En images : Décès de Pierre Soulages, le peintre qui illuminait le noir
outrenoir•Retour sur l’œuvre d’un des artistes français les plus cotés de son vivant
O.J. avec AFP
Pierre Soulages, star mondiale de la peinture connue pour ses tableaux aux nuances infinies de noir, est décédé dans la nuit de mardi à mercredi 27 octobre, à l'âge de 102 ans. Du noir pur, il est parvenu à faire jaillir la lumière. Créateur sans compromis qui bascule dans « l'outrenoir » en 1979, il n'a cessé d'explorer les mystères de ce pigment et de peindre. Pendant plus de 75 ans, il a tracé inlassablement son sillon, s'attirant la reconnaissance des institutions culturelles et du marché de l'art. Retour, en images, sur l'œuvre d'un des artistes français les plus cotés de son vivant.
Réalisation : Olivier JUSZCZAK
Soulages est né le 24 décembre 1919 dans une maison modeste du début du XIXe siècle. Son père, artisan carrossier, meurt alors qu’il n’a que cinq ans. Il est élevé par sa mère qui tient un magasin d’articles de pêche et de chasse.
Très tôt, Soulages dédaigne « les jolies couleurs d’aquarelle » et peint à l’encre des arbres en hiver, des branches dénudées, des effets de neige.
Dès 1947, le jeune peintre s’installe à Paris où il est remarqué par Francis Picabia qui l’encourage, ainsi que Fernand Léger.
La peinture abstraite a alors la cote. Mais elle est rouge, jaune, bleue. Soulages, lui, choisit de travailler avec de l’humble brou de noix, utilisé pour teinter le bois, et des brosses de peintre en bâtiment.
Dans les années 1950, ses toiles entrent dans les plus prestigieux musées du monde comme le Guggenheim de New York ou la Tate Gallery de Londres.
Les grandes toiles des années 1950 à 1970 témoignent du travail du peintre sur le clair-obscur. Le noir s’affirme dans un rapport à d’autres couleurs comme le rouge ou le bleu, notamment grâce à la technique du raclage.
L’artiste, qui préfère travailler à plat, bascule dans « l’outrenoir » en 1979 : alors qu’il peine sur une œuvre entièrement recouverte d’un noir épais, Soulages comprend qu’il vient de franchir un cap en la striant.
«J’étais au-delà du noir, dans un autre champ mental », a-t-il raconté. « Le pot avec lequel je peins est noir. Mais c’est la lumière, diffusée par reflets, qui importe. »
En 1986, l’Etat passe commande de plus de 100 vitraux pour l’abbatiale Sainte-Foy de Conques, inaugurés en 1994.
C’est d’ailleurs lors d’une visite scolaire que Pierre Soulages adolescent a une révélation devant la beauté de cette église romane : il sera peintre.
Grand, toujours vêtu de noir, Soulages a acquis une renommée mondiale grâce à ses grandes toiles aux mille nuances de noir.
En mai 2014 - il a alors 94 ans –, il a le rare privilège d’assister à l’inauguration à Rodez, sa ville natale, d’un musée entièrement dédié à son œuvre.
Pendant plus de 75 ans, il trace inlassablement son sillon, s’attirant la reconnaissance des institutions culturelles et du marché de l’art qui en fait l’un des artistes français les plus cotés de son vivant.
Le 27 novembre 2019, il devient le peintre français vivant le plus cher avec la vente d’une toile pour 9,6 millions d’euros à Paris.
Un record battu avec une toile vendue à 20,2 millions de dollars, à New York, le 16 novembre 2021.
«J’aime l’autorité du noir, sa gravité, son évidence, sa radicalité (…) Le noir a des possibilités insoupçonnées », disait l’artiste, un des rares à avoir eu les honneurs du Louvre de son vivant. Jusqu’alors, seuls Picasso et Chagall avaient eu ce privilège.