Italienne, la plus vieille banque du monde sera-t-elle nationalisée?
ECONOMIE•Fondée il y a plus de 500 ans dans la ville médiévale de Sienne, l'avenir de Banca Monte dei Paschi di Siena (BMPS) est bouché...20 Minutes avec AFP
Reculer pour mieux sauter? L'assemblée des actionnaires de la plus vieille banque du monde Banca Monte dei Paschi di Siena (BMPS) a été reportée à samedi mais elle risque de se transformer en bras de fer entre l'actionnaire principal et la direction.
Une augmentation de capital de trois milliards d'euros
D'un côté du ring, le patron Alessandro Profumo et l'administrateur délégué Fabrizio Viola lancés dans une restructuration à marche forcée de BMPS, fondée il y a plus de 500 ans dans la ville médiévale de Sienne. De l'autre, la fondation sans but lucratif MPS, premier actionnaire avec 33,5% du capital, qui cherche à défendre l'identité de cet établissement autrefois prestigieux et extrêmement riche.
Moins de 50,1% du capital étaient représentés à l'ouverture des travaux prévue en «première convocation» vendredi pour approuver une grosse augmentation de capital de 3 milliards d'euros. Samedi, en «deuxième convocation», le quorum nécessaire sera de seulement un tiers du capital. La réunion de samedi à Sienne sera probablement agitée, en raison d'un désaccord sur la date de recapitalisation entre la Fondation MPS et les dirigeants de la troisième banque italienne. Messieurs Profumo et Viola se sont engagés à ce qu'elle ait lieu en janvier, alors que la fondation demande plus de temps, jusqu'à mai/juin 2014.
Très endettée, la Fondation (dont le patrimoine s'est réduit de 6 milliards en 2008 à moins d'un milliard pour financer les déboires de BMPS) cherche à vendre une partie de ses activités, pour dégager des fonds et participer à l'augmentation de capital, ce qu'elle n'aurait pas le temps de faire en janvier. Mais tout retard pourrait s'avérer critique pour la banque alors que le feu vert de la Commission européenne au plan de sauvetage de BMPS est conditionné par sa recapitalisation et au remboursement d'au moins 70% des crédits que lui a alloué l'Etat italien, d'ici la fin 2014.
«Le match qui se joue à Sienne laissera des traces bien au-delà des murs d'enceinte de la ville toscane», estime Cesare Peruzzi dans le journal Sole 24 Ore vendredi. Un divorce entre Fondation et BMPS aurait un impact énorme pour «les territoires de référence de la Fondation» mais aussi pour «les équilibres au niveau national avec des effets sur le gouvernement et la Commission européenne», a-t-il ajouté.
Son indépendance menacée
Avant l'assemblée des actionnaires, le président de BMPS Alessandro Profumo a envoyé une lettre à la Fondation pour l'avertir des «graves risques encourus» si elle votait contre la recapitalisation immédiate. Messieurs Profumo et Viola ont même mis leur démission dans la balance.
La présidente de la Fondation (depuis trois mois), Antonella Mansi, a rétorqué qu'une augmentation de capital en janvier aurait pour conséquence de «détruire le patrimoine de la fondation, ce que nous ne pouvons pas permettre». «Nous voterons contre la recapitalisation au premier trimestre pour donner une bouffée d'oxygène à la Fondation et lui permettre de ne pas se vendre au plus offrant», a indiqué Maria Alberta Cambi, présidente d'une association regroupant les petits actionnaires. La banque est depuis toujours l'un des piliers économiques de Sienne et son principal bienfaiteur, finançant des hôpitaux, l'université et le Palio, la course de chevaux, qui a rendu Sienne célèbre dans le monde entier.
Si les fonds prêtés par l'Etat (sous forme d'obligations, les «Monti bonds») n'étaient pas restitués à temps, la banque, créée en 1472, pourrait perdre son indépendance et être nationalisée. Après le report de l'assemblée, les investisseurs qui avaient fait gagner 3% au titre dans les premiers échanges à la Bourse de Milan, se montraient déçus en fin de matinée. L'action évoluait ainsi autour de l'équilibre à 0,17 euros.
L'origine des ennuis de BMPS remonte, selon les médias italiens, à son rachat en 2007 de la banque AntonVeneta à l'espagnole Santander pour 9,3 milliards d'euros, un prix jugé surévalué d'au moins 3 milliards. Pour masquer le manque à gagner, l'ancienne direction est accusée d'avoir investi dans des produits dérivés toxiques qui ont généré d'énormes pertes. Le scandale a éclaté en 2012 précipitant le départ des dirigeants dont le numéro un de BMPS Giuseppe Mussari et l'ouverture d'une enquête judiciaire sur l'hypothèse de malversations autour de ces opérations.