SCRUTINPersonne n'en parle, mais Bayrou et le MoDem ont réalisé un coup de génie

Législatives: Personne n'en parle, mais Bayrou et le MoDem ont réalisé un coup de génie

SCRUTINLe MoDem, avec 68 candidats qualifiés pour le second tour des législatives, devrait obtenir un groupe à l'Assemblée nationale...
Laure Cometti

Laure Cometti

L'essentiel

  • Le candidats du parti centriste de François Bayrou, soutenus par La République en marche, ont fait de très bons scores au premier tour des législatives.
  • Ces résultats vont rapporter d'importantes aides publiques au MoDem ainsi qu'un groupe à l'Assemblée nationale.

«Comme on a connu des échecs au MoDem depuis quelques années, on n’est pas du genre à faire dans le triomphalisme ! » Le ton est humble mais Jean-Baptiste Hamonic, délégué départemental et porte-parole du parti dans les Yvelines sait que sa formation politique vit un moment historique. Le Mouvement démocrate (MoDem) de François Bayrou, porté par la dynamique de la présidentielle, a réalisé son meilleur score depuis 2007 au premier tour des élections législatives dimanche, avec à la clé, des millions d’euros d’aides publiques et un groupe à l’Assemblée nationale, ce qui ne lui était pas arrivé depuis la législature de 2002-2007 (à l’époque où le parti s’appelait encore l’Union pour la démocratie française).

68 candidats MoDem qualifiés pour le second tour des législatives

Ils étaient 75 candidats du MoDem en lice au premier tour des législatives, soit 14 % des 529 candidats soutenus par La République en marche. Ces circonscriptions réservées au parti centriste né en 2007 étaient le fruit de l’accord passé fin février entre Emmanuel Macron et François Bayrou. Seuls sept candidats ne s’étant pas qualifiés pour le second tour, « il y aura un groupe MoDem à l’Assemblée », se réjouit Marc Fesneau, secrétaire général du parti, lui-même en ballottage favorable dans la 1re circonscription du Loir-et-Cher. Les cadres du parti visent entre 50 et 65 sièges. On est loin des deux députés élus il y a cinq ans (dont Jean Lassalle, qui avait quitté le parti à l’été 2016). Pour le parti qui compte selon Marianne 14.000 militants, un député, 51 conseillers régionaux et 48 conseillers départementaux, c’est un bond immense.

Et une sorte de renaissance. « Nous n’espérions pas un tel score au premier tour. Nous avons bénéficié de la vague de La République en marche mais nos candidats ont aussi été qualifiés grâce à leur ancrage local », affirme Marc Fesneau. Sur leurs affiches de campagnes, le logo orange du parti a disparu pour laisser place à la mention « La République en marche ». Sur les bulletins, nulle trace non plus du nom du MoDem.

Le parti pourrait obtenir jusqu’à 3,9 millions d’euros d’aides publiques annuelles

« Dans leurs professions de foi et dans les biographies figurant sur leurs tracts, nos candidats font tous mention de leur appartenance au MoDem », complète Jean-Baptiste Hamonic. La campagne « sous la bannière commune LREM » était selon lui nécessaire pour « ne pas semer la confusion dans l’esprit des électeurs ». Le directeur de campagne de Bruno Millienne ajoute que les « marcheurs » ont beaucoup inspiré son parti, ce qui s’est notamment traduit par l’organisation de « réunions publiques participatives ».

Lors de leur déclaration de candidature en préfecture, les 75 membres du MoDem se sont tous enregistrés sous la bannière de leur parti, et non celle du mouvement macroniste. Une subtilité qui va permettre au parti d’être éligible à l’aide publique aux partis politiques. Composée de deux fractions, cette subvention permet d’engranger chaque année, pendant cinq ans, 37 280 euros par député et 1,42 euro par bulletin obtenu au premier tour (si au moins 50 des candidats présentés, issus de 30 départements, ont obtenu un minimum de 1 % des suffrages exprimés). De quoi faire monter la cagnotte du MoDem, qui a obtenu 932.227 voix dimanche, de 3,18 à 3,86 millions d’euros d’aides annuelles, en fonction de l’estimation basse ou haute du nombre de députés qui l’emporteront le 18 juin prochain. « C’est bien sûr une bonne nouvelle, mais on avait appris à faire sans fioritures », lâche Marc Fesneau. « Et puis ça va, ça vient, on ne verse pas dans l’euphorie financière », reprend-il.

« Ça fait plaisir de ne pas être du côté des vaincus »

« Depuis 2007, on a connu le bon et le moins bon. Ça fait plaisir de ne pas être du côté des vaincus », souffle Jean-Baptiste Hamonic, qui se souvient de moments « très difficiles » après cette année qui a vu François Bayrou obtenir son meilleur score au premier tour de la présidentielle, avant que son parti, rebaptisé MoDem pour l’occasion, ne sombre quelques semaines plus tard aux législatives. S’il enregistre 1,99 million de voix, soit 7,61 % des suffrages exprimés au premier tour, il n’obtiendra finalement que trois sièges dans l’hémicycle.

Avec son très bon score aux législatives du 11 juin dernier, le MoDem, en pleine tempête causée par les soupçons d'emplois fictifs de collaborateurs parlementaires européens, entre dans une nouvelle phase de son évolution. Mais la vague macroniste est telle qu'Emmanuel Macron pourra vraisemblablement se passer du soutien du groupe MoDem à l’Assemblée, où LREM devrait disposer de la majorité absolue (289 sièges). Une nouvelle bienvenue à l'heure où François Bayrou joue les francs-tireurs au sein du gouvernement, en dépit des rappels à l'ordre du Premier ministre Edouard Philippe.

Au MoDem, on veut croire que l'alliance avec la majorité présidentielle est faite pour durer et on fait valoir ses atouts. « François Hollande a commencé avec une majorité puis a dû faire passer des textes par 49-3. Donc il faut absolument garder la majorité la plus large possible », prévient Jean-Baptiste Hamonic. « Le MoDem a des élus locaux que LREM n’a pas et n’aura pas avant 2020 », poursuit-il.

« Nos élus ont une expérience politique que les candidats LREM n’ont pas encore tous acquise, nous avons une connaissance des rapports de force politiques ». Et d’ajouter qu’Emmanuel Macron aura besoin du MoDem pour « rassembler plus largement encore au cours du quinquennat », notamment lors des élections sénatoriales en septembre. D’ici là, le parti devra faire face aux accusations d’emplois fictifs et aux remous qui rythment les relations de son président avec le chef du gouvernement.