TELEPHONIERachat de SFR: Mais à quoi joue Bouygues Telecom?

Rachat de SFR: Mais à quoi joue Bouygues Telecom?

TELEPHONIELe groupe a décidé de prolonger son offre de rachat de SFR...
Céline Boff

Céline Boff

Et Bouygues Telecom revient sur le devant de la scène médiatique. Après quelques jours de silence dans le dossier du rachat de SFR, l’opérateur a annoncé mardi qu’il allongeait la validité de son offre. Fini la deadline du 8 avril, la proposition de Martin Bouygues tient désormais jusqu’au 25 avril.

Vivendi, propriétaire de SFR, a beau avoir annoncé le 14 mars dernier qu’il entrait en négociations exclusives jusqu’au 4 avril avec Altice, la maison-mère de Numericable, rien n’y fait: Bouygues l’éconduit ne veut pas lâcher l’affaire.

Bouygues a trop à perdre

Tout simplement parce qu’il a trop à perdre. «Numericable peut vivre sans mettre la main sur SFR, c’est plus compliqué pour Bouygues. S’il parvient à racheter SFR, il s’impose comme le numéro 1, mais s’il échoue, il sera le groupe le plus fragile dans un marché à quatre opérateurs», analyse Jean-Michel Huet, directeur associé du cabinet BearingPoint Management & Technology Consultants.

Pour Bouygues, l’enjeu est donc d’occuper le terrain en multipliant les annonces. Le 20 mars, il a d’abord renchéri son offre de 1,84 milliard d’euros en numéraire. Elle atteint désormais 13,15 milliards d’euros, contre 11,75 milliards pour Altice. Une semaine plus tard, il a joué la carte des emplois, en promettant de ne procéder à «aucun licenciement économique collectif, plan social, plan de départs volontaires» pendant 36 mois à partir de la signature de l’accord de rapprochement avec SFR. Et ce, sans aucune restriction, contrairement à Altice, qui garantit l’emploi «sauf revirement économique imprévisible».

Enfin, ce mardi, le groupe de Martin Bouygues a encore enfoncé le clou en expliquant s’être engagé à payer une indemnité de rupture de 500 millions d’euros «si les autorités réglementaires refusaient d’approuver l’accord de rapprochement (avec SFR) ou si Bouygues retirait sa demande d’autorisation compte tenu des remèdes [contreparties] exigés».

Rendre caduques les négociations exclusives

Ce forcing peut-il payer? «Bouygues n’a pas le choix. Vivendi n’a pas lancé de véritable appel d’offres. En termes de planning, de critères, de règles du jeu… Rien n’est clair», analyse un observateur. A tel point que l’Autorité des marchés financiers (AMF), le gendarme de la bourse, a tapé du poing sur la table la semaine passée et reproché à tous les acteurs impliqués, Bouygues y compris, l’opacité de leur communication financière dans la bataille pour le rachat de SFR.

En améliorant sans cesse son offre et en le faisant savoir aux salariés, aux actionnaires, aux pouvoirs publics et à l’opinion, Bouygues espère surtout rendre caduques les négociations exclusives actuellement menées entre Vivendi et Altice. «Le fait de proposer une offre mieux disante devrait obliger Vivendi à l’étudier, eu égard à l’intérêt des actionnaires», estime une source proche du dossier.

Il l’oblige en tout cas à faire un pas: sans renoncer aux négociations exclusives, Vivendi a affirmé la semaine passée qu’il avait regardé la contre-offre présentée par Martin Bouygues. «En allongeant la validité de son offre, Bouygues cherche à présent à relâcher la pression. L’idée est de donner le temps à Vivendi de discuter avec lui», estime un observateur.

Avant de retenir in fine la meilleure offre… C’est-à-dire celle qui sera la plus intéressante financièrement, la plus rassurante en termes d’emploi… Mais aussi la plus rapide à réaliser. Et c’est bien là le talon d’Achille de Bouygues: «D’un point de vue concurrentiel, le dossier est plus compliqué, donc forcément plus long à gérer pour Vivendi», conclut Jean-Michel Huet.