AVEC UN BLANC SECEn Camargue, à l’ombre des usines, l’huître gagne son titre de noblesse

Camargue : À l’ombre des usines, les huîtres gagnent leur titre de noblesse

AVEC UN BLANC SECVoilà cinq bonnes années que les producteurs de moules de Port-Saint-Louis du Rhône se sont mis aux huîtres, avec succès. L’un d’entre eux à vu sa production primée au concours agricole
Alexandre Vella

Alexandre Vella

L'essentiel

  • Les huîtres du Vivier de Carteau, à Port-Saint-Louis-du-Rhône, en Camargue, ont remporté plusieurs distinctions aux concours agricoles de ces dernières années.
  • Pourtant, leur culture n’a été introduite qu’en 2015.
  • Un succès en partie lié à la topographie des lieux, située à la confluence du Rhône.

«Vous allez tous vous casser la gueule », tonnaient les anciens lorsque Cédric Ketani et la trentaine d’autres conchyliculteurs de Port-Saint-Louis-du-Rhône (Bouches-du-Rhône), en Camargue, se sont lancés dans les huîtres. C’était en 2015, et force est de constater que les anciens n’ont pas toujours raison. Depuis Cédric Ketani empile les distinctions au Salon de l’agriculture. Ses huîtres, « les reines de Camargue » emportent le bronze en 2017, l’or en 2018 et l’argent cette année. « Mon père, qui a monté l’exploitation, n’y croyait pas », sourit aujourd’hui le jeune trentenaire au teint hâlé et en tenue de travail : short, tee-shirt et botte de pêche. S’ils sont arrivés les derniers sur la production d’huîtres en Méditerranée, ils ne sont pas les seuls. De longue date, on en produit dans l’étang de Thau, du côté de Sète, ou à Leucate, dans le Sud-Ouest.

Un succès en partie lié à la topographie des lieux, située à la confluence du Rhône. « Pour bien proliférer les coquillages ont besoin d’une arrivée d’eau douce, riche en nutriments. Ici, il y a le brassage du Rhône et c’est ce qui fait la richesse », explique Cédric Ketani. Plus iodées que celle de l’Atlantique, charnues à souhait du fait de l’apport de nutriments, ses reines de Camargue s’exportent désormais partout en France, mais aussi en Espagne, en Belgique ou en Italie. Des distributions organisées par « le Vivier Carteau », l’entreprise qui joue l’intermédiaire, en achetant la production des autres ostréiculteurs du bassin. Mais ici, il ne s’agit pas seulement d’huîtres, les parcs offrent également la part belle aux moules et subsistent également quelques pêcheurs de palourdes. Ils fournissent restaurants, grandes surfaces, et écaillers.

Usines, pétroliers et porte-conteneurs

Pourtant, à première vue, le site n’a pas l’air idyllique. Sur les côtes voisines se dressent l’imposant complexe industriel de Fos et le port de Marseille. A une poignée de miles nautiques des parcs à huîtres et moules, de gigantesques pétroliers et porte-conteneurs patientent sur leurs ancres avant de charger ou décharger leurs marchandises. Des activités sans conséquences sur la qualité de l’eau, assure l’ostréiculteur « Nous avons une qualité d’eau notée A [sur une échelle de A à C]. Mais du fait de l’activité industrielle nous sommes préventivement rétrogradés en B, ce qui impose un temps en bain de rinçage. Si tu es noté C, ta production ne peut simplement pas être consommée », détaille-t-il.



Le développement de cette production a permis de remettre sur les rails l’activité d’élevage de coquillages à Port-Saint-Louis-du-Rhône. « Sur la centaine de parcs [chaque parc compte 1.500 cordes de culture], douze sont longtemps restés en vente », explique Cédric Ketani qui « travaille » sur huit d’entre eux. « Mais ces dernières années, la tendance s’est inversée. Il y a désormais une liste d’attente pour rentrer. » Et les huîtres de Camargue en ont gagné leur titre de noblesse.