Mort de Michael Jackson: au-delà des transformations, la communauté afro-américaine perd une icône
DECES•Deux musiciennes du label Motown reviennent pour 20minutes.fr sur son parcours et son impact...Philippe Berry
«La première fois que je l'ai rencontré, je lui ai préparé des spaghetti. Il avait 9 ans.» Janie Bradford, qui a participé à l'écriture de «Money (That's what I want)», le premier tube sorti du label du label Motown, emblématique de la soul noire, se souvient pour 20minutes.fr. «C'était un petit garçon plein de vie, avec un talent déjà spécial.»
La signature des Jackson Five sur le label en 1969 s'impose comme une évidence. Le départ pour CBS, à l'initiative du père, Joe, six ans plus tard, sera dépeint par certains comme une volonté de s'éloigner de leurs racines. Des accusations que balaie Janie Bradford. «C'était surtout une affaire d'argent. Ça leur a permis, et surtout à Michael, de grandir et de toucher plus de monde».
Avant Barack Obama, un précurseur
De l'Appolo Theater d'Harlem aux marches de l'hôpital à Los Angeles, la communauté afro-américaine a pleuré la perte de Michael Jackson. D'abord parce qu'il était l'une des figures les plus marquantes de la pop musique. Mais aussi car il a contribué à faire tomber d'innombrables barrières, dans le monde de la musique et dans la société américaine.«Michael Jackson a permis à une personne de couleur d'être acceptée bien avant Tiger Woods, Oprah Winfrey ou Barack Obama», a lancé le révérend Al Sharpton.
Pourtant, impossible d'ignorer l'éléphant dans la pièce –cette peau qui blanchit, et ce nez détruit à coup de bistouri. Maladie, trouble mentaux, un peu des deux: personne n'aura jamais la réponse. «Qu'importe», s'emporte Sylvia Mason (anciennement Smith), 60 ans, elle aussi passée par Motown comme chanteuse, compositrice et productrice, et qui est restée en contact avec le chanteur jusqu'au milieu des années 80. Pour elle, Michael Jackson était «un croisement d'homme-enfant et de génie. Et pas seulement de la musique. Son esprit était ailleurs, avec des considérations qui peuvent sembler étrange au commun des mortels. Qui peut prétendre le comprendre?», demande-t-elle.
Sylvia et Janie ne se sont jamais senties «trahies» par ces transformations. «Michael a toujours dénoncé le racisme, dans ses chansons ou ses actions», soutient Sylvia, hors d'elle face aux accusations sur l'opportunisme d'un «retour aux racines» effectué uniquement quand il avait des ennuis, comme a pu le sous entendre le quotidien britannique «Le Guardian». Janie, elle, retient la musique. «Des blancs, des noirs, des latinos, des asiatiques ont dansé sur ses tubes. Des Afro-Américains se sont mis à aller dans des clubs où l'on ne voyait que des blancs, des artistes comme Prince ont pu pousser la porte qu'il avait entrouverte. C'est tout ce qui compte.»