Taxe foncière : Attention aux erreurs qui coûtent cher
Argent•Valeur locative obsolète, attribution erronée du cadastre, mauvaise répartition de la surface habitable, transformations non déclarées… peuvent aboutir à une sur ou une sous impositionJulie Polizzi pour 20 Minutes
D’après l’Insee, 57,2 % des ménages étaient propriétaires de leur résidence principale en 2023. Or, ces dernières années, le coût de la taxe foncière n’a cessé de grimper. À l’heure où le moindre euro compte, vous seriez alors bien inspiré de jeter un œil au détail de cette imposition car les erreurs ne sont pas rares. Un rapport parlementaire de 2022 estimait ainsi le montant des dégrèvements accordés (autrement dit des remboursements) par le fisc à près de 1,9 milliard d’euros par an sur les propriétés bâties et non bâties, en général à la suite de réclamations des contribuables… D’après les données officielles, plus de 500.000 avis de taxe foncière font en effet l’objet d’un contentieux chaque année.
Des références obsolètes
« Le premier problème de taille, c’est que cette imposition, comme la taxe d’habitation d’ailleurs, est évaluée à partir de la valeur locative cadastrale établie grâce à des relevés de géomètres effectués en 1980 », nous explique David Dricourt, expert en fiscalité depuis plus de vingt ans et fondateur du cabinet Fiscallia, spécialisé en optimisation fiscale. Les biens immobiliers sont en effet classés en catégories – de 1 pour un bien exceptionnel à 8 s’il est médiocre –, en les comparant à des locaux de référence. Sauf que ces anciens points de repère ne correspondent plus à la réalité.
Deuxième problème majeur : la mauvaise attribution du cadastre. « Il arrive que les lots soient mal attribués au moment de la création ou en cas de changements ultérieurs », précise David Dricourt. Par exemple, il se peut que votre appartement soit associé à deux parkings au lieu d’un ou à une cave alors que vous n’en avez pas… Sans le savoir, vous payez donc la taxe de quelqu’un d’autre…
Enfin, l’administration applique des correctifs d’ensemble sur le calcul, en y ajoutant des coefficients qui prennent en compte la difficulté d’entretien du bien et sa situation géographique. Des critères « éminemment subjectifs » selon le fiscaliste, qui sont là encore établis à la création du bien et non actualisés…
De mauvaises déclarations
Si les bases de l’administration fiscale sont erronées, c’est aussi bien souvent le fait des propriétaires, de façon volontaire ou non. Lors de la déclaration de la surface habitable du bien, il n’est ainsi pas rare de se tromper. Autre cas qui arrive régulièrement d’après l’expert : « Lors d’une extension, les ménages déclarent la surface totale obtenue, sans distinguer l’existant du rajout, ce qui provoque une double imposition sur la partie non transformée. »
Mais il y a également toutes les transformations non déclarées aux impôts ! Or, certains changements peuvent être en votre faveur par rapport aux « équivalents superficiels ». Cette grille convertit en mètres carrés les éléments de confort et d’équipements afin de pondérer la surface totale (eau courante, gaz, électricité, baignoire, douche, lavabo, w.-c., etc.). Si vous avez supprimé une baignoire ou remplacé le chauffage au gaz par de l’électrique, c’est donc quelques mètres carrés en moins à déclarer. De même, si vous avez cassé des cloisons, vous avez tout intérêt à signaler la réduction du nombre de pièces.
Bon à savoir : en cas d’achat dans l’ancien, le fisc peut exiger une nouvelle déclaration H1 (maison) ou H2 (appartement), visant à décrire le bien, afin de mettre à jour le calcul de la taxe foncière. Si le précédent propriétaire n’était pas dans les clous, l’acquéreur peut alors avoir une très mauvaise surprise…
Enjeux financiers
Selon l’expérience de David Dricourt, les anomalies détectées entraînent une sur-imposition des contribuables dans 50 % des cas, sachant que ces erreurs peuvent représenter jusqu’à 20 % de la taxation. En outre, si votre contestation aboutit, vous pourrez demander jusqu’à six années de dégrèvements, c’est-à-dire que les impôts vous rembourseront le montant en cause sur la taxation de l’année en cours, mais aussi sur les cinq précédentes. L’enjeu financier n’est donc pas négligeable…
Mais encore faut-il obtenir gain de cause. Il faut pour cela formuler avec soin votre réclamation en réunissant photos, acte de propriété ou encore relevé topographique par un professionnel pour contester tel ou tel élément de calcul. Le tout devra être envoyé par courrier recommandé à votre centre des impôts foncier et cadastre. Si jamais la démarche patine, faites-vous aider par un fiscaliste.
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