Data et Big data: Un marché qui attise les convoitises

Data et Big data: Un marché qui attise les convoitises

ECONOMIE – L'évolution de ce marché à haut potentiel était au cœur d'une conférence organisée ce jeudi au Numa, lieu dédié aux start-up parisiennes...
Céline Boff

Céline Boff

La «data» et le «Big data». Ou, en français, le traitement des données personnelles. C’est un phénomène mondial -ce marché devrait atteindre 40 milliards d’euros en 2018- mais ses enjeux sont encore mal compris en France. Y compris par les entreprises. La data leur offre pourtant d’immenses opportunités. D’abord en termes de marketing, puisqu’elle permet d’utiliser «les données de son client pour savoir quel produit ou service lui proposer», détaille Philippe Torres*, de l’Atelier BNP Paribas, un centre d'analyse des nouvelles technologies.

Une stratégie dictée par la data

Prenez le site américain Netflix. Ce spécialiste du streaming a développé un moteur de recommandations invitant les internautes à noter les séries et films visionnés. Ces données sont ensuite analysées pour suggérer, à chaque abonné, les nouvelles vidéos susceptibles de lui plaire. L’objectif est bien sûr de l’inciter à consommer et de le fidéliser. Et ça marche: 75% des contenus visualisés sur le site proviennent des recommandations.

De plus en plus d’entreprises deviennent aussi «data driven», c’est-à-dire que leur stratégie est directement dictée par les données qu’elles récupèrent. C’est particulièrement vrai dans le secteur des jeux sociaux (Farmville, Candy crush, etc.): les éditeurs analysent les données issues des comportements des joueurs en ligne pour faire évoluer leur jeu en fonction.

Si l’accès à ces jeux est souvent gratuit, les internautes sont progressivement incités à dépenser de l’argent pour avancer plus vite. Les éditeurs parviennent également à monétiser leurs jeux en y plaçant des produits de marque ou en y insérant des publicités.

En France, des données collectées via les smartphones

Et ne pensez pas que la data existe uniquement dans le monde virtuel. Elle débarque aussi dans la vie réelle, comme le prouve l’expérimentation menée depuis an et demi par Disney dans son parc d’attractions d’Orlando, en Floride: «Des bracelets connectés sont remis aux familles en amont de leur visite et permettent à Disney de recueillir diverses données: achats effectués, attractions favorites, temps pour se déplacer d’un lieu à un autre, etc. Le groupe exploite ensuite ces éléments pour proposer, au fur et à mesure, "une meilleure expérience Disney"», détaille Philippe Torres.

En France aussi, certains s’y mettent. Comme le Comité du tourisme Côte-d’Azur. L’organisme a signé un partenariat avec l’opérateur Orange pour recevoir des données collectées via les smartphones des touristes (géolocalisation, usage des médias sociaux, etc.) –le tout, de manière anonymisée. Objectif: analyser leurs déplacements afin de mieux choisir, par exemple, l’emplacement des futurs hôtels ou encore de mieux personnaliser l’accueil des visiteurs.

«Toutes les entreprises doivent réfléchir à la data»

Orange ne dissimule d’ailleurs pas son intérêt pour la data. La semaine dernière, lors de la présentation de ses résultats, Stéphane Richard, son PDG, a déclaré: «Nous n’avons pas l’intention de monétiser les données de nos clients auprès d’autres entreprises, mais nous cherchons à mieux les utiliser dans les services que nous offrons à nos clients.»

Pour Philippe Torres, il est urgent de s’y mettre: «Toutes les entreprises doivent réfléchir à la data et se demander quelles données elles peuvent capter, comment elles peuvent les utiliser et même, quelle partie de ces données elles vont pouvoir échanger avec des acteurs complémentaires.» En attendant, la data est l’un des sept défis nationaux à relever d’après la Commission innovation 2030, installée l’an dernier par François Hollande et présidée par Anne Lauvergeon, l’ex-patronne d’Areva.

*Les propos ont été tenus lors d’une conférence sur la data organisée ce 13 mars 2014 par l’Atelier BNP Paribas, au Numa, lieu dédié aux start-up, à Paris 2e.

La data vs le Big data

Quelle est la différence entre le Big data et la data? «Le Big data, c’est-à-dire l’exploitation des données massives, est le sujet des géants de l’Internet, comme Google ou Facebook. Seules une vingtaine d’entreprises sont concernées. Pour toutes les autres, y compris les plus petites, les experts parlent plutôt de la data, soit la valorisation de données, non massives», répond Philippe Torres, de l’Atelier BNP Paribas.