SOCIALPourquoi il faut réformer la formation professionnelle

Pourquoi il faut réformer la formation professionnelle

SOCIALLes syndicats et le patronat entament mardi des négociations pour parvenir à un accord d'ici décembre en vue d’une profonde refonte du système de formation…
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

Après avoir été réformée en 2004 et 2009, la formation professionnelle va subir un nouveau lifting. Les syndicats et le patronat entament mardi des négociations pour parvenir à un accord d'ici décembre, en vue d’une profonde refonte du système. Un projet de loi est attendu dans la foulée avant la fin de l'année. 20 minutes fait le point sur les principales critiques qui pèsent sur le système actuel.

Son financement est trop complexe et inéquitable

En 2010, 31,5 milliards d'euros ont été dépensés pour la formation professionnelle continue et l'apprentissage. Les entreprises sont les premiers contributeurs avec 13,1 milliards car la loi de 1971 leur impose de financer la formation. Elles peuvent s'acquitter de leur contribution (variable selon leur taille) de deux manières: financer directement des formations pour leurs salariés (en interne ou en faisant appel à des prestataires) ou faire des versements à des organismes de branche gérés par le patronat et les syndicats (les OPCA). Ils redistribuent ensuite les fonds aux entreprises qui engagent des formations. L'Etat est le deuxième financeur avec 10,8 milliards engagés (dont plus de 6 mds pour former ses propres agents). Viennent ensuite les régions (4,4), des organismes (dont Pôle emploi) et les ménages eux-mêmes.

Un système peu équitable, selon Christophe Parmentier, auteur de L’ingénierie de formation*, «car les grandes entreprises font davantage appel aux OPCA que les petites entreprises et bénéficient donc indirectement des contributions des PME». De son côté, le ministre du Travail, Michel Sapin a prévenu: «le temps est venu de modifier le financement». Il souhaite notamment redistribuer les cartes entre les nombreux acteurs (Régions, Etat, Pôle emploi, partenaires sociaux). «Au final, les Régions risquent d’être davantage mise à contribution et les obligations légales des entreprises en matière de formation vont certainement être remises à plat», croit savoir Christophe Parmentier.

Les bénéficiaires ne sont pas les moins formés

«Paradoxe: le système de formation ne bénéficie pas à ceux qui en ont le plus besoin, car les financements ne sont pas assez orientés selon les différents publics», explique Christophe Parmentier. Ainsi, 62% des fonds sont utilisés pour les salariés, 25% pour les jeunes formés en alternance et 12,5% pour les chômeurs. En outre, les plus diplômés sont ceux qui se forment le plus: 32 heures en moyenne par an pour un cadre Bac+3 et plus, 5 heures pour un employé sans aucun diplôme. «Concernant les demandeurs d’emploi, seuls les cadres arrivent à se repérer dans le dédale de formations et de procédures», souligne Christophe Parmentier. Et la création, du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) en 2009, pour orienter une petite part des ressources des entreprises vers la formation des chômeurs et salariés peu qualifiés n’a eu que peu d’effets.

«Par ailleurs, le DIF (droit individuel à la formation) n’est pas optimal. Il ne compte que 7% de bénéficiaires pour les 20 heures de formation annuelle. Car c’est une liste au père Noel. Le salarié a juste le droit de demander une formation, mais elle peut être refusée», souligne Christophe Parmentier.

Du coup, le gouvernement souhaite créer un «compte personnel de formation» attaché aux actifs tout au long de leur vie professionnelle. «L’idée est que chacun, qu’il soit chômeur ou salarié puisse activer ses droits à la formation quand il le voudra», précise Christophe Parmentier. Le but est comme François Hollande l’avait évoqué à Blois en mars dernier, qu'«un chômeur sur deux se voie proposer une formation dans un délai de deux mois».

Les jeunes restent trop souvent au bord de la route

Actuellement, seulement 25% des fonds de la formation sont dédiés aux cursus en alternance pour les jeunes. Avec la réforme, davantage de moyens leur seront sans doute consacrés. «On pourrait aussi imaginer que les partenaires sociaux s’entendent aussi pour fusionner les contrats d’apprentissage et de professionnalisation afin de les rendre plus lisibles vis-à-vis des jeunes», conclue Christophe Parmentier.

*Editions Eyrolles, 2012, 29,40 E.