Pourquoi restez-vous aussi attachés à votre chéquier?
ARGENT•Le chèque est le troisième moyen de paiement privilégié par les Français...Céline Boff
Comment inciter les Français à se détourner du cash et du chèque pour privilégier la carte bancaire et le paiement dématérialisé ? C’est la question sur laquelle se penchent ce mardi les professionnels réunis aux Assises nationales des moyens de paiement, organisées à la demande de Bercy.
La tâche n’est pas aisée. Si les Français plébiscitent la carte bancaire – elle est le moyen de paiement préféré de 71 % des citoyens, d’après un sondage réalisé par l’Institut CSA (1) -, ils continuent de régler les petits montants en espèces. Et puis, ils restent très attachés à leurs chéquiers, surtout pour acquitter des achats plus onéreux. Le chèque est le troisième mode de paiement des Français, très loin devant le prélèvement, le virement ou encore, le portefeuille virtuel du type Paypal.
«Les nouveaux moyens de paiement sont bien plus sécurisés que les chèques»
La France est d’ailleurs le pays européen où le carnet de chèques est le plus utilisé : en 2013, un Français émettait en moyenne 37 chèques… Contre moins d’un en Allemagne, en Belgique ou encore, en Pologne. Mais pourquoi ? « Parce que les pouvoirs publics et les banques ont tout fait pour le promouvoir », répond Serge Maître, de l’Association française des usagers des banques (Afub). « Afin de lutter contre la fraude fiscale, le gouvernement a créé en 1977 l’obligation d’avoir un compte bancaire pour encaisser sa rémunération et l’interdiction de régler les salaires en cash, en tout cas au-dessus d’un certain montant [1.500 euros actuellement]. Le chèque s’est donc imposé ».
Le pic d’utilisation du chèque se situe à 35-49 ans
Aujourd’hui encore, de nombreuses TPE et PME rémunèrent leurs salariés via un chèque. Et près de la moitié des chèques émis en France le sont par des entreprises.
Si le chèque a toujours la cote, c’est aussi parce que les banques continuent de le délivrer gratuitement à leurs clients. Et qu’il est quasiment le seul moyen de paiement accepté pour régler certains services, comme les frais scolaires et les activités socioculturelles. Ce qui explique sans doute pourquoi le pic d’utilisation du chèque se situe à 35-49 ans et non pas parmi les personnes âgées.
Michel Sapin, le ministre des Finances, compte mettre fin à cette tendance : « D’ici à la fin de 2016, l’Etat va montrer la voie en généralisant auprès des collectivités locales et territoriales la solution de télépaiement Tipi pour régler sans frais des services comme la cantine, la crèche ou tout autre service public dont le paiement passe par la Direction générale des finances publiques (DGFIP) », assure-t-il dans un entretien aux Echos.
Au-delà des services publics, le chèque est également utilisé pour les dépenses médicales. Pour faciliter l’acceptation de la carte bancaire par les professions libérales, Bercy veut que les entreprises individuelles adhérant à un organisme de gestion agréé acceptent, en plus du chèque, au moins un moyen de paiement électronique. Et ce, dès 2016. Pour les inciter à sauter le pas, le ministère va limiter la commission interbancaire, qui passera de 0,28 % en moyenne à 0,23 % de la valeur de transaction d’ici à la fin de l’année.
73 % des Français opposés à la disparition du chèque
Ce que Serge Maître trouve bien anecdotique : « Ce qui coûte cher aux professionnels lors d’un paiement par carte bancaire, ce n’est pas la commission interbancaire mais la commission commerciale appliquée par la banque et qui varie, selon le profil du professionnel et l’établissement, de 0,5 à 2 %, voire 3 %. Et là, rien n’est fait ! ».
Même si l’utilisation du chèque diminue de 4 % par an, il ne risque donc pas de disparaître demain. D’ailleurs, 73 % des Français sont opposés à sa suppression, révèle le sondage réalisé par le CSA. Ce qui ne fait les affaires de Bercy : « Pour l’Etat, le traitement des chèques est plus coûteux que le virement ou le prélèvement et l’encaissement est plus long… C’est contradictoire avec la nécessité d’avoir une gestion plus saine de la richesse nationale », estime Serge Maître.
(1) Etude réalisée auprès de 1.004 personnes du 29 au 30 avril, selon la méthode des quotas.
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