Dette: la France attend d'être fixée sur sa note, les marchés n'en ont cure

Dette: la France attend d'être fixée sur sa note, les marchés n'en ont cure

Baissera, baissera pas? Le suspense autour d'une correction de la note de solvabilité de la France par Moody's vendredi est surtout politique, car les investisseurs, impassibles, devraient continuer à plébisciter la dette française.
© 2014 AFP

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Baissera, baissera pas? Le suspense autour d'une correction de la note de solvabilité de la France par Moody's vendredi est surtout politique, car les investisseurs, impassibles, devraient continuer à plébisciter la dette française.

Moody's doit selon un calendrier soumis aux autorités européennes livrer vendredi après la fermeture de la Bourse un avis sur la dette française. Elle peut toutefois aussi choisir de rester muette. Dans tous les cas, elle est tenue d'informer le gouvernement à l'avance.

Mais cette date annoncée a logiquement provoqué beaucoup de spéculations. Dès jeudi, le journal L'Opinion assurait que Moody's avait déjà informé l'exécutif d'une baisse imminente de la note du pays.

Une «information erronée», «éthiquement répréhensible» et qui «a eu un impact sur les marchés financiers», s'est ému vendredi le ministre des Finances Michel Sapin qui a demandé à l'Autorité des marchés financiers d'enquêter sur cette information.

L'AMF de son côté a dit «analyser précisément depuis hier (jeudi, NDLR) le marché de la dette française avant et après la parution de l'article en cause».

La France était toutefois toujours gratifiée vendredi d'un taux d'emprunt à dix ans très bas. Vendredi, il même reculé à 1,39% contre 1,44% la veille.

«Je ne sais pas ce que fera l'agence Moody's», a quant à lui assuré le président François Hollande jeudi lors de sa conférence de presse semestrielle.

- Taux historiquement bas -

M. Hollande a fait valoir que, malgré plusieurs décisions défavorables des agences de notation, «jamais l'Etat (n'avait) emprunté à des taux aussi bas».

En janvier 2012, juste avant de perdre sa note suprême «AAA» attribuée par l'autre grande agence de notation, Standard and Poor's, la France empruntait à dix ans à un taux d'environ 3,2%. Contre 1,4% actuellement.

Pour Christopher Dembik, économiste de Saxo Banque, une baisse de la note de la solvabilité de la France par Moody's «est très vraisemblable», en raison «de réformes jugées trop lentes et de l'abandon des objectifs budgétaires».

Vendredi, un dirigeant de la Réserve fédérale américaine, le président de la Fed de Dallas Richard Fisher a lui jugé la France «extrêmement faible» avec «un président qui est encore plus bas dans les sondages» que Barack Obama.

Et selon Christopher Dembik, une éventuelle dégradation serait d'ailleurs surtout «utilisée politiquement par l'opposition».

Le scénario qui a la cote auprès des économistes est celui d'une baisse d'un cran de la note attribuée à Moody's pour la dette à long terme du pays, censée apprécier la qualité de la signature française, à «Aa2» contre «Aa1» avant. Ce serait la troisième meilleure note dans son échelle et cela ferait encore de la France un émetteur de «haute qualité».

Moody's ne ferait que s'aligner sur Standard and Poor's, qui a déjà ramené la note souveraine de la France à «AA», également le troisième échelon dans sa propre grille de notation.

Depuis janvier 2012, les baisses de notation ont vu se mettre en place un jeu de miroir politique.

Après la perte du triple A de Standard and Poor's, la gauche avait qualifié Nicolas Sarkozy de «président de la dégradation», ce dernier avait répliqué «ça ne change rien».

Lorsque Moody's avait suivi en novembre 2012, l'exécutif de gauche avait appelé au calme et le président de l'UMP Jean-François Copé avait commenté une annonce «lourde d'inquiétudes».

- La passion française des notes -

«La France raffole des métaphores scolaires et nos responsables politiques, qui à 60 ans accordent encore de l'importance à leur classement de sortie de l'ENA, viennent d'un système scolaire fondé sur les notes», soupire Alexandre Delaigue, professeur d'économie à Saint-Cyr.

Pour les économistes, si les marchés n'ont cure du verdict des agences de notation, c'est pour plusieurs raisons.

M. Dembik rappelle que d'une part, la Banque centrale européenne déverse une abondance de liquidités qui trouve refuge dans les obligations d'Etat.

D'autre part, il pointe une «bulle spéculative», expliquant que les investisseurs, inquiets de la flambée sur les marchés actions et d'une possible correction brutale, «se replient sur les marchés des obligations, vues comme plus sûres».

M. Delaigue souligne enfin que «si les agences de notation disposent encore d'une expertise particulière quand elles notent la qualité d'émetteur des entreprises, parce qu'elles ont accès à plus d'informations, dans le cas des Etats, elles n'en savent pas plus que les investisseurs», qui ne s'émeuvent donc pas outre mesure de leurs décisions

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