SUCCESPourquoi «Intouchables» a touché la france

Pourquoi «Intouchables» a touché la france

SUCCESLa compassion fait recette en salle...
Caroline Vié

Caroline Vié

C'est un raz-de-marée. Intouchables d'Olivier Nakache et Eric Toledano affiche complet et a réuni près de cinq millions de spectateurs en douze jours. « On a senti que ça allait marcher dès la première projection pour les exploitants l'été dernier », dit Laurent Geissmann, programmateur de salles indépendantes.

Humour plus compassion

Le handicap et la maladie attirent-ils le public dans les salles de cinéma ? Le succès surprise de La guerre est déclarée de Valérie Donzelli, rassemblant plus de 800 000 spectateurs autour d'un couple et de son enfant malade, invite à se poser la question. « C'est l'humour qui change tout, explique Rebecca, spectatrice de 55 ans, sortie enthousiaste d'une projection d'Intouchables à Arras. Cela fait du bien de voir des gens garder le moral dans des situations douloureuses. »

Même son de cloche chez Jérôme, 20 ans. « J'ai vu les deux films avec mes parents parce que les sujets et les acteurs attiraient toute la famille, ce qui est plutôt rare. » Le philosophe Thibaut de Saint Maurice, auteur des deux volumes de Philosophie en séries (paru chez Ellipses), ajoute : « Ces films jouent sur le care, à savoir la compassion que l'on peut ressentir par rapport à l'autre. Ce ne sont ni la maladie ni le handicap qui passionnent les spectateurs, c'est le fait qu'il est rassurant de voir des gens simples se tirer d'affaires en s'entraidant. »

Intouchables semble destiné à poursuivre sa brillante carrière en France en attendant la sortie américaine et le remake hollywoodien. « Les valeurs que défendent ces films sont universelles à une époque où l'individualisme est roi », déclare Thibaut de Saint Maurice. Le comportement généreux des personnages y prime sur les grands principes. » En attendant, Gaumont se frotte les mains car le phénomène continue. « Je vais y retourner avec mes copains, déclare Jérôme, qui rigole encore en citant « Pas de bras, pas de chocolat », réplique culte.

Mais que fait la «Polisse»?

Autre surprise, le Polisse de Maiwenn frôle les deux millions de spectateurs, un beau score pour une chronique pas vraiment festive sur la brigade de protection des mineurs. Une belle brochette d'acteurs ajouté à l'effet Cannes et à une mise en scène nerveuse expliquent partiellement ce triomphe inattendu. «Il faut aussi prendre en compte l'influence des séries télévisées, explique Thibaut de Saint Maurice. De grands succès policiers comme « Les Experts » ou « Braquo » ont formé les spectateurs à un certain réalisme. Il y a eu une véritable mutation du regard du public. » Ce phénomène sert certainement ce magnifique film choral où des bouffées d'humour bienvenu dédramatisent des situations particulièrement pénibles.