VENISSIEUXLe retrait de Taha Bouhafs suscite indignations et soupçons

Législatives 2022 : Le retrait de Taha Bouhafs génère des réactions indignées et des soupçons de calcul politique

VENISSIEUXTaha Bouhafs a annoncé ce mardi retirer sa candidature aux législatives dans la 14e circonscription du Rhône, après les attaques dont il a fait l’objet. Une défection qui pourrait profiter à Michèle Picard, candidate PCF… à moins que tout ait été calculé
Jennifer Lesieur avec Lancelot Mesonier

Jennifer Lesieur avec Lancelot Mesonier

L'essentiel

  • Trois jours après avoir officialisé sa candidature aux législatives à Vénissieux, Taha Bouhafs a annoncé se retirer de la campagne.
  • Le représentant de la Nupes explique son retrait par la « tempête d’attaques sans précédent » dont il a été l’objet.
  • Cette défection sert la candidate communiste Michèle Picard, d’où des soupçons de tractations pour renforcer le PCF sur son territoire.

Ira ? Ira pas ? Finalement, Taha Bouhafs n’ira pas aux législatives. Trois jours après son investiture officielle dans la 14e circonscription du Rhône, le candidat de la Nupes a annoncé ce mardi matin sur Twitter qu’il renonçait à se présenter. « J’ai sous-estimé la puissance de ce système quand il veut vous broyer », écrit-il dans son communiqué. « J’ai été soutenu, pas assez pour tenir, mais assez pour être reconnaissant. […] J’ai essayé mais je n’y arrive plus », conclut-il, découragé par une « tempête d’attaques sans précédent ».

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« Une meute s’est acharnée contre lui », a réagi Jean-Luc Mélenchon sur Twitter. « A 25 ans, c’est lourd de vivre avec des menaces de mort et des mises en cause publiques quotidiennes. Je m’en veux de ne pas avoir su le réconforter autant que nécessaire », a écrit le leader LFI.

De son côté, le Comité Métropole de Lyon de LFI a publié dans l'après-midi un communiqué de soutien, en indiquant espérer «que son ultime alerte en forme de renoncement fera enfin l'objet d'une prise de conscience globale des problèmes qu'il soulève, et que dans ce pays où l'on sait tant appeler à la liberté d'expression, l'on finira par découvrir que certains en sont réellement privés». Contacté par ​20 Minutes, Taha Bouhafs n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien.

Cette défection, « une pirouette » en faveur du PCF ?

Au siège LFI de Vénissieux, « on est abattu et scandalisé », selon Gérard Médioni. « Scandalisé par la vague de haine qui a déferlé sur un candidat, uniquement parce qu’il a des origines maghrébines. Les candidats d’extrême droite, bien plus dangereux, n’ont pas reçu le même traitement », déplore-t-il. Gérard Médioni craint aujourd’hui que « beaucoup de militants se désinvestissent de la campagne. On avait un candidat issu de la diversité qui représente une grande partie de la jeunesse de la circonscription, ils pouvaient s’identifier à son parcours ».

Pour Yves Blein, député sortant LREM et candidat à sa réélection, cette défection serait « une pirouette [de LFI] pour retirer leur candidat sous la pression du PCF. Je ne crois pas à sa position victimaire, c’est un habillage de tractations politiques entre LFI et PCF. On a bien vu Fabien Roussel monter au créneau dernièrement pour défendre Michèle Picard. »

Cette dernière se retrouve en effet en première ligne. « La raison l’a emporté », s’est félicité le Parti communiste de Vénissieux, en remettant en avant sa candidate. « Notre circonscription a besoin de la meilleure candidate pour rassembler toutes les populations de toutes nos communes », a indiqué le PCF dans un communiqué. « Michèle Picard incarne le courage des femmes qui défendent les valeurs féministes et laïques. […] La Nupes doit maintenant reconnaître Michèle Picard comme la candidate qui peut rassembler toute la gauche. Nous attendons maintenant son soutien. »

La crainte d’une nouvelle abstention

En attendant de connaître la décision de LFI, Daniel Navrot, politologue, confirme que « Michèle Picard a le champ libre à gauche, maintenant. Le problème dans cette circonscription va être l’abstention, et ça peut faire le jeu du PCF », poursuit-il. « Le retrait de Bouhafs va démotiver une partie des électeurs à aller voter. Il va falloir regarder comment les électeurs LFI vont confirmer ou non leur engagement de la présidentielle. »


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Quant à savoir s’il était trop risqué d’envoyer Taha Bouhafs dans une circonscription qui compte déjà de fortes personnalités, Daniel Navrot tempère : « Le calcul de LFI n’était pas vis-à-vis du PCF, mais de récupérer une circonscription dont le député est macroniste. Il fallait donc un candidat fort pour tenter de gagner. Mais là où LFI a fait une erreur, c’est qu’ils ont sous-estimé la force et la réaction du PCF à Vénissieux. Le PCF est vraiment très ancré sur ce territoire, avec des personnages très forts. Ils pensaient que tout le monde se coucherait à la suite de l’accord. Ils se sont trompés. »