Géographie: Montreuil, le Brooklyn parisien est-il le nouveau Berlin ou le nouveau Pigalle?
CLUBBING•Le festival RBMA Paris explore la ville de banlieue parisienne, un an après avoir célébré Pigalle…Benjamin Chapon
Gnagnagna Montreuil par-ci… Gnagnagna Montreuil par-là… La ville de l’Est parisien fait de plus en plus parler d’elle. Les ex-Parisiens qui ont gagné de précieux mètres carrés en y emménageant vantent son « esprit village. » Les nombreux artistes qui profitent de ses « espaces atypiques » pour installer leurs studios à portée de métro de la capitale apprécient son « esprit cosmopolite. » Et désormais, les fêtards n’hésitent plus à franchir le périphérique pour découvrir les clubs et salles de Montreuil.
Consécration ultime, le festival RBMA Paris organise samedi, de 16 heures au petit matin du dimanche, une déambulation à travers cinq lieux montreuillois : La Marbrerie, La Parole Errante, Le Chinois, le Nouveau théâtre de Montreuil et le Studio Lavoir.
« On veut faire découvrir plusieurs lieux pour le prix d’un seul concert, explique Guillaume Sorge, programmateur du festival. A l’heure actuelle, le terreau artistique et musical de Montreuil est unique en son genre. Les meilleurs sets de Paris, ils sont à Montreuil. Et les clubbers viennent en masse au Chinois. »
Reportage de l’extrême
N’écoutant que son courage, 20 Minutes est donc parti en reportage… par-delà le périph' ! Equipé d’une bouteille d’eau, d’un pass Navigo multizone et d’un dico bilingue Français - Banlieusard, nous sommes allés au Chinois, interroger les locaux. Sur la masse de fêtards, bon nombre de Parisiens. Mais vous faites comment pour rentrer chez vous ? « Ben on marche et puis on prend un vélib' » Mais pourquoi vous n’allez pas dans des clubs parisiens ? « L’ambiance est plus détente ici, et c’est moins cher aussi. Et la musique est géniale ! » Tout de même, le lieu draine pas mal de ce que les médias de droite appellent « des bobos ».
Pourtant, selon Guillaume Sorge, ce qui se passe à Montreuil « dépasse la gentrification. Il y a ici des lieux pointus, avec une forte identité. Montreuil reste une ville mixte avec un vrai brassage, une ville qui peut être craignos, qui n’a pas fait fuir les pauvres. » L’an dernier, le festival avait proposé une soirée spéciale similaire à Pigalle, quartier parisien en voie de gentrification. « L’objectif n’est pas de faire venir des hordes de petits parisiens blancs mais de faire découvrir des lieux, de susciter la curiosité de gens qui n’ont pas encore fait la démarche, y compris des Montreuillois. »
Montreuil is the new Paris Nord
Effectivement, le soir à Montreuil, on cherche un peu les Montreuillois. On tombe en revanche sur une troupe de Berlinois venus s’enjailler. De quoi valider le mythe selon lequel « Montreuil is the new Berlin » ? Il faut raison garder selon Guillaume Sorge : « Je ne pense pas qu’il y ait une scène montreuilloise. Avoir plus d’espace pour travailler et des loyers plus bas, ça ne fait pas naître une spécificité stylistique. Et il y a plein d’autres villes de banlieue qui connaissent ce phénomène. La différence, c’est qu’ici il y a plusieurs lieux qui commencent à travailler ensemble. La mairie nous a accueillis à bras ouverts et était très volontaire pour nous aider, c’est bon signe pour la suite. »
Finalement, l’effervescence montreuilloise (toute relative, à 23 heures passées, les rues de Montreuil ressemblent à celles de Melun) rappelle plutôt l’ambiance du nord de Paris il y a une quinzaine d’années. « C’est un peu la Goutte d'Or en plus secure, analyse Guillaume Sorge. Mais ce genre de considérations, c’est vraiment un truc de Parisiens. Pour les artistes étrangers, américains par exemple, que l’on programme, ils vont jouer à Paris. Quand tu vas à Brooklyn, tu te dis que tu es New-York. »