REPORTAGEMobilisation patronale: «On ne peut pas nous donner dans une main ce que l’on nous prend dans une autre»

Mobilisation patronale: «On ne peut pas nous donner dans une main ce que l’on nous prend dans une autre»

REPORTAGEMalgré le discours pro-entreprise du gouvernement et d'importants allégements de charges, le patronat entamait ce lundi une semaine de mobilisation par une manifestation à Paris…
Romain Lescurieux

Romain Lescurieux

Pétards, cornes de brume et le tube des Daft Punk «Get Lucky» en fond sonore. Malgré un froid hivernal, c'est dans une ambiance réchauffée que les patrons ont battu le pavé parisien ce lundi matin à l’appel de la CGPME (Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises) qui a réuni vingt-cinq organisations syndicales, dont celles des buralistes, des professionnels du bâtiment ou encore du transport.

Le but: dénoncer avec le Medef et l’Upa (Union professionnelle artisanale) – qui ont opté pour un autre mode de contestation – trente années d'une politique qui a, selon eux, «bridé» l'économie.

«Qu’ils nous laissent travailler»

Chapeaux sur la tête pour certains, Barbour sur le dos pour d'autres, entre «4.000 et 6.000» manifestants, ont défilé de la place Félix-Eboué jusqu’à Bercy dans le 12e arrondissement de la capitale. Un mouvement rare, et tout nouveau pour la plupart des participants. «C’est ma première fois dans la rue mais là il y a un ras-le-bol général. Qu’ils nous laissent travailler», expliquait Patrick, 70 ans, mains dans le dos et sifflet autour du cou.

>>Quand les patrons trouvent le chemin de la rue. Lire l’article ici.

Pour leur premier défilé depuis quinze ans, ces patrons des PME ne voulaient «pas passer pour des gens passéistes qui roulent en grosse voiture». «Nous ne sommes pas comme ça», expliquait Olivier, chargé de la communication de la Confédération. Equipés de pancartes, de chaînes et de cadenas, les manifestants criaient «PME-TPE cadenassées, libérez nos entreprises».

En tête de cortège, Jean-François Roubaud, président de la CGPME, détaillait les revendications et réclamait «la suspension immédiate» de trois mesures : «le compte individuel pénibilité, qui doit entrer en vigueur à partir de 1er janvier 2015, la durée minimum de 24 heures hebdomadaires pour les nouveaux contrats à durée déterminée et l'obligation d'informer les salariés au moins deux mois avant toute cession d'entreprise».

Pacte de responsabilité, CICE, discours de Valls au Medef : Insuffisant?

«La pénibilité est tellement complexe qu’elle est impossible à mettre en place dans les PME. Et si on l’applique il faudra embaucher une personne pour dix salariés», expliquait Alain. «Ensuite, la transmission doit continuer à se faire dans la discrétion pour ne pas mettre en danger l’entreprise», ajoutait-il. Enfin, «la durée minimum de 24 heures hebdomadaires est une mesure inutile dans une conjoncture de crise».

>>Manuel Valls déclare sa flamme aux patrons. Lire l'article ici

Il y a encore peu, le patronat français applaudissait pourtant des deux mains le discours pro-entreprise de Manuel Valls au Medef et les allégements de charges du pacte de responsabilité. Un paradoxe? Non, s’offusquaient ce lundi certains manifestants: «C’est comme si on devait remercier le gouvernement de nous casser les deux jambes plutôt que de nous écraser», s’emportait Michel. «Les annonces ne sont pas satisfaisantes. On nous a tellement pris que les 41 milliards promis aux entreprises ne suffisent pas», affirmait de son côté Olivier.

«Nous sommes pour le CICE et le Pacte de responsabilité mais il aurait aussi été plus simple de ne pas augmenter les impôts, les taxes et les charges sur les sociétés. On ne peut pas nous donner dans une main ce que l’on nous prend dans une autre», scandait Jean-François Roubaud, debout sur un camion stationné non loin des fenêtres du ministère de l'Economie.