«L'impôt sur le revenu pèse sur les classes moyennes, mais ce n'est pas le seul impôt»
INTERVIEW•Guillaume Allegre, économiste à l'OFCE, revient sur les propos de Gilles Carrez concernant «l'hypercontration des augmentations d'impôt sur les classes moyennes»...Propos recueillis par Delphine Bancaud
Dans une interview au Parisien parue ce mardi, le président UMP de la commission des Finances de l’Assemblée Gilles Carrez a dénoncé la hausse des impôts sur le revenu des classes moyennes. Guillaume Allegre, économiste à l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques), livre son analyse de la donne fiscale pour ces foyers.
Selon Gillez Carrez, les augmentations d’impôts sont hyperconcentrées sur les classes moyennes. Est-ce exact?
Par construction, l’impôt sur le revenu pèse sur les classes moyennes. Car seulement deux tiers des ménages français payent l’impôt sur le revenu. Parmi eux, figurent les classes moyennes, qui ont des revenus supérieurs à 20.000 euros nets annuels (30.000 pour un couple) et les classes les plus aisées (les 10 % les plus riches) qui perçoivent des revenus supérieurs à 40.000 nets pour une personne seule et 60.000 nets pour un ménage. Par ailleurs, les augmentations d’impôts sur le revenu pour les classes moyennes avaient déjà démarré sous le précédent gouvernement. Rappelons aussi que ce n’est pas le seul impôt: la TVA pèse deux fois plus; la CSG pèse également plus.
Quelles mesures fiscales ont fait grimper leurs impôts sur le revenu cette année?
Plusieurs mesures ont impacté les classes moyennes. Tout d’abord le gel du barème. Puis la refiscalisation des heures supplémentaires, l’intégration dans leurs revenus de la cotisation de l’employeur à la mutuelle, la fiscalisation de la majoration de 10 % des pensions de retraite pour les retraités ayant élevé trois enfants et l’abaissement du plafond du quotient familial à 1.500 euros (qui touche cependant surtout les plus aisés).
Ces hausses risquent-elles d’avoir des conséquences sur le consentement à l’impôt des classes moyennes?
C’est la crainte du gouvernement. Mais il n’y a pas de miracle: si l’on veut conserver notre système de protection sociale et réduire le déficit, on doit concentrer l’effort sur le haut de l’échelle. Si les classes moyennes expriment leur mécontentement face à ces hausses d’impôts, leur réaction aurait été peut-être encore plus violente si le gouvernement avait choisi de réduire les dépenses publiques pour réduire le déficit. Car s’ils veulent payer moins d’impôts, les Français veulent également conserver la qualité des services publics
Gilles Carrez a proposé ce mardi de créer une franchise d’impôt sur le revenu autour de 130 euros pour tous les contribuables dont le revenu imposable est inférieur à 40.000 euros afin d’«atténuer la douloureuse» des classes moyennes. Quelle serait la conséquence d’une telle mesure?
Elle reviendrait à faire payer aux plus pauvres les baisses d’impôts. Car il voudrait la financer par l’abandon de la réforme des rythmes scolaires et de la revalorisation du RSA socle sur l’inflation sur 5 ans.