INTERVIEW«Se dessiner soi-même, c’est mieux que des photos»

VIDEO. Lewis Trondheim: «Se dessiner soi-même, c’est mieux que des photos»

INTERVIEWGrand Prix du festival de la BD d’Angoulême 2006, Lewis Trondheim redécouvre et commente d'anciennes planches de sa série autobiographique « Les Petits riens », dont le 8e tome sort début avril...
Olivier Mimran

Olivier Mimran

L'essentiel

  • Depuis ses débuts, Lewis Trondheim publie sur son blog des billets autobiographiques, repris ensuite en albums.
  • Il a ainsi réalisé plus de 1300 billets en 25 ans.
  • L'auteur s'y représente en volatile (un rapace pour le public, une perruche selon lui).

L’autobiographie, Lewis Trondheim la pratique assidûment depuis 25 ans. Au point qu’il en tiré une série, Les petits riens dans laquelle il dévoile son quotidien d’artiste… et de « monsieur tout le monde », comme il l’explique dans la vidéo ci-dessous.

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À l’occasion de la prochaine sortie de Tout est à sa place dans ce chaos exponentiel, 8e volume de ses instantanés, 20 Minutes a soumis au prolifique auteur (il a signé ou co-signé plus de 150 ouvrages de BD) quelques billets emblématiques réalisés de 2006 à 2015 afin de savoir ce qu’il en pense aujourd’hui.


Vous souvenez-vous de ce billet ?

Là, oui, je suis systématiquement comme ça s’il pleut avec du soleil. Je cherche l’arc-en-ciel. C’est comme des mathématiques du réel. 1+1 = 2. Pareil pour les galets aplatis trouvés au bord d’un lac. Impossible de ne pas faire des ricochets.

Si vous pouviez le reprendre aujourd’hui, que changeriez-vous ?

J’évite de trop regarder mes dessins. Je me suis déjà fait piéger à redessiner 2 ou 3 albums comme ça…


Vous avez vraiment une imagination fertile !

Oui, j’ai souvent le cerveau qui s’emballe à penser à tout et n’importe quoi. Et j’aime bien m’en moquer. Mais la plupart du temps je l’utilise pour faire des scénarios.


Ici, vous avez l’air d’avoir une nature très inquiète…

Ha ha ! Je ne m’en souvenais pas de celle-là. En même temps j’ai fait mille pages des petits riens. Se dessiner soi-même, c’est mieux que des photos pour se souvenir des choses.


… et là, c’est très personnel, non ?

Ce billet, je m’en souvenais bien. J’ai hésité à le partager. Je me disais que ça n’intéresserait personne, ou qu’on allait se fiche de moi. Finalement ça a été…

Globalement, et 12 ans après les avoir commencés, quel regard portez-vous sur vos « Petits riens » ?

Ça fait des petits Polaroid, des fragments de vie, de pensées. Huit albums de souvenirs personnels. Et je suis toujours surpris que des lecteurs soient intéressés. Surtout que je ne parle jamais cul.

N’est-il pas difficile - voire douloureux ? - de se raconter à de parfaits étrangers ?

Non. De toute façon je suis pudique et je ne raconte pas tout. Mon but n’est pas de faire de mes lecteurs des voyeurs mais des copains à qui je raconte des petites anecdotes.

Vous vous dessinez autant vous émerveillant d’un rien que flippé ou renfrogné… Votre double de papier ne serait-il pas un peu schizophrène ?

Je ne crois pas en l’unicité de l’individu. On a des phases, des humeurs. On varie du blanc éclatant au noir le plus sombre. Mais en même temps, ce que vous citez n’est pas si contradictoire. Je suis très naïf, mais aussi endurci par la vie…


En quoi l’exercice du billet autobiographique a-t-il influencé votre pratique artistique ?

J’ai plus confiance en moi pour faire des couleurs, des illustrations… Et psychologiquement, c’est toujours bon de poser des choses par écrit plutôt que de les accumuler dans la tête.

Aviez-vous dès le début en tête une éventuelle publication papier ?

Dès le début, c’était un exercice personnel pour apprendre à faire des aquarelles. J’ai fait une vingtaine de pages comme ça. Puis je me suis dit que ce serait pas mal de les poster en blog sur internet. Ça sert toujours d’élément moteur de se sentir obligé de mettre de nouvelles pages en ligne. Au bout de 50 pages, là j’ai commencé à penser à faire des recueils.

Vous avez déclaré que c’était une œuvre que vous poursuivriez jusqu’à votre mort. En quoi vous importe-t-elle plus que le reste de votre production ?

C’est un travail sur le long terme. Je tâcherai de conserver la même sincérité, mais vieillissant, je n’aurai forcément plus le même rapport aux choses, en bien ou en mal. Et cette série pourra aussi être lue pour voir le changement psychologique d’un être humain. Positivement ou négativement.

« Les petits riens » tome 8, de Lewis Trondheim - éditions Delcourt - 12,50 euros
En vente le 04 avril 2018