FINANCEPourquoi on n'entend plus parler des agences de notation

Pourquoi on n'entend plus parler des agences de notation

FINANCEPourquoi n'entend-on plus parler des agences de notation? Et pourquoi s'abstiennent-elles de noter à nouveau la France? «20Minutes» vous répond...
Céline Boff

Céline Boff

Elles ont rythmé l’actualité pendant plusieurs mois et puis, plus rien. Depuis l’annonce – largement commentée et relayée – de la dégradation de la note de la France par Standard & Poors (S&P) en janvier, les agences de notation semblent avoir disparu de la circulation. Mais pourquoi n’entend-on plus parler d’elles? N’auraient-elles plus rien à dire?

Pour l’économiste et consultant indépendant Norbert Gaillard, la focalisation de l’opinion sur ces agences en 2011 ne relevait pas d’une communication renforcée de leur part, mais bien de l’attention soutenue de la communauté financière et du gouvernement français à leur égard. La première «parce qu’elle savait que la France était le maillon faible des pays notés triple A». Le second «parce qu’il a utilisé pendant plusieurs mois ce triple A comme la preuve de l’efficacité et de la justesse de ses décisions économiques. Le triple A était même présenté comme un trésor national», rappelle l’économiste, auteur de l’ouvrage «Les agences de notation».

Peur d’être accusées d’ingérence politique ?

Le placement de la France sous surveillance négative le 9 décembre par S&P, puis sa dégradation, toujours par S&P, le 13 janvier, a tout changé. «Ces événements ont mis fin à toutes les polémiques et les débats possibles», analyse Norbert Gaillard. Le bastion du triple A était tombé. Les financiers en prenaient acte. Quant au gouvernement, il se lançait à corps perdu dans une vaste entreprise de dédramatisation.

Les agences ont quant à elles continué à s’exprimer. Après Moody’s au mois de janvier, Fitch a à son tour placé la France sous «perspective négative» le 14 février. «Cette révision de la perspective était une façon de lancer un signal aux investisseurs tout en évitant de mettre de l’huile sur le feu en abaissant la note, alors que la pré-campagne présidentielle débutait», estime Norbert Gaillard.

Les agences de notation craignaient-elles d’être accusée d’ingérence politique? Norbert Gaillard ne le pense pas. «S&P comme Moody’s attendent de voir quel sera le gouvernement et surtout, ce qu’il va mettre en place. Elles vont se prononcer, mais seulement lorsqu’elles auront des éléments plus précis sur la politique économique que compte mener la France. Je les vois mal s’avancer, à moins que la situation se dégrade fortement en Europe, et notamment en Espagne.»

Peu d’inquiétudes pour l’avenir

Les agences devraient vraisemblablement s’exprimer entre les mois d’octobre et de décembre, soit après la présentation de la loi de finances, prévue en septembre. Mais qu’adviendrait-il si la France perdait un autre triple A? A priori, pas grand chose. «La perte du triple A S&P a eu très peu de conséquences car les investisseurs avaient largement anticipé cet événement au cours des mois précédents. Il en serait de même si une autre agence dégradait la France.»

Pour l’économiste, la seule jauge à considérer est celle des taux longs français et du spread franco-allemand, comprenez des écarts de taux entre la France et l’Allemagne. «Pour l’instant, les taux français sont à 3%, contre 1.5 à 2.5% pour les pays encore notés triple A. Quant au spread, il est de 1.2 point. S’il passe à 1.5 point parce que le taux de la France progresse à 3.3%, là, ce sera inquiétant», affirme Norbert Gaillard, qui prévient: «Les taux sont vraiment les juges de paix sur les marchés. Il vaut mieux que la France conserve des taux bas qu’un triple A.»