Grèce: En quoi consiste exactement l'accord trouvé?
NEGOCIATIONS•«20 Minutes» revient sur les efforts demandés à Athènes, mais aussi sur les concessions obtenues par Alexis Tsipras pour décrocher 85 milliards d'euros d'aide sur trois ans...Céline Boff
Ça y est ! Après plus de deux semaines de négociations, Athènes et ses créanciers – le Fonds monétaire international (FMI) et l’Union européenne (UE) – sont parvenus à un accord « technique ». La Grèce est donc à deux doigts d’accéder à un nouveau plan d’aide, le troisième depuis 2010. Doté d’environ 85 milliards d’euros, ce programme devrait lui permettre de régler ses arriérés et de rembourser ses précédents emprunts pendant les trois prochaines années. Mais quelles concessions a faites Alexis Tsipras pour décrocher ce plan ? Et dans quels domaines a-t-il réussi à faire plier ses créanciers ? 20 Minutes fait le point, alors que le texte a été déposé au parlement grec dans la nuit de mardi à mercredi pour un vote attendu jeudi.
Les concessions que la Grèce a obtenues
Tsipras peut se réjouir : il a réussi à faire plier ses créanciers sur plusieurs points. A commencer par le budget. Son pays n’a plus à réaliser un excédent primaire, comprenez un budget positif hors remboursement de la dette, de +1 % du PIB cette année. Les créanciers vont même accepter un déficit primaire, donc une perte, de -0,25 %. Ils ont également revu à la baisse leurs attentes pour 2016, 2017 et 2018, en demandant des excédents de respectivement +0,5 %, +1,75 % et +3,5 %, contre +2 %, +3 % et +3,5 % précédemment. Grâce à ces révisions, le gouvernement n’aura pas besoin de faire voter dans les deux ans qui viennent de nouvelles mesures d’austérité, comme une nouvelle hausse de la TVA ou une énième baisse des pensions de retraite.
Autre point positif pour Tsipras : il a réussi à obtenir un financement immédiat (dès validation définitive de l’accord) de 10 milliards d’euros pour les banques grecques, ainsi que leur recapitalisation d’ici à la fin de l’année 2015. En outre, les épargnants seront épargnés : leurs dépôts ne seront pas ponctionnés, comme ce fut le cas à Chypre en 2013. Et si le gouvernement va devoir réformer le marché du travail, les évolutions devront être effectuées « en collaboration avec l’Organisation internationale du travail » (OIT) et selon les standards en vigueur « en Europe de l’Ouest ».
Gros bémol cependant : Alexis Tsipras n’a rien obtenu concernant un rééchelonnement ou une annulation partielle de la dette.
Les efforts que la Grèce devra fournir
Si les créanciers ont donc lâché du lest, ils demandent tout de même à la Grèce de mettre en œuvre plus d’une trentaine de réformes. Certaines de ces mesures, comme l’ouverture à la concurrence de certaines professions réglementées (ingénieurs, notaires, etc.) ou encore la rénovation du système de collecte de l’impôt, vont dans le sens du programme défendu par Syriza. Mais c’est loin d’être le cas de la majorité des mesures recensées par le journal grec Kathimerini.
Ainsi, pour recevoir une première tranche d’aide de 25 milliards d’euros, Alexis Tsipras va devoir notamment mettre progressivement fin à la retraite anticipée, supprimer la TVA réduite dans les îles d’ici à la fin 2016, augmenter la taxe acquittée par les transporteurs, abolir les privilèges des producteurs ruraux d’huile ou encore libéraliser le marché de l’énergie, et notamment ouvrir totalement le marché du gaz naturel en 2018. Mais surtout, et ce sera sans doute l’une des mesures les plus difficiles à appliquer, le Premier ministre doit retravailler le système de protection sociale dans le but d’économiser, chaque année, l’équivalent de 0,5 % du PIB.
Ce qui reste en suspens
Certains « détails », comme les qualifient les autorités grecques mais aussi les membres de la Commission européenne, restent à négocier. Et pas forcément les moindres : la question des créances douteuses, qui pèsent sur le bilan des banques, va être étudiée « par une équipe de négociation avec les créanciers », preuve que ce sujet épineux n’est pas encore réglé. Autre sujet en suspens : le fonds de privatisation. Les deux parties ne sont toujours pas parvenues à s’entendre sur les modalités de sa mise en place.
Et puis, si la Grèce et ses créanciers sont parvenus à un accord « technique de principe », il n’y a pas encore d’accord politique. Pour que l’accord soit définitif, il faut encore que les députés grecs, puis les ministres des Finances de la zone euro, et enfin les députés allemands, le valident à leur tour.
Grèce : La course contre la montre continue pour sauver le pays de la faillite