Clarika: «Les chansons sur les enfants m'énervent»
INTERVIEW•La chanteuse Clarika dégaine son cinquième album, «Moi en mieux»...Recueilli par Alice Antheaume
Collants colorés, cheveux de jais coupés au carré et petite frange, Clarika trottine dans les couloirs de la maison de disques Universal, arborant à la poitrine un badge rose sur lequel est inscrit le mot «vedette». Façon de rire d’elle-même. Car la chanteuse française a beau sortir son cinquième album («Moi en mieux»), elle n’a rien d’une star. Ni même d’une starlette d’ailleurs. Interview.
C’est vous, la blonde toute nue et tatouée sur la pochette de votre album?
Merci de croire ça, mais non, c’est Dorota, une créature sublime. Elle est danseuse au Crazy Horse ou au Lido, je ne sais plus. Elle a un tatouage de moi dans le dos. Pour faire le dessin, il a fallu qu’elle patiente 8 heures, ce que je n’aurais jamais pu faire, sachant que le soir même de la séance photo, elle devait retourner danser et avoir la peau nickel. Avec ses longs cheveux blonds qui descendent jusqu’au creux des reins, elle incarne le début de ma chanson «Moi en mieux».
Vous vous appelez Claire. Pourquoi avoir pris comme pseudo Clarika?
J’avais envie d’avoir un nom de scène. J’aime le côté paillettes de le scène et surtout donner de moi ce que j’ai envie de montrer. Et puis, Clarika, ça veut dire «petite Claire» en hongrois. Mon père, originaire de Hongrie, m’appelait ainsi.
La séquence de Clarika
Vous ne faites pas partie des minettes de la chanson qui se trémoussent dans les clips...
Je n’ai fait que quelques clips, mais pas en string. Le but n’est pas de me mettre en valeur physiquement mais de raconter une histoire. Dans «Les garçons dans les vestiaires», le clip d’un précédent album, j’ai tourné avec les rugbymen du Stade Français. Cette fois, pour le clip «Bien mérité», qui parle du militantisme, je n’allais pas défiler dans les rues de Paris, caméra au poing. Au lieu de faire de l’illustratif, on a réanimé quelque 4.500 photos de moi, et le clip est ainsi fait, sans rien de filmé.
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Clarika - Bien Mérité
Dans la chanson «Bien mérité», vous dites que vous avez du mal à faire une manif sans filer au troquet du coin avant la fin...
Oui. C’est un autoportrait assez fidèle de ce que je suis, pleine de contradictions entre mon idéal fantasmé et la réalité. Aller aux manifs et bifurquer pour boire un coup; prendre deux bains par jour tout en votant écolo... C’est une manière de me moquer de moi.
Quelles sont vos limites?
Sur la scène, je n’ai pas de limites, sauf celles de la décence. Dans le domaine de l’écriture, je ne peux pas écrire sur tout. A un moment, j’ai voulu me lancer dans une chanson sur quelqu’un qui se trouvait en prison. Soudain, cela m’a paru artificiel. Ce que j’écrivais était cliché, car au fond, je ne sais pas ce que c’est que d’être emprisonné. Je ne suis pas obligée de tout connaître pour écrire mais il faut que je me sente un minium concernée. Sur la Guadeloupe, que pourrais-je dire? Alors que sur Belleville, là où j’habite, pas de problème.
Vous écrivez sur vos enfants dans «Lâche-moi». Un exercice imposé, quand on est mère et chanteuse?
Au départ, je ne voulais pas écrire sur eux. Car les chansons de ce style m’énervent au plus haut point. Surtout celles que les artistes écrivent au premier degré à la naissance de leur fille ou leur fils. Mais «Lâche-moi», c’est l’une des rares chansons que j’ai écrite sur une mélodie que l’on m’a donnée, composée par Hugo Renard. Elle n’évoque pas du tout la naissance, ni les gâ gâ ou les mièvreries, mais comment, quand on est parent, on gère et lâche du lest. Moi qui ai tendance à être une mère louve, je sais qu’il faut apprendre à ne pas se sentir propriétaire de ses enfants.