Warren Buffett veut sortir le monde de la crise financière
ECONOMIE – Le milliardaire américain propose de se porter garant, à hauteur de 800 milliards de dollars, dans la crise des subprimes…Sandrine Cochard
Le milliardaire américain Warren Buffett propose de se porter garant, à hauteur de 800 milliards de dollars (plus de 548 milliards d’euros), dans la crise des subprimes. Explications.
Qui est Warren Buffett?
Célèbre investisseur américain, il détient la deuxième fortune américaine: 52 milliards de dollars soit plus de 35 milliards d’euros, juste derrière Bill Gates. Sa réputation de «M. Propre» et son franc-parler font de ce septuagénaire un homme respecté et écouté dans le monde des affaires. Il est à la tête d’un empire disparate, dominé par la réassurance (General Re, Swiss Re). Fils d’un parlementaire démocrate, celui que l’on surnomme le Sage d’Omaha est resté fidèle au parti de son père et ne cache pas son soutien à Hillary Clinton et Barack Obama.
Il n’hésite pas à monter au créneau pour dénoncer les travers du monde des affaires, pointant la taxation des riches aux Etats-Unis, insuffisante selon lui, ou encore les rémunérations à plusieurs zéros de patrons aux compétences douteuses. Warren Buffett jouit aussi d’une image d’homme providentiel. Il est appelé à la rescousse, en août 1991, par la société Salomon Brothers, menacée par un scandale financier. Il s’inscrit aussi dans la droite ligne philanthropique de Bill Gates en léguant une partie de ses richesses à des associations, dont celle de Gates.
Quel est son plan?
Berkshire Hathaway, le fonds d'investissement de Buffet, propose aux trois principaux rehausseurs de crédit américains de reprendre, pour 800 milliards de dollars, leurs avoirs en portefeuille. Ces rehausseurs sont aussi appelés «assureurs monolignes»: ces compagnies se portent garants de la qualité des titres des banques qui achètent leurs services, ce qui leur permet d'emprunter au meilleur taux. Elles sont donc par nature essentielles à la stabilité des marchés. «A l’origine, ces sociétés garantissaient les crédits contractés par les collectivités locales américaines, qui pouvaient ainsi emprunter à moindre prix. Un peu comme un locataire désargenté obtient d’un garant un soutien financier pour avoir la confiance de son propriétaire.
Les investisseurs, eux, ont confiance dans les monolignes car leur solidité financière, mesurée par les agences de notation, est considérée comme la meilleure possible : ils obtiennent tous la meilleure note (AAA), dont ils font bénéficier les emprunteurs qui recourent à leurs services», explique «Libération».
L’aide de Buffett s’adresse aux obligations émises par les collectivités («municipal bonds»). Ces titres de créance sont contractés par des organismes d’Etat (villes, comté, Etat ou autre) pour lever des fonds servant au financement de biens publics (écoles, routes, hôpitaux…). Avec deux atouts: la société qui prête de l’argent aux organismes d’Etat a la garantie de retrouver son argent à une date fixée avec l’emprunteur. En échange, l'organisme d'État promet de payer un certain montant d'intérêt, généralement semestriel. L’intérêt perçu est généralement exonéré de l'impôt américain fédéral et peut aussi être exempté des impôts locaux. D’où la réputation des «municipal bonds» d’être les obligations les plus sûres.
Buffet est-il un bon samaritain?
En se portant garant à hauteur de 800 milliards de dollars, Warren Buffett pourrait éviter aux banques et aux sociétés financières de vendre à prix cassés des milliards d’obligations dévaluées par la crise des subprimes. Et redonner confiance et visibilité à un marché échaudé. Mais le bon samaritain n’a pas que des ambitions altruistes et assume son intérêt financier dans cette affaire: un succès lui garantirait la place de leader sur le marché de l’assurance financière.
Comment a été accueilli son plan?
Et l’annonce de Warren Buffett sur CNBC a aussitôt dopé les marchés mondiaux. La Bourse de Paris a terminé en très forte hausse mardi, le CAC 40 gagnant 3,37% après trois séances consécutives de baisse. Londres a gagné 3,54%, Francfort 3,33% et l'Eurostoxx 50 3,30%. Wall Street était également en progression à la mi-séance. Buffett a toutefois indiqué qu'un rehausseur avait déjà refusé la proposition, adressée mercredi dernier et valable durant 30 jours, les deux autres n'ayant pas répondu, sans plus de précision.
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