Bouches-du-Rhône: Le film Caïd, sur le trafic de drogue, tourné avec des acteurs des quartiers Nord, attend une date de sortie
RÉUSSITE•Le film Caïd a remporté le prix du meilleur long-métrage de cinéma au festival du film polar de Cognac et attend maintenant d'être programmé sur les grands écrans…Adrien Max
L'essentiel
- Le film «Caïd» raconte l’histoire d’un journaliste qui suit pendant cinq jours le quotidien d’un caïd de cité qui veut s’en sortir grâce au rap.
- Il est autoproduit, tourné en quatre jours avec des acteurs issus des quartiers Nord.
- La date de sortie du film devrait être annoncée dans les prochains jours.
Ils ont fait mieux qu’Olivier Marchal et son film Carbone. Ange Basterga et Nicolas Lopez ont remporté le 22 octobre dernier le prix du meilleur long-métrage de cinéma au 22e festival du film polar à Cognac, avec Caïd. Une prouesse pour Ange, 36 ans, comédien, réalisateur, scénariste et Nicolas, 31 ans, originaire de Martigues ( Bouches-du-Rhône), qui réalisent des courts-métrages dans les quartiers Nord de Marseille.
a« On a investi tout ce qu’on avait, 70.000 euros, pour le tournage, donc on joue clairement notre vie sur ce projet », glissent les deux amis. Ils ont tourné leur premier film en quatre jours top chrono, avec des acteurs amateurs, originaires des quartiers Nord et des alentours, dont 95 % n’étaient jamais passés devant la caméra.
« Un faux documentaire sur le Disneyland de Marseille »
Le pitch, un journaliste suit Tony pendant cinq jours 24h/24, un caïd d’un quartier de Martigues qui veut s’en sortir par la musique, afin de comprendre son quotidien et les rouages du trafic de drogue. « On a voulu faire une sorte de Zone Interdite [émission d’M6], avec un faux documentaire sur le Disneyland de Marseille », explique Ange, un brin provoc. Car, sans dévoiler le scénario, le but est justement de montrer l’envers du décor de la vie de ces jeunes, dont le destin est souvent tragique.
Pour que le film colle au plus près de la réalité, Ange Basterga, qui joue le rôle du journaliste, et Nicolas Lopez, derrière la caméra, ont fait appel à 70 jeunes des quartiers Nord, recrutés par le bouche-à-oreille. Abdramane, rappeur du centre-ville de Marseille, joue le rôle de Tony, le personnage principal. « Ça s’est fait par hasard, je faisais de la musique et ils sont venus me chercher. J’avais un peu d’appréhension, mais on a travaillé par Facetime, j’ai pu imprimer le rôle et on a fait le taf », raconte-t-il en toute simplicité.
Le rôle de leur vie
Tous les acteurs jouent, de près ou de loin, le rôle de leur vie. Nadil, 21 ans, originaire des Oliviers (XIIIe arrondissement), participe, avec son compère, à beaucoup de scènes avec des scooters :
« « Oui j’aime bien conduire les motos et c’est vrai qu’on a grandi dans ce milieu. On n’a pas vraiment joué de rôle, c’est ce qu’on vit… et encore ce n’est rien ! » »
Autant d’histoires de vie, mises bout à bout, qui permettent de décrire une situation ô combien violente et cruelle, mais bien réelle. Ce n’est pas Jafar, éducateur dans le quartier où le film a été tourné, et qui joue son propre rôle, qui dira le contraire. « Bien sûr que ça décrit bien la réalité de ces quartiers. Le message véhiculé est clair : soit tu finis entre quatre murs, soit tu finis entre quatre planches. Mon rôle, dans la vie, comme au cinéma, est de leur dire que d’autres chemins vers la réussite sont possibles, même si c’est difficile. »
Ce film, autoproduit et réalisé avec de la volonté, en est le parfait exemple. « Si nous ne l’avions pas autoproduit, on m’aurait dit "Nicolas n’a jamais tourné de film, on va le remplacer. Abdramane n’a jamais joué, on va mettre un autre acteur", alors que c’est justement cette force qui nous permet d’être là », s’est félicité Ange, pour la présentation du film en avant-première, jeudi soir à Martigues.
La date de sortie sur les grands écrans devrait être annoncée dans les prochains jours.