Férié ou travaillé? Tout comprendre au casse-tête du lundi de Pentecôte
FÉRIÉ•Un temps associé à la journée nationale au bénéfice des personnes âgées et handicapées, le lundi de Pentecôte a aujourd'hui (presque) tout d’un jour férié comme un autre…William Pereira
Le lundi de Pentecôte est devenu, depuis 2004, un jour férié pas comme les autres. Journée travaillée, journée chômée, journée de solidarité ? Nombreux sont ceux qui ont du mal à savoir où donner de la tête. 20 Minutes revient sur ce casse-tête administratif qui a évolué à plusieurs reprises au cours des douze dernières années.
La canicule de 2003, élément déclencheur
En 2003, une vague de chaleur s’abat sur l’Europe et cause le décès de 15.000 personnes – principalement âgées - en France. En réaction, les autorités de l’époque décident d’instaurer une « journée nationale au bénéfice des personnes âgées et handicapées ». Le lundi de Pentecôte devient alors, conformément à la loi, un férié non chômé qui doit servir à financer des « actions en faveur de l’autonomie des personnes âgées ou handicapées », peut-on lire sur le site officiel du ministère du Travail.
Depuis 2008, la journée de solidarité peut être placée n’importe quand dans l’année
Largement contestée, la journée de solidarité du lundi de Pentecôte a fait l’objet de nombreuses grèves, en particulier lors de sa première année d’application, en 2005. Devant son impopularité, les autorités en place à l’époque décident de mettre un terme à cette journée sous sa forme initiale. Ainsi, la journée de solidarité peut être placée n’importe quand dans l’année, et est fixée par accords d’entreprises, d’établissements, ou de branches. Enfin, depuis 2008, le lundi de Pentecôte a récupéré son caractère chômé. Voilà donc huit ans que lundi de Pentecôte et journée de solidarité n’ont officiellement rien à voir l’un avec l’autre.
Comment les entreprises gèrent-elles le lundi de Pentecôte ?
Face aux changements et aux subtilités administratives englobant cette journée de solidarité, les grandes entreprises, mieux structurées et conseillées, gèrent bien mieux cette période de l’année que les PME. Le témoignage d’une agence Randstad à Bordeaux résume bien la situation : « Le discours paraît légèrement plus clair dans les grands groupes, qui sont structurés au niveau des Ressources Humaines, qui ont le temps et les moyens de communiquer sur le sujet et d’expliquer, si besoin, la finalité de la démarche [relative à la journée de solidarité]. Certaines PME gardent à l’esprit qu’on ne travaille pas le lundi de Pentecôte et font poser un jour de RTT ou de congés payés tout simplement », peut-on lire dans le communiqué diffusé ce vendredi par le groupe spécialisé dans les Ressources Humaines. Notons tout de même qu’avec 70 % de chômeurs prévus, le lundi de Pentecôte semble être redevenu un jour férié classique.
Quelles sommes sont générées par cet effort collectif et comment sont-elles réinvesties ?
Concrètement, l’employeur verse périodiquement 0,30 % de la masse salariale brute à titre de cotisation. Les montants sont ensuite reversés à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) par le biais des Urssaf. La cotisation est donc exclusivement patronale, la valeur ajoutée générée par la journée de travail non rémunérée des salariés constituant une contrepartie « versée » à leur employeur.
La CNSA estime que, depuis 2004, la journée de solidarité lui a rapporté 24 milliards d’euros. Les estimations prévoient un gain de 2,29 milliards d’euros en 2016, soit moins qu’en 2014 (2,43 milliards d’euros) mais plus que l’année dernière (2,24 milliards d’euros). Ces sommes permettent à la CNSA de financer des aides individuelles à la personne, mais aussi le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées ou encore, plus simplement, des actions de prévention auprès des personnes âgées et/ou handicapées.
Pour Joseph Thouvenel, vice-président de la CFTC, c’est principalement là que le bât blesse. « Est-il juste qu’un employé de supermarché puisse être obligé de travailler gratuitement un jour férié, alors qu’un agent de la SNCF est censé travailler 1 mn 52 de plus par jour pour s’acquitter de la journée dite de solidarité ? », s’interroge-t-il, avant d’ajouter qu’il est également « injuste que les professions libérales ne participent pas aussi à l’effort. Les politiques ont fait une loi mal bâtie. » En tout cas pas des plus simples à comprendre.