Altice offre 7 milliards d'euros pour racheter Portugal Telecom
•Le groupe Altice a offert lundi 7,025 milliards d'euros pour racheter l'opérateur historique Portugal Telecom (PT), affaibli par l'implosion du groupe Espirito Santo, une opération qui annulerait le récent mariage de PT avec le brésilien Oi.© 2014 AFP
Le groupe Altice a offert lundi 7,025 milliards d'euros pour racheter l'opérateur historique Portugal Telecom (PT), affaibli par l'implosion du groupe Espirito Santo, une opération qui annulerait le récent mariage de PT avec le brésilien Oi.
La proposition ferme adressée à Oi comprend les activités «hors d'Afrique» de Portugal Telecom, mais «pas la dette de Rioforte», holding du groupe Espirito Santo aujourd'hui insolvable, a précisé Altice, maison mère du câblo-opérateur français Numericable.
Ce prêt de 897 millions d'euros à Rioforte, accordé en avril par Portugal Telecom, a semé les graines de la discorde entre Oi et l'opérateur portugais, dont la fusion devait donner naissance à un géant des télécommunications lusophone.
Pour résoudre le conflit, Oi a contraint son partenaire à réduire sa part dans la future entreprise de 38% à 25,6% et le PDG de Portugal Telecom, Henrique Granadeiro, a été poussé à la démission début août.
Dans les faits, la fusion s'était déjà concrétisée en mai: l'opérateur brésilien, à l'occasion d'une augmentation de son capital, avait absorbé les actifs de son partenaire portugais. Les résultats de PT sont depuis consolidés dans les comptes de Oi.
Mais, début octobre, Altice annonçait l'ouverture de négociations avec le groupe brésilien visant le rachat de ses actifs portugais, également convoités par le fonds d'investissement britannique Apax Partners. Les opérateurs de télécommunications espagnol Telefonica et britannique Vodafone seraient également sur les rangs.
- 'Démantèlement' -
Si Altice l'emporte, la vente de Portugal Telecom signifierait son «démantèlement», a estimé Pedro Lino, analyste de Dif Broker.
«Pour Oi, la vente de Portugal Telecom signifie une rentrée d'argent qui l'aidera à concrétiser sa stratégie de consolidation au Brésil», a-t-il ajouté à l'AFP.
Sans admettre officiellement la mise en vente de Portugal Telecom, l'opérateur basé à Brasilia a fait part de son intérêt pour le rachat de TIM, filiale brésilienne de Telecom Italia, et reconnu vouloir se délester des activités de l'opérateur portugais en Afrique.
La vente de PT fait des vagues à Lisbonne, où l'opposition socialiste a appelé le gouvernement de centre droit à intervenir pour protéger une entreprise qui revêt un «intérêt stratégique» pour le pays.
Le rachat par Altice pourrait signifier «8.000 licenciements» dans le cadre d'une «cure d'amaigrissement drastique», s'inquiétait ce week-end le grand hebdomadaire portugais Expresso.
Se voulant rassurant, le directeur général d'Altice, Dexter Goei, avait promis vendredi la création d'environ 4.000 postes de travail au Portugal grâce à la délocalisation dans le pays d'une partie des centres d'appel du groupe.
- Croissance accélérée -
Altice a entamé une phase de croissance accélérée avec l'absorption en cours en France de SFR, pour lequel il a reçu le 27 octobre le feu vert sous conditions de l'Autorité de la concurrence, et de Virgin, pour lequel il a signé en juin un accord d'acquisition.
Le groupe du milliardaire Patrick Drahi espère renforcer son activité au Portugal, où il est déjà présent depuis 2012 avec le câblo-opérateur portugais Cabovisao, acquérant l'année suivante Oni, une société de télécommunications pour les entreprises.
«Les synergies pourront représenter jusqu'à 180 millions d'euros par an dans le cas ou Altice vendrait Cabovisao, sinon elles seraient encore plus élevées», a estimé lundi Emmanuel Carlier, analyste chez ING.
Le prix de 7 milliards d'euros est «légèrement supérieur à celui du secteur, mais il est justifié par le fait que le taux de pénétration de la fibre (Ftth) est très élevé au Portugal», a-t-il précisé.
La balle est désormais dans le camp de Oi, détenu à hauteur de 25,6% par les actionnaires de Portugal Telecom qui, à ce titre, ont encore leur mot à dire.
Avant sa débâcle, Banco Espirito Santo (BES) était le principal actionnaire de Portugal Telecom avec une part de 10,06%. Cette participation a été transférée vers Novo Banco, l'entité créée le 3 août pour sauver les actifs sains de celle qui était la première banque privée du pays.
A la clôture des marchés, l'action Portugal Telecom était en hausse de 4,13% à 1,361 euro à la Bourse de Lisbonne, après avoir fondu de près de 60% sur les six derniers mois. A Amsterdam, Altice a pour sa part reculé de 1,23% à 49,08 euros.