Arcade Fire, frappé par la malédiction des groupes indés qui tournent mal
MUSIQUE•Les Canadiens sortent leur cinquième album, «Everything Now», qui décevra probablement de nombreux ex-fans…Benjamin Chapon
Vous vous souvenez de ce jour où votre horrible voisin qui écoute à fond une musique, de toujours très mauvais goûts, vous a réveillé avec un morceau… d’Arcade Fire ? Ce jour-là, vous avez ensuite entendu ce même morceau à la radio du supermarché, puis le soir au mariage de votre cousin un peu beauf. Puis Arcade Fire a été annoncé en tête d’affiche d’un énorme festival grand public.
Les aristocrates de l’indie pop ont dû faire peu à peu le deuil de leur groupe fétiche découvert en 2004 avec Funeral, l’un des meilleurs albums rocks de ces 20 dernières années. Arcade Fire est devenu un gros groupe de rock. Un de plus. Au moins, leur musique était-elle restée émouvante et audacieuse. Mais avec leur cinquième opus, Everything Now, le groupe canadien verse un peu plus dans le cliché de lui-même avec des hymnes déprimants hurlés sur des musiques disco censément fédératrices et dansantes.
Effet de masse et nostalgie
Preuve qu’Arcade Fire est devenu un groupe mainstream comme les autres : sa promo pénible. Probablement dans le but de dénoncer les fake news et la propension des médias à raconter n’importe quoi pour vendre du papier, Sony a organisé une massive campagne promo à base de faux sites d’info propageant de fausses informations allant de l’amusant gag (le groupe serait ruiné après avoir investi dans un film de Terry Gilliam) au dérapage aigre (une parodie d’un article de Stereogum déçu par le nouvel album).
Comme U2 ou Radiohead avant eux, Arcade Fire semble courir après une période bénie où l’insouciance et la créativité leur ont permis de livrer au moins deux merveilleux albums en dix ans. Dans l’article qui lui a valu la parodie, Stereogum pointait ainsi la faiblesse du nouvel album, mais aussi l’inéluctable déception face aux nouveaux morceaux d’un groupe qu’on a tant/trop aimé, et que l’on associe inconsciemment à des souvenirs heureux, sans doute fantasmés. La nostalgie, en somme.
La course en avant
Sur les forums spécialisés dans la musique pop indé, le topic « Arcade Fire » suscite des commentaires désabusés. L’excitation qui accompagnait l’attente a engendré des torrents de déceptions. La production de l’album, confiée notamment à Thomas Bangalter, moitié du duo Daft Punk, et Steve Mackey, bassiste de Pulp, est en première ligne des critiques. Trop pop, trop chichiteuse par moments, pas assez puissante. La couleur globale de Everything Now, à la fois très sombre et maladroitement revendicative, est accusée de vouloir séduire les hordes de très jeunes auditeurs pour pouvoir remplir des salles ou stades toujours plus grands.
Ainsi, après un week-end à écouter encore et encore cet album, de nombreux adeptes d’Arcade Fire ont enfin osé dire leur déception.
>> Si tel est votre cas, n’hésitez pas à laisser vos impressions en commentaires. Cet article pourra ainsi se transformer en groupe de parole salvateur.