La réforme des retraites, l'autre dossier épineux du quinquennat Macron
PENSIONS•Les dernières prévisions ne sont pas très optimistes sur l’équilibre du système…Nicolas Raffin
L'essentiel
- Emmanuel Macron veut une réforme en profondeur du système de retraite
- Le Conseil d'orientation des retraites prévoit que l'équilibre ne sera pas atteint au mieux avant 2040
- Les réponses à apporter divergent selon les économistes
Emmanuel Macron s’est-il montré trop optimiste ? Dans son programme présidentiel, on trouve les affirmations suivantes : « Le problème des retraites n’est plus un problème financier (…) L’enjeu aujourd’hui n’est donc pas de repousser l’âge ou d’augmenter la durée de cotisation. » Cette affirmation se basait sur les projections 2016 du Conseil d’orientation des retraites (COR), prévoyant un retour à l’équilibre du système au milieu des années 2020.
Le nouveau président comptait donc sur cette amélioration rapide des finances pour mener sereinement sa réforme de fond,avec l’instauration d’une retraite « universelle », calquée en partie sur le modèle suédois ( expliquée en détail ici). Mais c’était sans compter sur les nouvelles prévisions du COR, dévoilées ce mardi : désormais, l’équilibre financier du système des retraites n’est pas envisagé avant… 2040, au mieux.
Repousser l’âge de départ ?
L’argument d’Emmanuel Macron se trouve donc fragilisé. Déjà, plusieurs voix s’appuient sur les projections actualisées du COR pour demander un report de l’âge légal de départ à la retraite. C’est le cas notamment de la fondation Concorde, think-tank libéral, qui s’est fendu d’un tweet pour appuyer son propos :
« Dans l’immédiat, passer de 62 à 65 ans c’est la seule solution viable. C’est une réforme nécessaire, même si elle est douloureuse et impopulaire », affirme Erwann Tison, chargé d’études à la fondation. Pour Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE, la solution est loin d’être aussi simple : « Le passage à 65 ans est un faux argument. Les réformes précédentes ont déjà décalé l’âge de départ effectif » rappelle-t-il.
L’emploi, la priorité ?
De fait, selon la Caisse nationale d’assurance-vieillesse, « en excluant les retraites anticipées, l’âge moyen [de départ à la retraite] est de 63,2 ans ». Et il pourrait encore reculer, car les nouveaux travailleurs commencent leur carrière de plus en plus tard : désormais, un salarié qui commencerait à travailler à 23 ans ne touchera sa retraite à taux plein qu’à 66 ans.
Selon Henri Sterdyniak, « le problème principal, c’est le taux de chômage. Il faudrait créer plusieurs millions d’emplois. L’essentiel, c’est d’avoir une politique qui redonne de la croissance. Or, c’est ce que veut faire Emmanuel Macron. Donc si j’étais lui, je ne me préoccuperai pas des projections du COR ».
Un calendrier déjà établi
Du côté du gouvernement, le rapport présenté ce mardi a néanmoins fait réagir. « L'objectif, c'est de garantir un système des retraites équilibré (...) L'impératif, c'est d'équilibrer le financement des retraites » a asséné le Premier ministre Edouard Philippe sur BFMTV, tout en rappelant que la variable principale était « l'emploi et la croissance ».
Le chef du gouvernement a par la suite assuré qu'une série de rencontres auraient lieu à partir de la rentrée 2017 sur ce thème avec les organisations syndicales et patronales. Signe que le dossier est sensible : selon l'Opinion, Emmanuel Macron aurait choisi Jean Pisani-Ferry, l'économiste qui avait élaboré son programme, pour « une mission sur la réforme des retraites ».
En attendant, le comité de suivi des retraites (instance différente du COR) pourrait aussi donner ses recommandations au gouvernement sur ce thème d'ici le 15 juillet. Un privilège dont il n'a cependant jamais usé depuis sa création en 2014...