Le Portugal au crible de ses créanciers internationaux

Le Portugal au crible de ses créanciers internationaux

La troïka des créanciers du Portugal entame lundi à Lisbonne un nouvel examen des comptes du pays sous assistance financière, dans un contexte délicat marqué par des taux d'emprunt en hausse et des mesures d'austérité qui s'enlisent.
© 2013 AFP

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La troïka des créanciers du Portugal entame lundi à Lisbonne un nouvel examen des comptes du pays sous assistance financière, dans un contexte délicat marqué par des taux d'emprunt en hausse et des mesures d'austérité qui s'enlisent.

Les experts (UE, BCE, FMI) passeront au crible une série de mesures prévues en contrepartie du plan de sauvetage de 78 milliards d'euros accordé en mai 2011, pour décider dans la foulée du déblocage d'une nouvelle tranche de crédit.

Très attendue, cette mission aurait dû commencer à la mi-juillet, mais avait été reportée en raison de la grave crise politique qui a failli entraîner l'éclatement de la coalition de centre droit au pouvoir.

La crise politique est passée, mais les blocages institutionnels persistent: la Cour constitutionnelle a censuré fin août un projet de loi visant à licencier des fonctionnaires, et d'autres mesures de rigueur risquent de subir le même sort.

Du coup, les taux d'intérêt de la dette portugaise ont grimpé, dépassant les 7% pour l'échéance à dix ans, un niveau à haut risque. «Le verdict de la Cour constitutionnelle a sans doute contribué à l'envolée des taux, dans un contexte de hausse généralisée», a commenté à l'AFP Filipe Silva, analyste de Banco Carregosa.

Le Portugal avait pourtant surpris avec des indicateurs macroéconomiques meilleurs que prévu. Le pays a renoué au deuxième trimestre avec la croissance (+1,1%), après deux ans et demi de récession, et le taux de chômage a baissé à 16,4%.

Depuis, de nouvelles mesures d'économies ont été annoncées par le gouvernement de Pedro Passos Coelho, dont des coupes de 10% dans les pensions des fonctionnaires. Cette mesure a été particulièrement mal accueillie par une population exaspérée par des sacrifices à répétition.

«Si le gouvernement impose encore davantage d'austérité, le Portugal se rapprochera de la Grèce, la reprise sera étouffée et la dette va déraper», explique à l'AFP Pedro Lains, professeur d'histoire de l'économie de l'Université de Lisbonne.

Pour lui, il ne fait aucun doute qu'il faut «desserrer la bride et changer de modèle», alors que «le Premier ministre veut continuer à imposer un programme très sévère qui va au-delà des exigences de la troïka».

Les Européens réticents

Le vice-premier ministre Paulo Portas, plus enclin que M. Passos Coelho à demander un assouplissement de la rigueur, a mis les pieds dans le plat en réclamant publiquement un nouveau sursis pour le déficit public. Il souhaite porter l'objectif à 4,5% du PIB en 2014 au lieu des 4% convenus avec la troïka.

Une intervention qui n'a été guère appréciée par Bruxelles. «Je ne pense pas que ce soit un bon signal de maintenir la discussion» sur l'ampleur des objectifs, a rétorqué le chef de file de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, lors d'une réunion vendredi des ministres des Finances de la zone euro à Vilnius.

Les Européens sont d'autant plus réticents que les objectifs de déficits du Portugal ont déjà été assouplis à deux reprises, en septembre et mars derniers. Et le respect du plafond pour cette année (5,5% du PIB) est loin d'être garanti, même si le gouvernement affirme être sur la bonne voie.

Bruxelles redoute avant tout de rendre nerveux les marchés financiers qui guettent de près la mise en oeuvre du plan d'austérité par le Portugal.

Le plein retour sur le marché de la dette à long terme, prévu à l'issue du programme d'aide en juin 2014, est compromis si les taux restent trop élevés. D'où la nécessité d'étudier de nouvelles mesures pour accompagner cette transition, sous forme de ligne de crédit ou plan d'aide.

En attendant, un nouveau test aura lieu mercredi, avec des émissions de bons du Trésor à 3 et 18 mois pour un montant compris entre 1 et 1,25 milliard d'euros. Prudent, le gouvernement, qui comptait initialement placer jusqu'à 1,5 milliard d'euros, a revu à la baisse ses ambitions.

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