Un aller-retour pour Hanovre avec les «Conti»
SOCIAL•Récit d'un périple entamé mercredi soir et qui se terminera cette nuit. De nos envoyées spéciales en Allemagne...Maud Descamps et Angeline Benoit
C’est un long voyage que les 1.120 « Conti» ont fait pour rejoindre leurs collègues à Hanovre ce jeudi. Leur objectif: se faire entendre des actionnaires réunis en assemblée générale. Récit d’un périple entamé mercredi soir et qui se terminera cette nuit.
Mercredi, 20h: A quelques rues de la gare de Compiègne, on les entend déjà. Les «Conti» s’apprêtent à monter dans le train spécialement affrété par le comité d’entreprise. Appuyés aux fenêtres, les salariés font signe à leurs collègues, familles et élus restés sur le quai. L’ambiance s’annonce festive. Sifflets, hourras et cornemuses fusent. Difficile de se frayer un passage entre les salariés assis à même le sol. Le convoi à peine démarré, bières, rhum et vins commencent à sortir des sacs.
23h: Alors que certains préparent leurs couchettes - il n’y en a pas assez pour tous - d’autres ont décidé de faire une nuit blanche. Jusqu’au petit matin, blagues, tambours, sifflets et cornemuses retentissent.
Jeudi, 9h: Après une nuit mouvementée, le train entre en gare. Les mines défraîchies reprennent des couleurs à la vue du comité d’accueil: des employés des différents sites de Continental, dont une délégation mexicaine, mais aussi des ouvriers de chez Volkswagen ou encore Volvo. Les Français crient «Continental, solidarité!», tandis que les Allemands leur répondent «Tous ensemble, ya, ya!». Une marche de trois kilomètres à travers la ville les attend.
11h: Sur la grande pelouse qui fait face au palais des Congrès où sont réunis les actionnaires, une estrade a été montée et des stands proposent café et sandwichs. Les délégués syndicaux se relaient au micro. «Sarkozy et Merkel jouent au même jeu. Ils donnent des milliards aux banques et aux actionnaires et laissent les salariés sur le carreau», tonne l’un deux. Dans la foule, certains écoutent, d’autres discutent ou jouent avec des pétards. Français, Allemands et Mexicains s’échangent T-shirts et casquettes. «Je ne pensais pas que cela se passerait ainsi, confie un ouvrier sous couvert d’anonymat, de peur de représailles à cause du saccage à Compiègne. Les actionnaires sont passés tranquillement devant nous. En France, on les aurait arrêtés, c’est sûr. On est là comme des cons à dire "tous ensemble" en musique. Cela ne changera rien, il n’y a pas d’action.»
15h: Dans le palais des Congrès, l’ambiance est studieuse. Les actionnaires écoutent les discours du conseil d’administration. Une délégation franco-allemande de Conti obtient l’accès à la salle pour lire un texte. «Non aux licenciements, non à la fermeture du site».
15h30: A la sortie du palais, les délégués font un bref compte-rendu du discours aux actionnaires. Les techniciens commencent à démonter l’estrade. Les «Conti» se remettent en route pour la gare. Dans le tramway qui va vers le centre-ville, Armin, comptable chez Continental à Hanovre explique: «Mon emploi n’est pas en danger mais je suis venu manifester pour soutenir mes camarades. Si un site ferme, cela veut dire que c’est tout le groupe qui est menacé.»
16h30: De retour à la gare, les «Conti» font un vacarme assourdissant. Cornemuse dans une main, pack de bières dans l’autre, ils montent à bord en chantant et en sifflant. Mais les onze heures suivantes seront plus calmes. L’excitation retombe et la fatigue gagne les visages. L’un deux résume: «De toute façon, ils essaieront de nous imposer les indemnités minimum.»