FISCALITEUn an après les révélations des «Panama Papers», où en est le scandale?

VIDEO. «Panama Papers»: Un an après les révélations, où a mené le scandale?

FISCALITEIl y a un an, le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) mettait en lumière le scandale des « Panama Papers », un vaste système d’évasion fiscale…
Le siège du cabinet Mossack Fonseca  à Panama City, le 7 avril 2016.
Le siège du cabinet Mossack Fonseca à Panama City, le 7 avril 2016. - Arnulfo Franco/AP/SIPA
Claire Planchard

C.P. avec AFP

Un scandale mondial retentissant… mais pour quel résultat ? Il y a tout juste un an, la fuite de 11,5 millions de documents issus d’un bureau d’avocats panaméen, Mossack Fonseca, a révélé l’existence d’un vaste système d’évasion fiscale impliquant de hauts responsables politiques et sportifs ou des milliardaires à travers la planète via des sociétés offshore… Ces données avaient été confiées au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung et au Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), avant que les premiers articles ne paraissent le 3 avril 2016. Un an après, l’onde de choc des révélations liées au Panama Papers continue.

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Quel a été leur impact ?

Peu après la déflagration, le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson démissionne. Il avait détenu des avoirs aux îles Vierges britanniques, sans les déclarer.

Parmi les autres personnalités citées, figurent l’ancien Premier ministre britannique David Cameron, le footballeur argentin Lionel Messi, le président argentin Mauricio Macri, le réalisateur espagnol Pedro Almodovar et la star de cinéma de Hong Kong Jackie Chan… mais aussi plus de 140 hommes politiques et responsables publics.

Au moins 150 enquêtes ont été lancées dans 79 pays pour évasion fiscale ou blanchiment d’argent supposés, selon le Centre pour l’intégrité publique, organisation journalistique à but non lucratif basée à Washington, qui hébergeait jusqu’en février l’ICIJ.

La France a mis le Panama sur la liste des paradis fiscaux, à la grande colère du pays d’Amérique centrale, et exige qu’il satisfasse à une série de critères afin de l’en retirer. Le gouvernement panaméen a pris depuis diverses mesures pour lutter contre la fraude fiscale et le blanchiment de capitaux.

Qu’est devenu le cabinet « Mossack Fonseca » ?

Le cabinet « Mossack Fonseca » vit des jours difficiles. Au Panama, l’immeuble aux vitres teintées abrite toujours le cabinet d’avocats panaméens à l’origine du scandale des Panama Papers mais le panneau indiquant son nom a été retiré. Avant que l’affaire n’éclate, quelque 600 personnes travaillaient dans le monde pour cette entreprise crée il y a 40 ans. A présent, ils sont un peu moins de 200. Les clients aussi ont fui. Le cabinet est également privé de ses deux fondateurs Jürgen Mossack et Ramon Fonseca Mora qui ont été placés en détention provisoire mais pour une autre affaire, dans le cadre du scandale de corruption d’Odebrecht, le groupe de BTP brésilien.

En mars, le ministère public panaméen a annoncé la reprise de son enquête sur les Panama Papers, après une suspension de deux mois pour raisons techniques.

Le scandale est-il terminé ?

Ce n’est pas sûr. Certains hommes politiques ont un nuage panaméen au-dessus de la tête, tandis que d’autres apparus dans le dossier, tels que le président Macri et le Premier ministre australien Malcolm Turnbull ont été blanchis.

La Cour suprême du Pakistan doit se prononcer mi-avril sur les révélations concernant des biens détenus à l’étranger par les enfants du Premier ministre Nawaz Sharif via des holdings offshore.

La lutte contre l’évasion fiscale a-t-elle progressé depuis le scandale ?

Les révélations des « Panama Papers » ont « permis de donner un coup de collier » à la lutte contre l’évasion fiscale, a assuré à l’AFP Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE. « L’échange automatique d’information, qui est la vraie fin du secret bancaire, ne fait maintenant plus d’objection de la part de personne", explique-t-il.

Sous la pression de la communauté internationale,le Panama a accepté « les engagements que nous lui demandions auparavant et qu’il refusait obstinément de prendre », a-t-il souligné. « Le Panama a changé sa législation et signé la Convention multilatérale contre la fraude fiscale. Il a désormais l’obligation légale de répondre à la demande d’informations de 108 autres pays », a-t-il expliqué, soulignant que le pays s’est aussi engagé à « pratiquer l’échange automatique d’information ».

Le traitement infligé à la place financière latino-américaine a eu des répercussions auprès des autres pays qui ne s’étaient pas encore complètement engagés à échanger les informations, à l’image du Liban, de Bahreïn, de Hong-Kong et même des Bahamas.

D’autant que le G20, à l’automne dernier, avait annoncé l’établissement d’une liste noire des paradis fiscaux pour cette année. Une menace qui a invité les plus récalcitrants à accepter cette convention multilatérale présentée par l’OCDE comme l’instrument « le plus puissant » dans la lutte contre la fraude.

Quels sont les principaux obstacles ?

Du côté des ONG, ces avancées sont saluées. « Mais il y a encore beaucoup de pain sur la planche », a expliqué à l’AFP Manon Aubry, porte-parole de d’Oxfam, pour qui les « Panama Papers » ne sont que « la partie visible de l’iceberg » car ce sont les documents d’un seul cabinet d’avocats. Elle en veut pour preuve l’étude publiée lundi par son ONG, qui dénonçait les bénéfices réalisés par les vingt plus grandes banques européennes dans des pays comme le Luxembourg ou l’Irlande.

En effet, si les « Panama Papers » ont attiré l’attention sur le Panama, les suites du scandale ont mis en lumière les Iles Vierges Britanniques, où nombre de structures offshore gérées par Mossack Fonseca étaient situées, et d’autres paradis fiscaux particulièrement secrets.

Les Etats américains du Nevada, du Wyoming et du Dakota du Sud en font partie. Les ONG anticorruption rappellent que les Etats-Unis n’ont toujours pas signé la convention multilatérale contre la fraude fiscale élaborée par l’OCDE, qui impose de transmettre des informations fiscales à tout pays signataire en faisant la demande.

En parallèle, les Etats-Unis sous la présidence Trump et la Grande-Bretagne, qui vogue vers le Brexit, examinent des mesures fiscales qui pourraient renforcer leurs pratiques et celles de leurs territoires, dont les Iles Vierges des Etats-Unis, les Iles Vierges Britanniques et les Iles Cayman.