CINEMALe cinéma français surfe sur la mode des biopics

Le cinéma français surfe sur la mode des biopics

CINEMADans le giron de «La Môme»?

Bientôt au cinéma, Jacques Mesrine, Coluche, Gainsbourg... Les films qui retracent le parcours de personnalités françaises se multiplient. Tendance lourde ou capitalisation sur la recette de «La Môme», consacré à Edith Piaf et couronné par un Oscar cette année?

En France, peindre sur écran une Françoise Sagan (le long-métrage de Diane Kurys) ou une Coco Chanel (film à venir d’Anne Fontaine) s’appelle une biographie filmée. Aux Etats-Unis, c'est un «biopic» - de «biographical picture». Une tradition américaine qui cartonne – souvenons-nous d'«Ali» ou «Truman Capote». Des films mi-historiques mi-fictions qui déroulent le fil «enfance pas toujours facile, débuts compliqués, ascension fulgurante, succès à gérer, mort».

De quoi accrocher le spectateur, même si celui-ci ignore tout du héros. «Le biopic est lié à la manière dont les Américains représentent l'histoire. Un destin personnel fait revivre une époque et la rend plus intéressante», explique Marc Cerisuelo, professeur d'histoire et esthétique du cinéma.

La recette américaine traverse l'Atlantique

Le biopic, une formule que le cinéma français a délaissé, pendant plusieurs décennies, au profit de films d’auteurs. En 2005, le réalisateur Robert Guédiguian y revient avec «Le promeneur du Champ-de-Mars», un film sur François Mitterrand. Mais ce sont les millions d’entrées et l’Oscar remporté par Marion Cotillard dans «La Môme» qui ont pu remuer les méninges des producteurs. Car si le cinéma américain fait des recettes avec des biopics, il n'y a aucune raison que le cinéma français n'en fasse pas à son tour avec cette formule. «On fabrique des films pour que ça marche, pas pour que des auteurs s’expriment», résume un connaisseur. Carole Scotta, la productrice du «Coco Chanel» d'Anne Fontaine, en convient: même si le film a été conçu avant le succès de «La Môme», «son financement a été incontestablement favorisé par le triomphe du film d'Olivier Dahan.»

Donner à voir au public le mythe des gens connus semble pourtant une ficelle éculée. Bien avant «Che», le film fleuve avec Benicio del Toro en révolutionnaire, les films de Sacha Guitry peignent dès les années 50 rois de France et Napoléon. Mais les Français ne se privent pas de tourner le biopic à leur sauce, en évoquant par exemple que la jeunesse du personnage («Coco Chanel») ou en s'attardant sur sa vieillesse («Sagan»).

La performance d'acteurs «monstres»

Surtout, là où la donne a changé, c'est du côté des acteurs qui subissent une véritable métamorphose pour incarner le héros. Un défi qui ressemble à une performance. Avant de jouer la romancière Françoise Sagan à l'écran, Sylvie Testud raconte qu'elle ne voyait «que trop la dimension casse-gueule du rôle: incarner Sagan, c'est accepter le risque d'un triple accident. Sa silhouette, son attitude, et surtout son rythme exigent de l'actrice une déformation corporelle, intellectuelle et verbale.»


Des heures de travail plus tard, assorties de non moins d'heures de maquillage, voilà l'acteur, ou l'actrice, prêt(e) à sauter dans la peau de son personnage. Pour les acteurs qui veulent devenir gros, c'est quasi un passage obligé. L'occasion de prouver - toujours cette obsession - qu'ils sont «bankables» car vu le temps de préparation au rôle, ce sont souvent des films de grande ampleur (si ce n'est «Sagan» qui devait être un téléfilm au départ). Ainsi officiera Vincent Cassel en Mesrine, Audrey Tautou en Coco Chanel. Et en 2009, un interprète d'Yves Montand dont on ignore encore le nom.