Décès de Pierre Soulages, le peintre qui illuminait le noir

En images : Décès de Pierre Soulages, le peintre qui illuminait le noir

outrenoirRetour sur l’œuvre d’un des artistes français les plus cotés de son vivant
Le peintre français Pierre Soulages pose parmi certaines de ses toiles lors de la présentation de son exposition "Pierre Soulages" le 1er octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau à Berlin.
Le peintre français Pierre Soulages pose parmi certaines de ses toiles lors de la présentation de son exposition "Pierre Soulages" le 1er octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau à Berlin. - JOHANNES EISELE/AFP
Olivier Juszczak

O.J. avec AFP

Pierre Soulages, star mondiale de la peinture connue pour ses tableaux aux nuances infinies de noir, est décédé dans la nuit de mardi à mercredi 27 octobre, à l'âge de 102 ans. Du noir pur, il est parvenu à faire jaillir la lumière. Créateur sans compromis qui bascule dans « l'outrenoir » en 1979, il n'a cessé d'explorer les mystères de ce pigment et de peindre. Pendant plus de 75 ans, il a tracé inlassablement son sillon, s'attirant la reconnaissance des institutions culturelles et du marché de l'art. Retour, en images, sur l'œuvre d'un des artistes français les plus cotés de son vivant.


Réalisation : Olivier JUSZCZAK

Au Centre Pompidou à Paris, le mardi 13 octobre 2009, à la veille de l’ouverture d’une exposition de l’artiste Pierre Soulages.
Au Centre Pompidou à Paris, le mardi 13 octobre 2009, à la veille de l’ouverture d’une exposition de l’artiste Pierre Soulages. - REMY DE LA MAUVINIERE/AP/SIPA / SIPA

Soulages est né le 24 décembre 1919 dans une maison modeste du début du XIXe siècle. Son père, artisan carrossier, meurt alors qu’il n’a que cinq ans. Il est élevé par sa mère qui tient un magasin d’articles de pêche et de chasse.

Exposition "Pierre Soulages" le 1er octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau à Berlin.
Exposition "Pierre Soulages" le 1er octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau à Berlin. - JOHANNES EISELE/AFP / AFP

Très tôt, Soulages dédaigne « les jolies couleurs d’aquarelle » et peint à l’encre des arbres en hiver, des branches dénudées, des effets de neige.

Une femme marche devant des peintures des artistes Judit Reigl, Pierre Soulages, Jean Degottex au musée des beaux-arts de Nantes, le 16 août 2018.
Une femme marche devant des peintures des artistes Judit Reigl, Pierre Soulages, Jean Degottex au musée des beaux-arts de Nantes, le 16 août 2018. - SEBASTIEN SALOM GOMIS/SIPA / SIPA

Dès 1947, le jeune peintre s’installe à Paris où il est remarqué par Francis Picabia qui l’encourage, ainsi que Fernand Léger.

Une photo montre des peintures de l’artiste français Pierre Soulages le 12 octobre 2009 au Centre Pompidou à Paris.
Une photo montre des peintures de l’artiste français Pierre Soulages le 12 octobre 2009 au Centre Pompidou à Paris. - PIERRE VERDY/AFP / AFP

La peinture abstraite a alors la cote. Mais elle est rouge, jaune, bleue. Soulages, lui, choisit de travailler avec de l’humble brou de noix, utilisé pour teinter le bois, et des brosses de peintre en bâtiment.

Le Centre Pompidou expose les derniers tableaux qu’il a acquis de Pierre Soulages, à Paris, le 9 décembre 2019.
Le Centre Pompidou expose les derniers tableaux qu’il a acquis de Pierre Soulages, à Paris, le 9 décembre 2019. - GINIES/SIPA / SIPA

Dans les années 1950, ses toiles entrent dans les plus prestigieux musées du monde comme le Guggenheim de New York ou la Tate Gallery de Londres.

Le Centre Pompidou expose les derniers tableaux qu’il a acquis de Pierre Soulages, à Paris, le 9 décembre 2019.
Le Centre Pompidou expose les derniers tableaux qu’il a acquis de Pierre Soulages, à Paris, le 9 décembre 2019. - GINIES/SIPA / SIPA

Les grandes toiles des années 1950 à 1970 témoignent du travail du peintre sur le clair-obscur. Le noir s’affirme dans un rapport à d’autres couleurs comme le rouge ou le bleu, notamment grâce à la technique du raclage.

Une photo montre des peintures de l’artiste français Pierre Soulages le 12 octobre 2009 au Centre Pompidou à Paris.
Une photo montre des peintures de l’artiste français Pierre Soulages le 12 octobre 2009 au Centre Pompidou à Paris. - PIERRE VERDY/AFP / AFP

L’artiste, qui préfère travailler à plat, bascule dans « l’outrenoir » en 1979 : alors qu’il peine sur une œuvre entièrement recouverte d’un noir épais, Soulages comprend qu’il vient de franchir un cap en la striant.

Exposition consacrée à l’œuvre de Pierre Soulages intitulée "Soulages XXIe siècle" le 11 octobre 2012 au Musée des Beaux-Arts de Lyon.
Exposition consacrée à l’œuvre de Pierre Soulages intitulée "Soulages XXIe siècle" le 11 octobre 2012 au Musée des Beaux-Arts de Lyon. - PHILIPPE DESMAZES/AFP / AFP

«J’étais au-delà du noir, dans un autre champ mental », a-t-il raconté. « Le pot avec lequel je peins est noir. Mais c’est la lumière, diffusée par reflets, qui importe. »

Un visiteur regarde des œuvres de peintre, graveur et sculpteur français, Pierre Soulages, au musée de l’Outrenoir, le 28 mai 2014 dans la ville de Rodez.
Un visiteur regarde des œuvres de peintre, graveur et sculpteur français, Pierre Soulages, au musée de l’Outrenoir, le 28 mai 2014 dans la ville de Rodez. - PASCAL PAVANI/AFP / AFP

En 1986, l’Etat passe commande de plus de 100 vitraux pour l’abbatiale Sainte-Foy de Conques, inaugurés en 1994.

Illustration de l’abbaye de Sainte-Foy de Conques en Aveyron.
Illustration de l’abbaye de Sainte-Foy de Conques en Aveyron. - FRANCK LODI/SIPA / SIPA

C’est d’ailleurs lors d’une visite scolaire que Pierre Soulages adolescent a une révélation devant la beauté de cette église romane : il sera peintre.

Le peintre français Pierre Soulages pose parmi certaines de ses toiles lors de la présentation de son exposition "Pierre Soulages" le 1er octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau à Berlin.
Le peintre français Pierre Soulages pose parmi certaines de ses toiles lors de la présentation de son exposition "Pierre Soulages" le 1er octobre 2010 au Martin-Gropius-Bau à Berlin. - JOHANNES EISELE/AFP / AFP

Grand, toujours vêtu de noir, Soulages a acquis une renommée mondiale grâce à ses grandes toiles aux mille nuances de noir.

Le Musée Soulages à Rodez, dessiné par le groupement d’architectes RCR, Rafael Aranda, Carmen Pigem et Ramon Vilaltz.
Le Musée Soulages à Rodez, dessiné par le groupement d’architectes RCR, Rafael Aranda, Carmen Pigem et Ramon Vilaltz. - MARIO FOURMY/SIPA / SIPA

En mai 2014 - il a alors 94 ans –, il a le rare privilège d’assister à l’inauguration à Rodez, sa ville natale, d’un musée entièrement dédié à son œuvre.

Le musée Pierre Soulages, le 11 avril 2014 à Rodez, il doit ouvrir ses portes en mai 2014.
Le musée Pierre Soulages, le 11 avril 2014 à Rodez, il doit ouvrir ses portes en mai 2014. - PATRICK AVENTURIER/SIPA / SIPA

Pendant plus de 75 ans, il trace inlassablement son sillon, s’attirant la reconnaissance des institutions culturelles et du marché de l’art qui en fait l’un des artistes français les plus cotés de son vivant.

Un visiteur regarde une peinture de l’artiste français Pierre Soulages dans le cadre de l’exposition "Soulages XXIe siècle" à la Villa Médicis le 1er mars 2013 à Rome.
Un visiteur regarde une peinture de l’artiste français Pierre Soulages dans le cadre de l’exposition "Soulages XXIe siècle" à la Villa Médicis le 1er mars 2013 à Rome. - GABRIEL BOUYS/AFP / AFP

Le 27 novembre 2019, il devient le peintre français vivant le plus cher avec la vente d’une toile pour 9,6 millions d’euros à Paris.

Une femme regarde des tableaux de l’artiste français Pierre Soulages présentés lors d’une exposition, le 28 janvier 2010 au centre Georges Pompidou à Paris.
Une femme regarde des tableaux de l’artiste français Pierre Soulages présentés lors d’une exposition, le 28 janvier 2010 au centre Georges Pompidou à Paris. - LOIC VENANCE/AFP / SIPA

Un record battu avec une toile vendue à 20,2 millions de dollars, à New York, le 16 novembre 2021.

Peintre, graveur et sculpteur français, Pierre Soulages pose devant sa peinture au musée du maître "Outrenoir", le 28 mai 2014, à Rodez.
Peintre, graveur et sculpteur français, Pierre Soulages pose devant sa peinture au musée du maître "Outrenoir", le 28 mai 2014, à Rodez. - PASCAL PAVANI/AFP / AFP

«J’aime l’autorité du noir, sa gravité, son évidence, sa radicalité (…) Le noir a des possibilités insoupçonnées », disait l’artiste, un des rares à avoir eu les honneurs du Louvre de son vivant. Jusqu’alors, seuls Picasso et Chagall avaient eu ce privilège.