Calendrier, « référendum »… Où en est le projet d’écotaxe en Alsace ?
ça bouchonne•Le projet de l’écotaxe en Alsace, qui connaît quelques retards de calendrier dus à de concertations avec les acteurs de l’économie locale, n’est pas prévu avant début 2026Gilles Varela
L'essentiel
- L’objectif de la taxe poids lourds alsacienne, baptisée R-Pass, est principalement de rééquilibrer les flux de transit Nord Sud entre l’Allemagne et l’Alsace.
- Le projet de l’écotaxe en Alsace, connaît quelques retards de calendrier. Le choix du concessionnaire qui va gérer le dispositif de contrôle sur les autoroutes A35, A36 et une partie de la RN 83 dans le Haut-Rhin, choix qui devait être discuté lors du conseil de la Collectivité européenne d’Alsace au printemps prochain, n’a pas été mis à l’ordre du jour, contrairement à ce qui était prévu.
- Des retards expliqués par la nécessité de concertations supplémentaires avec les acteurs de l’économie locale, qui ne sont pas favorables à cette taxe. Taxe qui ne devrait finalement pas voir le jour avant début 2026
L’écotaxe était annoncée en 2021 comme un des sujets forts de la toute nouvelle Collectivité européenne d’Alsace (CEA). Cette redevance, prévue initialement à l’horizon 2024, ne fait pourtant plus trop parler d’elle. On table déjà maintenant sur début voire mi 2026. Contrairement à ce qui avait été prévu, le choix du concessionnaire du dispositif de contrôle ne sera même pas débattu lors du conseil de la collectivité au printemps prochain. Cette écotaxe attendue sur un territoire qui espère un jour se libérer des nombreux camions qui fuient l’Allemagne et de son impôt routier mis en place depuis 2005 (la Maut) est-elle finalement impossible à mettre en place en Alsace ? 20 Minutes fait le point.
C’est quoi cette écotaxe alsacienne ?
L’objectif de la taxe poids lourds alsacienne, baptisée R-Pass, est principalement de rééquilibrer les flux de transit Nord-Sud entre l’Allemagne et l’Alsace. De « régler le problème » de l’A35, et de l'A36 et d’une partie de la RN83 dans le Haut-Rhin, ces routes et autoroutes qui traversent l’Alsace et longent la frontière avec l’Allemagne, mais aussi de gagner en sécurité et en fluidité. Le trafic se reportant côté français pour échapper à la Maut (taxe qui vient d’ailleurs d’augmenter), l’Alsace attire par la gratuité de la majeure partie de son réseau routier.
Cette écotaxe semble donc nécessaire, d’autant plus que ce transfert de transit n’a pas que des conséquences sur la densité globale du trafic (nombreux bouchons) mais dégrade aussi fortement l’état des routes, augmente les nuisances sonores et reste néfaste pour l’environnement.
Quel est le calendrier ?
Espéré initialement pour 2024, ce changement de calendrier peut encore étonner. Pourtant, fut un moment où tout semblait rouler pour l’écotaxe. Le président de la CEA, Frédéric Bierry, annonçait déjà en 2022 avoir identifié précisément les portiques déjà existants pour effectuer les contrôles et des contrôles via « un système satellitaire, à l’image de ce qui se fait avec le Via Pass en Belgique et son équipement embarqué pour chaque poids lourd », expliquait le président.
Pour ce R-Pass, baptisé avant même d’être né, faut-il encore pouvoir identifier le futur concessionnaire. Contrairement à ce qui était prévu, le choix, malgré l’appel d’offres lancé à l’automne dernier, n’est toujours pas acté. Pire encore, il ne sera pas à l’ordre du jour de la prochaine assemblée de la CEA au printemps prochain.
Frédéric Bierry, qui explique avoir besoin de temps pour collecter toutes les études nécessaires, assure également qu’il serait « prématuré de déjà arbitrer » le choix de l’opérateur lors du prochain conseil. « On se laisse quelques mois, jusqu’à l’été pour finaliser l’étude, puis trouver un consensus avec les acteurs économiques locaux, avec une décision au deuxième semestre 2024. » Viendra alors le temps des dernières autorisations, ce qui prend au moins une année explique l’élu ce qui « nous amène à début 2026 ».
« Un référendum en Alsace », vraiment ?
Les difficultés ne sont pas essentiellement techniques ou légales, même si l’Europe interdit de viser uniquement les poids lourds de transit [ou interdira les systèmes de vignettes en 2026]. La raison principale tient aux discussions, et peut-être aussi à l’intervention en janvier 2023 d’un collectif interprofessionnel pour la compétitivité de l’économie alsacienne. Dénonçant l’impact négatif que le R-Pass aurait sur l’économie locale, le collectif réclame une étude d’impact économique indépendante avant toute prise de décision sur sa mise en œuvre.
« J’ai entendu les inquiétudes économiques dans un contexte de tensions très vives sur la situation agricole, assure à 20 Minutes Frédéric Bierry. Une nouvelle étude a été lancée pour mesurer ce que pourrait générer, pour les entreprises alsaciennes, la mise en œuvre de la taxe. Je regarde quelles exonérations, quelles compensations et quelles solutions seraient possibles. » Soit une étude poussée et actualisée, la recherche d’un consensus, mais aussi, si nécessaire, « un référendum en Alsace », pose le président de la CEA qui conclut : « il faut attendre si cela permet d’atteindre le consensus, l’approbation ou l’abandon. Mais que ce projet soit incarné par les Alsaciens, ça vaut le coup de perdre une année. »
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