Une décision de justice relance le rachat de Suez par Veolia

Rapprochement Suez-Veolia : Une décision de justice relance le rachat

OPAVeolia n’est pas tenu « à ce stade » de consulter les instances représentatives de son concurrent
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Veolia peut reprendre sa marche en avant vers le rachat de Suez. La justice a reconnu ce mercredi que le groupe n’avait pas à consulter « à ce stade » les instances représentatives de son concurrent. Se prononçant sur le fond, le tribunal de Nanterre a considéré que les comités sociaux et économiques (CSE) de Suez étaient « mal fondés à prétendre que Veolia [était] devenue actionnaire majoritaire par l’effet de cette cession » et n’avaient donc pas à être informés.

Via communiqué, Veolia se réjouit de « recouvrer immédiatement l’ensemble de ses droits », un atout essentiel en vue de la bataille d’actionnaires qui pourrait avoir lieu lors de la prochaine assemblée générale de Suez, au printemps. Veolia compte en effet y appeler à débarquer la direction de Suez et lancer son OPA sur le reste du capital de son concurrent, après en avoir acquis un premier bloc de 29,9 % en octobre.

Une rencontre le 9 février à Bercy

« Les droits de vote de Veolia restent suspendus sur le fondement du droit de la concurrence et Veolia ne peut déposer une offre publique » non amicale « sur les actions Suez », a pour sa part réagi Suez. Dans son communiqué, le groupe assure que ses CSE font appel de la décision. Celle-ci « confirme que Veolia n’a manqué à aucune obligation à l’égard des salariés de Suez », assure pourtant Veolia, désormais déterminé « à mener à son terme la création d’un champion mondial de la transformation écologique ».

« En se basant sur la non-détention de 0,1 % du capital de Suez par Veolia, le tribunal justifie la non-prise en compte de l’avis des salariés dans un projet global d’OPA pourtant clairement affirmé par Veolia », regrette l’intersyndicale de Suez, qui déplore une annonce « surprenante » après plusieurs décisions judiciaires favorables. Reçue à Bercy le 9 février, celle-ci pourra y dénoncer le « démantèlement » qu’elle redoute. « C’est peut-être reculer pour mieux sauter », a résumé Claude Vaillant, l’avocat du comité d’entreprise européen (CEE).

Comme l’avait demandé Veolia, qui avait racheté début octobre un premier bloc d’actions Suez, le tribunal a considéré que la consultation réclamée par les CSE de Suez ne pouvait être qu’à l’initiative de l’actionnaire de contrôle. Ce que la société d’Antoine Frérot n’est pas – encore – avec 29,9 % du capital de Suez acquis auprès d’Engie.

Suspension en novembre

Un jugement du tribunal de Paris, confirmé en appel le 19 novembre, avait suspendu ce rachat, ainsi que l’offre publique d’achat (OPA) que Veolia entendait lancer sur les 70,1 % du capital restants, en estimant qu’une procédure d’information-consultation préalable auprès des salariés devait être menée à bien.

Depuis des mois, Suez se démène en effet pour trouver comment éviter d’être racheté par son concurrent, qui a abattu ses cartes fin août alors qu’un mois plus tôt Engie s’était dit « ouvert » à la cession de ses parts dans Suez. Mi-janvier, Suez a ainsi annoncé avoir obtenu une offre des fonds français Ardian et américain GIP, pour parvenir à une « solution amicale » avec Veolia, qui a immédiatement envoyé une fin de non-recevoir.

Cette offre vise à garantir la pérennité des deux géants français de l’eau et des déchets en proposant une porte de sortie à Veolia, auquel il serait proposé de racheter 18 euros pièce ses titres Suez, c’est-à-dire le même prix que celui payé à Engie. « Le conseil d’administration m’avait demandé de travailler sur des solutions alternatives et de chercher d’autres investisseurs. C’est chose faite, avec ce consortium qui est prêt à accompagner Suez », a défendu le directeur général de Suez, Bertrand Camus. Antoine Frérot a toutefois répété à de nombreuses reprises qu’il refusait de vendre sa participation.

L’Etat prend ses distances

Ce plan B, que Suez a mis plusieurs mois à faire émerger, présente l’avantage « d’assurer la préservation de l’emploi, le maintien d’une concurrence indispensable, notamment en France », selon Bertrand Camus. L’État, passé son soutien initial au projet de rachat par Veolia, a en effet pris ses distances.

Pour répondre aux lois anti-trust, Veolia prévoit en effet de céder Suez Eau France, cœur de son histoire, au fonds Meridiam. Un projet qui inquiète les salariés de Suez et qui est vivement dénoncé par la direction du groupe. « On a trébuché sur un petit caillou, mais on n’a pas été condamnés à être racheté par Veolia. Il y a d’autres procédures en cours », se projette désormais Franck Reinhold von Essen (CGT), le secrétaire du CEE de Suez.