Tourisme : Malgré la crise, certaines régions tirent leur épingle du jeu
VACANCES•Si Paris et quelques plages semblent délaissés, ce n’est pas le cas de certaines régions qui ont su se servir de leurs atoutsRomarik Le Dourneuf
L'essentiel
- Depuis des semaines, les professionnels du tourisme sont dans l’angoisse d’une saison catastrophique pour la France. Pourtant certaines régions semblent tirer leur épingle du jeu.
- Les Français, en recherche de grands espaces, de culture et d’activités sollicitent particulièrement les régions intérieures de l’Hexagone.
- Si la Bretagne rencontre le succès grâce à son mélange de campagne et de littoral, d’autres départements ne sont pas en reste comme l’Ardèche, l’Aveyron, la Lozère, le Jura ou encore le Loiret.
«Le canoë en Ardèche, c’était l’embouteillage ! », « Tout le monde va en Bretagne cet été ! » Difficile de ne pas avoir entendu ces phrases à la machine à café ou en terrasse. Si les professionnels du tourisme prévoyaient l’apocalypse pour cet été, certaines régions semblent s’en sortir sans trop de dégâts et même faire mieux que les années précédentes. Dans la crise actuelle, elles ont réussi à séduire les touristes, Français comme étrangers.
Le tourisme se porte mal, mais pas pour tout le monde
« Le tourisme va mal, certes, c’est la conjoncture. Mais l’ensemble des territoires ruraux est en train de faire une superbe saison. » Irrité par les annonces mortifères lues ici et là au sujet du monde du tourisme, Lesly Reynaud, directeur de l’office du tourisme de Provence occitane, s’est fendu d’un commentaire « coup de gueule » sur le réseau LinkedIn : « J’en avais assez de lire cela alors que l’été se passe très bien chez nous. » Et son observation ne se limite pas à la Provence occitane, selon Lesly Reynaud, les Français ont répondu à l’appel du secteur touristique : « Les chambres d’hôtes et gîtes cartonnent, certains campings qui avaient peur avant la saison, sont complets, et les activités font le plein. »
Christophe Marchais, directeur général adjoint d’ADN Tourisme, la fédération nationale des offices du tourisme, dresse le même constat : « Il est trop tôt pour faire le bilan, mais beaucoup de régions rencontrent le succès. » Les Français ont cherché de grands espaces, des zones moins densément peuplées, et surtout un tourisme « vert ». Après des semaines de confinement, les activités de pleine nature sont parmi les plus recherchées. Résultat, la Corrèze, l’Aveyron, la Lozère ou la Dordogne ont une activité touristique très forte depuis le début de l’été. « Et pour certaines, plus importante qu’à l’habitude », souligne Christophe Marchais. La moyenne montagne s’en sort également très bien, le Jura et les Vosges ont su attirer les touristes avec les randonnées pédestres et cyclistes ou les baignades en pleine nature.
Les départements étapes deviennent des destinations
L’envie de campagne s’est accompagnée d’une volonté de se reconnecter aux territoires selon ces professionnels du tourisme. « Les Français ont voulu redécouvrir leur pays, cela explique le franc succès des petits sites touristiques, les châteaux et autres lieux de culture, comme ceux du Loiret. Un département qui “marche” très bien cet été », raconte Didier Arino, directeur général adjoint de Protourisme. Axel de Beaumont, directeur d’Orléans Val-de-Loire tourisme abonde : « La fréquentation de l’office du tourisme a doublé par rapport à l’année dernière et nous avons vendu plus 140 % de City pass, qui permettent de visiter tous les lieux de la région. » Axel de Beaumont illustre cet engouement pour les territoires français, d’étape entre Paris et le sud de la France, son département est devenu une vraie destination : « On le voit, les temps d’arrêt sur place augmentent. » Comme d’autres régions, le Loiret regroupe ce que les vacanciers recherchent, un peu de balnéaire avec la Loire, un peu de rural avec la campagne, et un peu de patrimoine avec les châteaux et cryptes.
Pour Lesly Reynaud, le choix des Français cette année n’est pas une exception due seulement à la conjoncture : « C’est une tendance qu’on observe depuis plusieurs années. La crise actuelle n’a fait que l’exacerber. »
Selon Didier Arino, un autre critère fait pencher les Français vers ces régions à l’intérieur des terres : le type d’hébergement. Les Français ont privilégié les locations individuelles comme les maisons, plutôt que l’hôtellerie, plus présente dans les villes et stations balnéaires.
Pour le directeur général de Protourisme, une région en particulier sort du lot, la Bretagne : « Sur le mois de juillet, les chiffres sont excellents, en août, c’est également très bon. La région est un mélange de campagne pour son centre et de littoral avec de très grandes plages, où on est moins serrés. » Il cite également le bassin d’Arcachon et le littoral landais qui disposent de ces mêmes caractéristiques.
Les étrangers n’ont pas boudé la France
Si les Français ont choisi de rester dans l’Hexagone, les étrangers aussi participent au succès de ces régions. En Ardèche, par exemple, difficile de ne pas voir les plaques d’immatriculation néerlandaises et allemandes. Christophe Marchais s’en félicite : « Nos voisins des pays limitrophes sont venus en nombre, en dépit du contexte, et ils sont très friands des vacances de pleine nature. » Déjà présents depuis de nombreuses années, les Belges (première clientèle étrangère de tourisme en France), les Néerlandais et les Allemands sont présents cet été. Et si l’absence des Nord-Américains et des Chinois se fait ressentir, notamment par la durée de leur séjour et leur pouvoir d’achat, on ne peut pas dire que les touristes étrangers aient boudé la France.
Restent les villes et surtout Paris qui souffrent principalement de l’absence totale du tourisme événementiel et d’affaire qui ne semble pas près de repartir. En attendant, les professionnels du tourisme espèrent que l’arrière-saison sera aussi belle que les mois de juillet et août, une belle compensation après des mois très difficiles.