SERIE 1/4: Téléphonie, travail, alimentation...Ce que les eurodéputés ont changé dans votre quotidien
EUROPE•En matière d'emploi, ils ont renforcé les possibilités de contrôles pour limiter les fraudes et le dumping social...Céline Boff
Le Parlement européen, ça ne sert à rien? Détrompez-vous: un tiers des lois et des ordonnances appliquées en France sont directement issues des textes adoptés par les eurodéputés à Bruxelles ou à Strasbourg. 20 Minutes a sélectionné quatre décisions qui ont des conséquences sur le quotidien des Français.
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Les travailleurs détachés. Ça a été l’une des grosses polémiques de l’année 2013. En théorie, le dossier n’a pourtant rien de nouveau: les entreprises peuvent prêter un ou plusieurs de leurs salariés à une société implantée dans un autre pays de l’Union européenne (UE) depuis 1996.
Mais en pratique, les choses ont bien évolué en 17 ans. D’abord parce que les frontières de l’UE se sont progressivement étendues vers l’Est. Le réservoir en main-d’œuvre «détachable» s’est donc copieusement accru. Ce qui serait passé quasi inaperçu si dans le même temps, la crise et le chômage de masse ne s’étaient pas installés durablement sur le Vieux continent.
Résultat: des ressortissants d’Europe de l’Est, mais aussi des Espagnols, des Grecs et des Portugais sont venus grossir les rangs des travailleurs détachés venant exercer, notamment en France. L’Hexagone est en effet, après l’Allemagne, le pays qui en accueille le plus.
«Nous avons vu le Parlement européen agir de façon vive et directe»
Les premiers à se plaindre de la situation ont été les PME et les artisans tricolores, qui ont perdu des contrats en raison de cette concurrence d’autant plus déloyale que les abus se sont multipliés. En effet, au lieu de rémunérer leurs travailleurs détachés au minimum au smic, comme le prévoit la directive européenne, des grandes entreprises françaises les ont payés, via des sous-traitants, à peine 7 euros de l’heure, voire moins.
Rappelons qu’en théorie, le seul avantage pour un employeur français à recourir à un travailleur détaché est de pouvoir régler les cotisations sociales aux taux en vigueur dans le pays d’origine du salarié.
Mi-avril, les eurodéputés ont renforcé la directive initiale afin de donner aux Etats membres des moyens supplémentaires pour lutter contre les fraudes. «Nous avons vu le Parlement européen agir de façon vive et directe pour mieux réguler les dérives et les dernières avancées vont dans le bon sens», estime François Asselin, président de la CGPME Poitou-Charentes et entrepreneur dans le bâtiment.
«Le législateur français pourrait aller plus loin»
«Le législateur français prépare actuellement une loi inspirée par la directive européenne. Désormais, le maître d’ouvrage, c’est-à-dire le donneur d’ordre, pourra lui aussi être tenu responsable si le droit social français n’est pas respecté, par exemple si le salarié détaché travaille plus de 35 heures par semaine, si son salaire n’est pas aux normes, si sa sécurité n’est pas assurée. Le maître d’ouvrage devra également vérifier que la déclaration de détachement a bien été effectuée… En cas de contrôle et de manquement, il pourra être condamné et ce, jusqu’au pénal. C’est très positif».
Ce patron de PME – son entreprise de charpente et de menuiserie emploie 140 salariés- estime que l’avancée pourrait toutefois être plus franche… de la part de la France: «Les eurodéputés ont laissé à chaque pays la liberté de choisir leurs propres mesures. Ce qui est vraiment très bien, le principe de subsidiarité étant ainsi respecté. Malheureusement, le législateur français ne semble pas vouloir aller très loin dans le volet préventif. Nous aurions apprécié qu’il rende obligatoire la détention d’une carte individuelle professionnelle. Elle aurait pu être dotée d’un flash code et cela aurait facilité les contrôles…» La loi devrait être votée en juin.