Bruxelles peut-il retoquer le budget 2015 de la France?
FINANCES•La Commission européenne exigerait du gouvernement un effort budgétaire supplémentaire de 8 milliards d’euros, d’après «Le Figaro»...Bertrand de Volontat
«Inacceptable». C’est en ces termes rapportés par Le Figaro qu’un commissaire européen aurait décrit le budget 2015 de la France présenté mercredi 1er octobre en Conseil des ministres. Dérapage des finances publiques et manque de réformes, l’Hexagone semble de plus en plus en disgrâce à Bruxelles qui ne cache pas son irritation face à ce mauvais élève qu'elle entend moins ménager que par le passé.
Huit milliards d’euros supplémentaires?
La Commission débutera l’examen du projet de loi de finances de 2015 à partir du 15 octobre. Selon plusieurs sources européennes, elle pourrait demander à la France de revoir sa copie pour corriger un déficit prévu à 4,3% du PIB, loin des 3% auxquels Paris s'était engagé.
La France met en avant des «circonstances exceptionnelles» -croissance atone, très bas niveau de l'inflation- pour justifier ce dérapage. Mais nombre de ses partenaires européens ont dû consentir des efforts considérables alors qu'ils étaient dans une situation «bien pire» que l'Hexagone, souligne à l’AFP Bruno Cavalier, économiste chez le courtier Oddo.
Et même en prenant en compte l'effort budgétaire structurel français (sans les effets de la conjoncture), le compte n'y est pas. Le projet de budget 2015 met en évidence un effort structurel de 0,2 point de PIB, contre 0,8 point attendu par la Commission. Cette dernière aurait toutefois la solution pour réduire le déficit structurel de 0,5% supplémentaire, selon la source communautaire du Figaro.
En effet, d’après une information du quotidien, Bruxelles sommerait la France de trouver 8 milliards d’euros supplémentaires en 2015, sous forme d’impôts ou d’économies, à additionner à l’effort de 21 milliards promis par le gouvernement, afin d’éviter ce rejet. «La France ne fera pas en 2015 d’économies en plus des 21 milliards d’euros déjà prévus par le projet de budget et n’entend pas non plus augmenter les impôts», déclarait pourtant ce lundi le ministre des Finances Michel Sapin sur RTL.
Négociations en coulisses
«Vu les chiffres, certains jouent la perspective de rejeter le projet de budget français pour obtenir plus d'efforts de Paris», indique à l’AFP une source européenne au fait du dossier. Un scénario alternatif consisterait à ne pas rejeter le projet de budget mais à donner un avis extrêmement critique.
En coulisses, les négociations informelles auraient commencé «au plus haut niveau», d’après le Figaro, pour éviter un scénario particulièrement humiliant pour la France, deuxième économie de la zone euro derrière l'Allemagne. Un refus des Français de se soumettre aux exigences de Bruxelles équivaudrait à un bras de fer politique débouchant sur une procédure disciplinaire et des sanctions financières prévues dans les traités (un dépôt initial de 0,2 % du PIB, transformé en amende de 4 milliards d'euros à chaque infraction constatée).
Toutefois, la fin du mandat de José Manuel Barroso et l’arrivée de Jean-Claude Juncker à la tête de la Commission en novembre pourraient faire les affaires de Paris. Le premier ne souhaite pas finir sur une note négative et le second n’entend pas débuter son mandat sur une telle confrontation. La Commission a jusqu’au 30 octobre pour se prononcer.