VIDEO. César, le «monsieur bricolage» de la sculpture, exposé à Beaubourg
EXPOSITION•Le musée parisien donne à voir, jusqu’au 26 mars, l’étendue de l’œuvre du sculpteur qui a utilisé au fil des ans un grand nombre de matériaux et d’outils, en accomplissant souvent des gestes artistiques radicaux…Fabien Randanne
L'essentiel
- Le Centre Pompidou accueille jusqu’au 26 mars 2018 l’exposition « César - La rétrospective ».
- L’artiste, mort en 1998, a laissé derrière lui une multitude d’œuvres ayant marqué l’histoire de la sculpture.
- César, célèbre pour ses compressions, a eu recours à de nombreux outils pour créer des œuvres à partir de matériaux plus ou moins malléables.
«César était un merveilleux bricoleur », lance Bernard Blistène, le commissaire de l’exposition qu’accueille le Centre Pompidou (Paris 4e) jusqu’au 26 mars. Les plus malicieux noteront que cette institution parisienne est érigée à deux pas d’un Leroy-Merlin. Qui sait, si on n’aurait pas croisé l’artiste, disparu en 1998, dans les travées du magasin…
Blague à part, au fil des décennies, César a utilisé de multiples outils, du fer à souder au pantographe, travaillé les matières des plus malléables (le carton…) aux plus retorses (la mousse de polyuréthane…) et, ce faisant, révolutionné la sculpture du XXe siècle. Cette rétrospective en apporte une évidente démonstration. Les œuvres sont exposées dans un espace ouvert qui les fait entrer en résonance les unes avec les autres. Le parcours refuse la chronologie pour se focaliser sur les matières et mettre en lumière les terrains d’expérimentations parfois méconnus de César.
- Fer soudé
A la fin des années 1940, César s’essaye à la soudure à l’arc. Influencé notamment par l’œuvre de Picasso, il modèle des matériaux de récupération (tôle, déchets ferreux, écrous, etc.) pour façonner des animaux (chauve-souris, scorpion, etc.) ou des détails de l’anatomie (torse, tête, etc.).
Ses Plaques confinent quant à elle à l’abstraction. Il compose d’autres œuvres à partir de carrosseries bosselées et de tôles froissées récupérées dans des casses automobiles. Autant de prémonition de ses compressions.
- Compression
« Klein et ses monochromes, Pollock et son dripping, César et ses compressions, énumère Bernard Blistène. D’ailleurs, on ne dit pas « les compressions de César », mais « les compressions » et l’on sait de quoi et de qui l’on parle. » C’est en 1960 que l’artiste met la main sur une presse géante en provenance des Etats-Unis. Il l’a découverte au hasard chez un ferrailleur de Gennevilliers. Au départ, il récupère des métaux déjà compressés pour en faire une œuvre. Très vite, il se lance dans les compressions « dirigées » : au geste d’écrasement délégué à la machine se mêle la subjectivité de l’artiste puisqu’il choisit les matériaux, les couleurs, etc.
Plus tard, César produira des compressions murales à base de matériaux aussi divers que le carton, la toile de jute ou le bois de cagettes. « Je ne connais pas beaucoup d’artistes qui aient imposé des gestes aussi radicaux devenus un paradigme de l’art moderne », reprend le commissaire de l’exposition. En concevant, en 1977, les trophées du cinéma français qui portent son nom, César est d’ailleurs pleinement entré dans la culture populaire.
- Empreintes
Le pantographe était traditionnellement utilisé pour agrandir des sculptures. Au milieu des années 1960, César décide de s’en servir pour réaliser des reproductions, en très grand format, de son pouce. Une empreinte maousse qu’il conçoit d’abord en résine, mais qu’il décline aussi en or, en nickel ou en plastique. L’un de ces doigts gigantesques est exposé à la vue de tous le temps de la rétrospective, devant le Centre Pompidou.
César a aussi moulé un sein d’une danseuse du Crazy Horse, faute d’avoir eu l’accord de Brigitte Bardot ou Jane Fonda. A Beaubourg, le mamelon immaculé agrandi et reproduit en résine est ainsi accroché à un mur, ou s’étale, plus gigantesque encore, comme un monticule, sur le sol de l’exposition.
- Expansions
La mousse de polyuréthane, qui se répand de manière spectaculaire en gagnant du volume, a aussi été une marotte de César.
Ses expansions donnaient lieu à des happenings. L’effet, aussi visuel que ludique, marchait à tous les coups. Au début des années 1970, l’artiste a réussi à enrayer le caractère éphémère de ces mousses avec une technique permettant de les solidifier durablement. Un large aperçu des formes variées ainsi obtenues est exposé à Beaubourg.
- Enveloppages
« Le mot d’« enveloppement » ne le satisfaisait pas. Alors César a inventé le terme d’« enveloppage » », précise Bernard Blistène. C’est sans doute l’aspect le plus méconnu de l’œuvre de l’artiste. Il avait mis au point un processus complexe afin de travailler le Plexiglas pour le rendre malléable et transformer ce matériau en un écrin piégeant des objets du quotidien comme une paire de chaussures ou une machine à écrire.