Conventions collectives : Au fait, comment ça marche ?
Argent•Les salariés sont, la plupart du temps, couverts par une convention collective qu’ils ne connaissent pas toujoursJulie Polizzi pour 20 Minutes
Si le Code du travail constitue le ciment de la législation encadrant les relations entre employeurs et employés, c’est bien souvent grâce aux conventions collectives que les travailleurs ont obtenu des acquis sociaux importants. Et pourtant, qui met réellement le nez dans ces textes ? Pas grand monde à en croire un sondage CSA réalisé en 2016 pour le service juridique en ligne Juritravail.com. En effet, 52 % des 1.001 employés interrogés à l’époque disaient ne jamais avoir consulté leur convention collective, tandis que 31 % ne savaient même pas de laquelle dépendait leur entreprise. On rappelle le b.a.-ba.
Qu’est-ce qu’une convention collective ?
Une convention collective est issue d’une négociation écrite entre les organisations syndicales et les employeurs. Alors qu’un accord collectif se concentre sur un thème particulier, la convention traite de l’ensemble du droit du travail et vise à adapter les règles générales pour un secteur professionnel donné. Ce texte porte ainsi sur les conditions de travail, les salaires, les congés payés ou encore sur les droits et obligations des employeurs et des salariés.
Au fil des années, chaque convention est amenée à être enrichie d’accords collectifs et d’avenants.
Qui doit respecter la convention ?
La convention collective est, a minima, obligatoire pour les employeurs et organisations syndicales qui l’ont signée et, par répercussion, pour les salariés de ces sociétés, peu importe leur contrat de travail.
Mais le ministère du Travail peut décider de rendre cet accord applicable à l’ensemble du secteur professionnel concerné, que les entreprises soient ou non adhérentes à un syndicat signataire. Il publie dans ce cas un arrêté ministériel d’extension, tandis que la convention est dite étendue.
Alors que l’Insee dénombrait 26,4 millions de salariés en 2021, la Dares, l’institut statistique du ministère du Travail, estimait ainsi que 18,5 millions étaient couverts par une convention collective du privé (hors branches agricoles, secteurs sous statut et particuliers employeurs). Sans compter les accords dans la fonction publique. On l’aura compris, quasiment tous les travailleurs sont concernés !
La convention prime-t-elle sur le Code du travail ?
Dans le cadre de la hiérarchie des normes, le Code du travail est évidemment supérieur aux conventions collectives. Néanmoins, la loi a introduit un « principe de faveur » selon lequel la convention se substitue à la loi dès lors qu’elle est plus favorable aux salariés mais ne déroge pas aux normes d’ordre public. C’est ce qui permet aux conventions collectives d’améliorer les conditions de travail par rapport aux minima légaux, en imposant par exemple des indemnités de licenciement plus élevées ou un nombre d’heures de travail moins important. De plus, certaines dispositions avantageuses n’existent même pas dans le Code du travail, comme l’octroi de primes ou de congés supplémentaires.
La convention peut-elle être moins favorable ?
La loi El Khomri du 8 août 2016, dite loi Travail, a donné un plus grand pouvoir à la négociation collective. Sur certains thèmes, elle distingue désormais les mesures d’ordre public, qui imposent un cadre général, le champ de la négociation et les dispositions supplétives qui s’appliqueront à défaut d’accord.
Pour la rémunération des heures supplémentaires, par exemple, la mesure d’ordre public se contente d’imposer une majoration salariale. Mais c’est à la négociation collective de fixer le taux de cette majoration, avec un seuil minimal de 10 % prévue par la loi. À défaut d’accord, la disposition supplétive prévoit une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires, et de 50 % pour les suivantes. Dans ce cas, la convention collective peut donc être moins avantageuse que la loi.
Un accord d’entreprise peut-il être moins favorable qu’une convention collective ?
Dans la hiérarchie de la négociation collective, la convention l’emporte sur les accords de branche, professionnels ou interprofessionnels, qui sont eux-mêmes supérieurs aux accords d’entreprise ou d’établissement. Mais la loi Travail de 2016 a aussi modifié cette hiérarchie.
Pour tous les thèmes essentiels, l’accord de branche prévaut et interdit toute dérogation sauf si elles offrent des garanties au moins équivalentes ou plus favorables (salaires minima, mutuelle, égalité professionnelle, prévention de la pénibilité, etc.). En dehors de ce pré carré, et si la convention de branche ne l’interdit pas, il est possible de conclure un accord d’entreprise dans un sens défavorable aux salariés.