Pays de la Loire: Pourquoi des milliers d’offres d’emploi attendent (désespérément) des candidats
EMPLOI•La région Pays de la Loire affiche le plus bas taux de chômage de France. Conséquence paradoxale, ses entreprises ont de plus en plus de mal à recruter...Julie Urbach
L'essentiel
- Le conseil régional des Pays de la Loire doit voter, ce jeudi, un «plan de bataille pour l'emploi»
- La reprise économique rapide et le faible taux de chômage rendent les recrutements beaucoup plus difficiles pour les patrons de la région.
Elle a « plusieurs CDI à offrir ». Pourtant, cette société de menuiserie, qui cherche à s’installer dans la région nantaise, guette toujours les CV. Comme dans toujours plus d’entreprises des Pays de la Loire, « le recrutement est l’une des plus grosses difficultés » chez Martin menuiserie. « On a toujours eu des problèmes de pénurie, assure Antoine Martin, le directeur. Mais là, ça va faire un an qu’on cherche. C’est devenu préoccupant. »
Alors que la région Pays de la Loire enregistre le taux de chômage le plus bas de France (8,1 %), le territoire est désormais confronté à un paradoxe. « La reprise économique est tellement rapide, que nos entreprises peinent à recruter, indique Paul Jeanneteau, vice-président au conseil régional. Toutes les filières sont désormais concernées, que ce soit le numérique, l’agriculture, ou l’aéronautique… » Une tendance qui s’aggrave alors que le conseil régional doit voter, ce jeudi « un plan de bataille pour l’emploi ». Objectif : améliorer la mise en relation entre les demandeurs d’emploi et les entreprises.
Des offres à la pelle
Car des offres, il n’en manque pas. Tous les jours, des appels à recrutement sont émis par des entreprises de la région. « 500 postes chez Bénéteau, 100 chez STX, 100 chez Accenture…, détaille-t-on à la Chambre du commerce et de l’industrie de Nantes-Saint-Nazaire. De gros groupes vers lesquels les postulants se dirigeaient naturellement. Désormais, ils doivent mettre le paquet en communication, et même se vendre davantage que les candidats eux-mêmes. »
Si ces entreprises peuvent mettre les moyens, ce n’est pas le cas pour les PME. A la Capeb, qui regroupe les professionnels du bâtiment, on aide les patrons à aussi devenir un peu DRH. « Plus d’un millier d’embauches pourraient avoir lieu cette année, détaille Armelle Cochevelou, secrétaire générale de la Capeb 44. Mais les professionnels peinent à trouver des apprentis. Du coup, il faut les aider à imaginer des solutions, rédiger les fiches de poste, organiser des petites formations pour des candidats moins qualifiés et souvent moins jeunes, mais qui ont des compétences. »
« On refuse des marchés »
Si la situation pose des problèmes d’organisation, elle met aussi en péril la santé économique de certains. « On commence à refuser des marchés, et c’est inquiétant », assure Hervé Thomas, délégué général de l’UIMM 44. Car dans l’industrie, aussi, le besoin est encore plus fort mais le constat est le même. Avec 2.200 recrutements de soudeurs, chaudronniers ou fraiseurs en projet dans les six prochains mois, c’est même une urgence.
Alors, quel est le problème? « Il y a encore une image négative des métiers, même si le monde de l’industrie a sacrément évolué, analyse Hervé Thomas. On a subi 30 ans de crise et maintenant que ça repart, il n’y a plus personne de formé, c’est un trou générationnel. Il faut aussi que les entreprises arrivent à mieux fidéliser leurs salariés. »
Job dating, recrutement par simulation, petites annonces sur le Bon Coin, chacun essaye comme il le peut de se démarquer. Une situation qui si elle perdure, laisse craindre à certains une concurrence entre les chefs d’entreprise, avec des tensions liées aux salaires. En attendant, chez Martin menuiserie, les commandes continuent de tomber. « Dans l’immédiat, je me refuse à avoir recours à de la main-d’œuvre étrangère, confie le directeur. Mais la tentation est de plus en plus grande… »