BUDGETEnvironnement: bilan contrasté pour l'éco-fiscalité

Environnement: bilan contrasté pour l'éco-fiscalité

BUDGETLa Cour des comptes a publié mercredi le premier bilan de l'impact budgétaire et fiscal du Grenelle de l'environnement, quatre ans après sa mise en œuvre...
Claire Planchard

Claire Planchard

Gare aux dérapages! Si la Cour des comptes salue la maitrise de l’ambitieux budget triennal du Grenelle de l’environnement (seulement 3,5 milliards d’euros dépensés contre les 4,5 milliards prévus pour 2009-2011), elle pointe du doigt les déséquilibres de son volet fiscal : «alors qu’il devait initialement être équilibré, il a représenté un coût de 2,5 milliards pour l’Etat», note la Cour des comptes dans son référé.

Dépenses excessives, recettes qui se font toujours attendre et mesures qui ratent leurs objectifs: voilà les principaux reproches adressés au gouvernement. «Les dépenses fiscales, efficaces mais très couteuses, ont toutes été mises en œuvre, sans que le gouvernement estime pour autant opportun de diminuer ou de supprimer à fortiori celles dont l’impact environnemental apparait négatif notamment par rapport aux objectifs définis par le Grenelle» diagnostique ainsi la Cour des Comptes. Revue des bons et des mauvais élèves.

Les bons élèves : bâtiment et énergies renouvelables

Dans le bâtiment neuf, la majoration du prêt à taux zéro pour l’acquisition d’un logement BBC (bâtiment à basse consommation) et le renforcement des réglementations thermiques ont eu un réel effet positif sur les performances énergétiques du parc de logements en France : « Un tiers des bâtiments neufs construits en 2011 respectent les normes basse consommation » souligne la Cour des comptes.

Dans les logements anciens, les incitations fiscales (éco-prêt à 0 % pour le financement des travaux de rénovation lourde et crédit d’impôt « développement durable » pour les rénovations légères) ont également démontré leur efficacité : «elles ont déjà permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre théoriques du secteur résidentiel de 7,5 % en deux ans», précise le référé. Mais elles ne devraient toutefois pas être suffisantes pour atteindre l’objectif du Grenelle d’une baisse de 38 % de baisse des consommations d’énergie du parc résidentiel en 2020.

Concernant les énergies renouvelables, la Cour des Comptes estime que l’objectif intermédiaire de 14 % de la production totale d’énergie à l’horizon 2012 devrait être atteint sans difficulté. Les différentes aides fiscales adoptées dans le cadre du Grenelle (comme par exemple, l’exonération d’impôt sur les bénéfices pour les particuliers qui installent des panneaux photovoltaïques) ayant permis un «fort décollage de la production depuis 2007».

Mauvais élèves : transports et agriculture

En revanche, le bilan est plus sévère dans les secteurs des transports ou de l’agriculture où les objectifs fixés en 2007 sont encore très loin d’être atteints, quand les performances ne sont pas simplement en recul.

Bonus-malus automobile : Initialement annoncé comme une mesure «neutre» pour les finances publiques (le montant des bonus versés devant être compensé par celui des malus perçus), le dispositif aura couté au final 1,5 milliard d’euros entre 2008 et 2011, avant d’être progressivement abandonné.

Plus grave encore, son impact sur l’environnement est loin d’être évident : «il a permis une diminution des émissions moyennes de gaz carbonique des véhicules neufs mais des études ont montré qu’il aurait entrainé une augmentation des émissions totales de CO2», prévient la Cour des comptes.

Allègements de taxe sur les carburants: la Cour des comptes tacle l’impact environnemental négatif de plusieurs mesures comme le taux réduit de taxe sur le gazole et sur le fioul domestique et la détaxation du kérosène pour les vols intérieurs. Selon elle, la révision de ces mesures fiscales permettrait de réduire significativement la pollution par particules fines, mais aussi de dégager quelque 19,3 milliards de recettes budgétaires.

Concernant le développement du fret non routier, la Cour des comptes épingle les contradictions de la politique du gouvernement : alors que le Grenelle affichait un objectif de hausse de 25 % d’ici 2012, la part du fret non routier est «en constante diminution depuis 2007».

Pis, de nombreuses mesures adoptées ces dernières années (allègement de la taxe à l’essieu en 2008, retard de la mise en œuvre de l’éco redevance poids lourds et autorisation des poids lourds de 44 tonnes en janvier 2011) viennent paradoxalement augmenter la compétitivité du fret routier par rapport au fret ferroviaire ou maritime.

En matière d’agriculture biologique, la Cour des comptes affirme que l’objectif du Grenelle d’atteindre 6% de la surface agricole utile exploitable en agriculture biologique en 2012 ne sera pas atteint. Sur ce point, ce ne sont pas les dépenses excessives du gouvernement qui sont en cause mais plutôt son inaction: «L’effet de la hausse des crédits européens en matière d’agriculture biologique a été neutralisé par la réduction de l’effort national», analyse la Cour des comptes.