ArgentFaute de toit, les jeunes font (ou refont) leur nid chez leurs parents

Faute de pouvoir s’offrir un toit, les jeunes font (ou refont) leur nid chez leurs parents

ArgentEntre soucis d’argent et crise du logement, près de 5 millions de jeunes adultes vivent, ou retournent vivre, dans leur famille
Les jeunes ont de plus en plus de difficultés à quitter le nid familial, faute d'avoir les moyens de s'offrir un toit.
Les jeunes ont de plus en plus de difficultés à quitter le nid familial, faute d'avoir les moyens de s'offrir un toit. - iStock / City Presse
J.P. pour 20 Minutes

J.P. pour 20 Minutes

Si la cohabitation de plusieurs générations dans un même logement est un mode de vie tout à fait classique dans certains pays, en France, les jeunes quittent traditionnellement le nid familial pour s’émanciper en s’installant dans leur propre domicile. Mais encore faut-il en avoir les moyens et les opportunités, deux éléments qui semblent de plus en plus complexes à réunir à en croire les récentes études sur le sujet…

La face cachée des Tanguy

Le phénomène des « Tanguy » fait en général référence à ces quasi-trentenaires qui refusent de quitter le cocon parental, à l’instar de l’inoubliable (anti) héros du film éponyme d’Étienne Chatiliez sorti en 2001. Mais si cette comédie mettait en lumière un « adulescent » profitant du confort d’une vie facile et sans responsabilités, c’est bien souvent par contrainte financière que de plus en plus d’adultes retardent leur départ.
Dès 2015, la Fondation Abbé Pierre a documenté ce phénomène à travers une étude baptisée « La face cachée des Tanguy ». À partir des données de l’Enquête nationale logement (ENL) réalisée en 2013 par l’Insee, ces travaux estimaient que 4,6 millions de majeurs vivaient chez leurs parents ou grands-parents, dont 1,3 million étaient âgés de plus de 25 ans. Et près d’une décennie plus tard, la situation s’est encore accentuée…
D’après la nouvelle enquête de la Fondation Abbé Pierre publiée au mois de mai et basée sur l’ENL 2020, on compte désormais 4.920.000 adultes cohabitant avec leurs parents. Parmi eux, 1,3 million ont un emploi « ce qui peut refléter des salaires trop bas et des niveaux de loyer trop élevés » selon l’étude. Dans le détail, on constate néanmoins des différences entre les sexes puisqu’à 30 ans, il n’y a plus que 3 % des femmes qui vivent chez leurs parents contre 13 % des hommes.

La galère du logement

Pour l’association, cette hausse massive illustre un marché immobilier devenu inaccessible. Ainsi, « la Fondation Abbé Pierre appelle les pouvoirs publics à mener une véritable politique du logement des jeunes notamment en encadrant davantage les loyers et en revalorisant les APL pour permettre à un plus grand nombre d’accéder à la location », comme l’a déclaré Manuel Domergue, directeur des études.
Confortant les conclusions de ce rapport, un sondage Opinion Way publié fin mai pour le compte de Wellow, une entreprise spécialisée dans la création et la gestion d’appartements en colocation, enfonce le clou. Ainsi, 88 % des moins de 35 ans interrogés considèrent que se loger relève aujourd’hui du parcours du combattant, sachant que 31 % ans ont dû retarder leur passage à une vie autonome. Plus encore, cette enquête d’opinion dénonce les conséquences des prix élevés du marché immobilier. En effet, 20 % des moins de 35 ans déclarent être retournés vivre chez leurs parents en raison de l’augmentation du coût du logement. C’est ce qu’on appelle la « génération boomerang ». Pour ce même motif, 26 % ont été obligés de retarder leurs projets de reconversion professionnelle et 12 % ont dû refuser une formation, tandis que 17 % des 18-24 ans affirment avoir été contraints de renoncer à poursuivre leurs études. Et Thomas Corman, fondateur de Wellow, de conclure : « Le logement est plus que jamais au cœur des préoccupations des Français et la priorité pour améliorer leur pouvoir d’achat serait pour eux de réduire le coût du logement, avant même d’augmenter les salaires qui n’ont pas suivi la hausse des prix. »