« C’est la fin d’une époque… » Près de Nantes, la fermeture de l’un des tout derniers vidéoclubs de France
NOSTALGIE•Le Dan Vidéoclub ferme ce week-end après 30 ans d’existence. Son gérant, témoin d’un âge d’or révolu, part en retraite. Il raconte
Frédéric Brenon
L'essentiel
- Dan Vidéoclub propose 10.000 références de DVD et Blu-ray à la location.
- Ses clients de tous âges venaient pour le conseil et le lien social.
- Les vidéoclubs ont presque tous succombé à l’essor d’Internet et de la VOD.
C’est l’un des derniers représentants d’une profession qui a dénombré jusqu’à 8.000 points de vente en France et en compterait désormais moins de dix. Au Loroux-Bottereau, petite commune de la banlieue nantaise, Dan Vidéoclub fermera définitivement ses portes dimanche. Son patron, Daniel Lecoindre, véritable encyclopédie du cinéma, va partir en retraite après avoir tenu à bout de bras son magasin pendant trente années.
« Pour l’instant je ne réalise pas trop parce que je suis dans le feu de l’action, raconte Daniel, 60 ans. Mais ça va faire bizarre évidemment. Ce magasin, c’était mon bébé, j’y travaillais sept jours sur sept. J’ai connu l’âge d’or de la vidéo, l’euphorie des années 1990 du temps des magnétoscopes. J’ai connu les évolutions technologiques avec le remplacement de la VHS. Puis la dégringolade, aussi, avec l’arrivée du DVD et, surtout, l’essor d’Internet et du streaming. »
« Enormément de retours, beaucoup de tristesse »
Celui qui possède quelque 10.000 références de films dans sa boutique, qu’il loue 3,40 euros l’unité, avait réussi à tisser un lien étroit avec sa clientèle, même auprès d’une « nouvelle génération qui n’avait jamais fréquenté le moindre vidéoclub ». « Mes clients me faisaient confiance pour passer une bonne soirée en famille ou trouver une comédie qui plaira aux enfants. Mon plaisir, c’était de leur donner le bon conseil, adapté à chacun. Et puis repartir avec un boîtier, toucher le support, c’est une autre démarche. »
Depuis l’annonce de la fermeture de la boutique de Dan, il y a un mois, les témoignages de déception mêlée aux remerciements s’amoncellent. « J’ai énormément de retours de clients, avec beaucoup de tristesse, confie le sexagénaire. Ils me disent que c’est un repaire atypique qui va disparaître. Ils étaient fiers d’avoir un vidéoclub sur la commune. »
Une « seconde vie » pour la collection de DVD
Si le magasin va bel et bien baisser le rideau, la collection de DVD et Blu-Ray, elle, ne partira pas aux oubliettes. Une « mécène » de la région nantaise a en effet racheté l’ensemble. « Son objectif est de conserver ce patrimoine culturel et de lui donner une seconde vie. Je ne pouvais pas rêver mieux, d’autant plus qu’il y a dans le stock quelques pépites qu’on ne trouve plus ailleurs », raconte Daniel.
Le presque retraité poursuit. « Je faisais de la résistance, mais voilà, c’est la fin d’une époque. On tourne définitivement la page d’un mode de consommation. En France, on a plongé très rapidement. La dématérialisation est allée très vite. La désaffection des salles de cinéma aujourd’hui, je trouve ça dramatique. Sortir pour sélectionner un film, c’est déjà du lien social. »
Hors de la région nantaise, 20 Minutes a recensé deux vidéoclubs ouverts en Ile-de-France, un à Calais, un à Bordeaux, un à Marseille et un à Lyon. Certains sont intégrés dans une salle culturelle. D’autres ont choisi de diversifier l’activité avec des services complémentaires (relais-colis, photocopies…). « La location ne représente plus que 30 % de mon chiffre d’affaires, explique Jean, gérant de Yoyo Vidéo à Bordeaux. Mais je tiens bon, je n’ai pas l’intention de fermer. »