Prise de décision, « conseil syndical », amendes… Ce qui va changer dans les copropriétés en 2020
LOGEMENT•Ce texte vise notamment à encourager la réalisation de travaux20 Minutes avec AFP
Une réforme mais pas une « révolution ». Le gouvernement s’attaque au fonctionnement complexe des copropriétés, visant à y faciliter les travaux sans trop forcer la main aux propriétaires. Ces nouvelles règles concernent des millions de Français : les copropriétés représentent plus d’un quart des logements français, selon les derniers chiffres en date de l’Insee.
Ce texte « doit permettre aux copropriétés d’être mieux entretenues et de répondre aux enjeux de rénovation énergétique », a résumé ce mercredi le gouvernement à l’issue de sa présentation en Conseil des ministres. Mais elle ne va pas « remettre en cause les grands équilibres », a-t-il aussi promis. Le texte, qui doit entrer en vigueur à la mi-2020, était attendu depuis longtemps : le régime des copropriétés n’a pas été réformé en tant que tel depuis plus de cinquante ans même s’il a, de fait, déjà changé au gré d’autres évolutions législatives.
Un plan de travaux obligatoire sur 10 ans
Reste qu'« on n’a pas une révolution en route », a résumé auprès de l’AFP Gwénaëlle Lejeune, juriste auprès de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir. Le gouvernement, qui a pris son temps, a certes de quoi être prudent face à un univers aux règles complexes : dans un immeuble en copropriété, les décisions représentent pour la plupart des enjeux financiers pour les propriétaires.
Ces derniers se prononcent en assemblée générale, avec des règles de majorité qui changent selon la nature des choix à faire. Les propriétaires sont ensuite représentés par un syndic, qui administre les parties communes et gère les travaux. Dans les immeubles français en copropriété, ces rôles sont très largement assumés par un professionnel rémunéré.
Avec le nouveau texte, le gouvernement veut encourager les propriétaires à faire des travaux : les copropriétés se voient désormais contraintes de mettre en œuvre un plan de travaux sur dix ans, à partir du moment où leur immeuble a plus de 15 ans. La nouvelle mesure, qui impose aussi d’y dédier une enveloppe annuelle, peut coûter cher aux copropriétés récalcitrantes : faute de plan, ou si celui-ci est jugé insuffisant par les autorités, elles peuvent imposer le leur aux frais des copropriétaires.
Chez les syndics, on approuve
La disposition est d’autant plus symbolique qu’elle intervient un an après l’écroulement meurtrier de plusieurs immeubles marseillais dont l’un en copropriété privée. Elle est aussi caractéristique de la politique défendue par l’actuel ministre du Logement, Julien Denormandie, qui met régulièrement l’accent sur la rénovation des logements. Pour autant, « je suis un peu déçu : d’une façon globale, il n’y a pas d’avancée très significative », a minimisé auprès de l’AFP Frédéric Verdavaine, qui dirige les syndics chez le géant Nexity.
Il remarque que le plan aura beau prévoir des travaux, ils devront de toute façon être approuvés par la suite, qui plus est à une majorité de tous les copropriétaires et non des seuls présents au vote. « On a perdu l’opportunité de simplifier la gouvernance des copropriétés : ça n’est pas fait du tout », a regretté Frédéric Verdavaine. L’ensemble de la réforme apparaît, à ce titre, soucieux de ménager les équilibres. Elle a d’ailleurs suscité l’approbation des deux principales organisations de syndics : la Fnaim, qui salue son « pragmatisme » et l’Unis qui la juge « satisfaisante ».
Pas de grand gagnant
Il en va ainsi des relations, parfois tumultueuses, entre copropriétaires et syndics. D’un côté, les professionnels sont maintenant menacés d’une amende de plusieurs milliers d’euros s’ils ne respectent pas un modèle unique de contrat, une mesure a priori favorable aux clients qui peuvent mieux comparer les offres. De l’autre, les syndics auront droit, comme ils le revendiquent depuis des années, de proposer des prestations annexes en marge de ces contrats.
En fin de compte, difficile de dégager un grand gagnant de cette réforme, à l’instar de l’une de ses mesures phare : la possibilité pour l’ensemble des copropriétaires de déléguer certaines décisions au seul « conseil syndical », une sorte de comité de direction réduit à quelques propriétaires. « D’un côté, accroître son rôle, ça facilite la gestion de la copropriété ; de l’autre, c’est se départir d’une part du contrôle que l’on peut effectuer en AG », conclut Gwénaëlle Lejeune. « Il y a des bons et des mauvais côtés. »