives ? L’affaire semble mal embarquée. Depuis la défaite de Marine Le Pen au second tour de la présidentielle, le parti Reconquête ! fait les yeux doux au Rassemblement national. Mais les élus du RN n’oublient pas que la main qui leur est tendue depuis quelques heures est la même qui, dimanche soir encore, giflait leur candidate. « C’est la huitième fois que la défaite frappe le nom de Le Pen », cinglait Eric Zemmour, dans un discours à charge.

« Il faut qu’il dégonfle sa tête, qui est énorme, et qu’il arrête d’insulter les gens », a taclé Louis Aliot, le vice-président du RN, lundi sur France Inter. Le parti à la flamme a d’ailleurs indiqué qu’il investirait d’ici la fin de la semaine des candidats dans l’ensemble des 577 circonscriptions, y compris face aux partisans d’Eric Zemmour. Une décision incompréhensible pour les responsables du parti identitaire. Des débats dignes d’une « cour de récréation au lieu de regarder l’enjeu essentiel », soit un « accord » pour les législatives, a jugé ce mardi Marion Maréchal, l’ancienne députée Front national passée à Reconquête !

Probabilité d’alliance : 10 %. Le Rassemblement national balaie pour le moment toute alliance avec Reconquête !, à « deux-trois exceptions » près. Mais sans accord, le parti risquerait de n’avoir qu’une poignée de députés en juin, prochain malgré les 23,2 % de Marine Le Pen au premier tour de la présidentielle, et sa première place au second tour dans 159 circonscriptions.

  • A gauche, l’alliance sur le bon chemin mais…

Les partis de gauche n’ont pas voulu faire l’union à la présidentielle : les électeurs et électrices l’ont faite pour eux le 10 avril. Les 22 % de Jean-Luc Mélenchon en imposent, il le sait, les autres partis de gauche aussi. Tous, du PCF à EELV et même le PS, ont appelé à discuter d’une union plus ou moins large pour les législatives. Jean-Luc Mélenchon a mis la barre très haut : d’accord pour discuter avec tout le monde, mais si c’est pour soutenir la majeure partie de son programme et sa candidature comme Premier ministre.

Jusque-là, ça n’a pas refroidi les communistes et les écologistes. Les discussions ont bien commencé mais semblent patiner. Ça coince toujours sur le volet international – très polémique à gauche pendant la présidentielle – et européen. Mardi matin, Yannick Jadot s’est dit opposé à « un système d’Europe à la carte », comme semblent le proposer les insoumis. Au PS, c’est plus compliqué : « On ouvre une porte, sans faux espoirs », disait un membre du conseil national du PS lorsque la direction a décidé d’ouvrir des discussions avec LFI. Cette fois, c’est le financement de la retraite à 60 ans qui pose question, c’est pourtant une condition sine qua non de LFI. Une chance pour les socialistes : EELV et surtout le PCF semblent pousser pour les intégrer à l’accord. Une première rencontre entre insoumis et socialistes est prévue mercredi.

Probabilité d’alliance : 50 %. Personne n’a vraiment intérêt à ce que les discussions capotent complètement. Mais le délai est court pour mettre sur la table tous les sujets qui fâchent. En jeu, sans doute pas une victoire mais au moins la possibilité pour la gauche de devenir la principale opposition à l’Assemblée nationale avec une centaine de députés et députées. Et répondre à la « colère dans le peuple de gauche », dixit Sandrine Rousseau.